Les années passent et ne se ressemblent pas pour Need For Speed. Forte de plus de 20 ans d'existence, la série se cherche encore, sans jamais vraiment se trouver. Les choses pourraient changer avec ce nouveau jeu, qui sortira bientôt chez nous et ce dans le plus simple apparat, sans sous-titre aucun. Un reboot en bonne et due forme, attendu par de nombreux fans qui ont su reconnaître dans les premiers trailers certaines sources d'inspiration...
Chez Ghost Games, on ne s'en cache pas : le développement de leur premier titre, Need For Speed Rivals, fut compliqué et même un peu hasardeux. Ce qui n'a pas empêché le titre de connaître un certain succès commercial, permettant de fait au jeune studio suédois de gonfler ses effectifs, et de plancher sur un titre plus ambitieux. Jusqu'alors habitué aux sorties annuelles, Need For Speed a été laissé en jachère pendant une grosse année, un temps que le studio a utilisé pour aller à la rencontre des fans. Dans quel but ? Eh bien, celui de savoir ce qu'était NFS pour eux. Ce qui en faisait la sève, la substantifique moelle. Certains éléments ont apparemment mis tout le monde d'accord : vitesse, courses poursuites avec les forces de l'ordre, et customisation. Ghost Games s'est donc mis au travail, et le résultat risque de plaire à certains vieux fans... ou une partie d'entre eux, tout du moins.
La nuit se regroupe, et voici que débute ma course
Le premier trailer de Need For Speed, dévoilé lors du dernier E3, avait créé l'excitation : ce NFS ressemblait fortement à un nouveau Underground, dont le premier épisode sorti fin 2003 avait inspiré une suite et plusieurs titres (Most Wanted, Carbon) suivant le même esprit. Des courses de nuit (sauf pour Need For Speed Most Wanted), un côté jacky-tuning indéniable et un pseudo-monde ouvert (le premier Underground mis à part), et la joyeuse participation de nos amis de la maréchaussée (sauf dans... bref, vous avez compris). Un parti pris particulier qui avait donné une certaine originalité à la série, qui avait surfé sur le succès dans les salles sombres des deux premiers Fast & Furious pour attirer un nouveau public.
Que ce retour au monde de la nuit et du tuning suscite tant d'engouement est tout de même assez paradoxal lorsque l'on se remémore les débats de l'époque, entre fans des NFS classiques et ceux de ces nouveaux titres, plus « rapides et vénères » que respectueux des belles choses de l'automobile. Et pourtant, après avoir tâté du NFS Rivals un peu fade, ou de l'improbable Most Wanted nouvelle édition complètement loupé, il faut admettre que ce retour au monde des courses de nuit a un charme indéniable.
Ghost Games a ainsi dessiné une large carte, inspirée en partie de Los Angeles, une ville tortueuse et richement décorée dont on peut sortir à volonté pour aller faire couiner ses pneus dans les collines locales, dans des sessions de drift qui rappellerons à beaucoup Need For Speed Carbon. Ce dernier a d'ailleurs été l'une des sources d'inspiration principales du titre, soit dit en passant, et cela se ressent quand on se rend compte de l'importance du drift dans le jeu, une discipline carrément élevée au rang d'art par les développeurs. Soit.
Mais une chose est certaine, cette nouvelle ville est franchement chouette et l'on prend un plaisir coupable à jouer les cyber Paul Walker, à rouler à plus de 200 km/h pour prendre un virage tout au frein à main, narguant au passage les deux flics stationnés ici et là. Gros boulot de ce point de vue là, donc.
Gaston, y a l'téléphon qui son
Vous l'aurez compris, l'autre élément de taille de ce Need For Speed sera son scénario et les interactions que l'on pourra avoir avec les divers personnages du jeu. Si nous n'avons pu jouer que 5 ou 6 heures, il semblerait que ce scénario n'ait pas l'impact que l'on pouvait attendre au vu des premières annonces des développeurs. En tant que néophyte, vous entrez donc dans le monde des courses de nuit par la petite porte et devrez vous faire votre place au firmament des amateurs de jantes chromées. Par chance, les quidam locaux sont plutôt amicaux et jamais je ne me suis fait des amis aussi rapidement. Deux appels téléphoniques et hop, j'étais invité aux meilleures soirées, aux courses les plus folles, et j'étais le frère d'à peu près tout le monde. Il faudra donc se faire à l'ambiance « Yo bruh watcha doin' man ? » du titre pour ne pas avoir envie de péter les gencives du jeune Spike à chaque fois qu'il vous adressera la parole.
Le susnommé fait partie d'une petite bande de pilotes qui seront bientôt vos meilleurs amis pour la vie : Manu, Amy, Robyn, et Travis, des amoureux de bagnoles comme vous n'en avez jamais vu dans un jeu vidéo... parce qu'ils ne sont pas des personnages de jeux vidéo, justement : ce sont des acteurs filmés. La transition entre cinématiques (qui n'ont jamais aussi bien portés leurs noms) et les séquences de jeu sont facilitées par plusieurs éléments : d'abord, le fait que parfois, votre bolide numérique soit intégré aux cinématiques, créant un effet Roger Rabbit/Space Jam version jeux vidéo assez particulier ; ensuite parce qu'une fois en jeu, les graphismes se couvrent d'un filtre donnant un aspect très « ciné » à ce Need For Speed, avec un grain que j'ai trouvé assez dérangeant, mais qu'importe ; et surtout l’omniprésence, in-game, desdits copains qui passeront leur temps à vous appeler. D'une pression sur votre manette, vous pourrez décrocher et accepter les rendez-vous, que ce soit au fast-food du coin ou pour une course à l'autre bout de la map. Si cette pratique est amusante au début du jeu, après 4h j'étais particulièrement excédé par ce téléphone qui sonnait en permanence. Le pire étant finalement qu'il ne sonne pas : il vibre. Une fonction que je désactive dans la vraie vie réelle de tous les jours tant le son produit est agaçant... Imaginez mon bonheur lorsque j'ai compris que mon téléphone virtuel passerait son temps à bourdonner.
C'est via ces coups de téléphone que l'on découvre la ville, les épreuves qu'elle héberge, et donc les personnages du jeu. Chacun de nos petits amis est lié à l'une des stars du jeu (Ken Block, Magnus Walker, les japonais Nakai et Morohoshi, et le crew Risky Devils) et on imagine qu'en les impressionnant via les épreuves qu'ils nous proposent, on devrait pouvoir rencontrer ces héros de chair et d'os un jour ou l'autre. Après 5h de jeu, j'étais encore bien loin de n'être ne serait-ce qu'invité à un rendez-vous. Les développeurs parlant d'une durée de vie de 15h/20h pour venir à bout du scénario n'ont manifestement pas menti.
Tu ne griperas point
Parlons maintenant des voitures et de la conduite du jeu, si vous le voulez bien. Enfin, si vous ne le voulez pas, c'est pareil. Ghost Games a largement mis en avant ce que le studio appelle « cinq façons de conduire », et il n'y en a qu'en fait 2 : grip ou drift. Ces cinq supposées façons de conduire sont plutôt cinq façons de voir le monde de l'automobile dans le jeu : la vitesse, le style (drift et jump), la construction (tuning visuel et mécanique), le crew (la conduite synchronisée) et... ce que l'on qualifiera poliment de « manque de respect pour les règles et la mise en danger de nos frères policiers ». Pour les cinq styles, on engrangera en course des points de réputation qui caractériseront à terme notre propre style de conduite. Et comme chaque style est lié aux 5 stars du jeu, il faudra exceller dans chacun d'entre eux pour les rencontrer tous.
Le plus intéressant pour les amateurs de sensations fortes vient donc surtout de la dissociation entre grip et drift, qui a une véritable influence sur le plaisir de conduite. Nous sommes donc sur une série originellement arcade, et on peut affirmer sans trop se tromper que Ghost Games poursuit dans cette voie, sans dénaturer la série donc. On aurait peut-être aimé ressentir un peu plus de sensations en conduisant les divers bolides du jeu, mais mettons cela sur le compte du faible nombre d'heures passées dans l'atelier de préparation et sur le jeu de manière générale, et intéressons nous à la distinction entre grip et drift. En vous rendant dans votre garage, vous avez la possibilité de choisir le comportement de votre voiture, en déplaçant un simple curseur. Cependant, et malgré quelques modestes heures de jeu au compteur, il m'est clairement apparu que la conduite dite « grip » était... plus ennuyante que la mort elle-même, et qu'il valait mieux opter pour une conduite drift plus propice aux dérapages, aux sensations fortes, et donc à l'amusement. Mais je dois admettre que la conduite dans ce Need For Speed ne m'a pas particulièrement convaincu, alors que je suis pourtant client de la série depuis sa création ou presque. Moteur physique trop généreux, voiture peu puissante et/ou mal préparée, j'aimerais le savoir. Attendons la version définitive du jeu pour se prononcer.
Pimp my ride
Le gros morceau de Need For Speed, et sur lequel Ghost Games a manifestement beaucoup travaillé, c'est la partie customisation de voitures, qui est à lui seul un des fameux « styles » dont je vous parlais tout à l'heure. C'est l'apanage de Nakai, un pilotage japonais amoureux de tuning que vous pourrez d'ailleurs rencontrer dans le jeu, grâce à Amy. Et ce sera bientôt le vôtre également. Eh oui parce qu'il faut reconnaître que le bousin est plutôt bien pensé. Concernant la partie mécanique de la chose, il vous suffira finalement d'emmagasiner argent, pognon, fric, flouze et compagnie pour acheter les pièces vous permettant d'acheter un nouveau jeu de suspensions, le filtre à air high-tech qu'il vous manque, ou le nouveau système électrique qui vous permettra de dominer l'asphalte. Certaines pièces se débloqueront elles via le scénario, comme dans les épisodes Underground et ses suites, spirituelles ou non. Ghost Games ne s'en cache pas, vous pourrez dépenser énormément d'argent pour améliorer votre voiture, les sommes atteintes pouvant être largement supérieures à ce que votre bagnole vous aura coûté à l'origine. L'équipe de développement a un souhait : que vous vous attachiez à votre voiture, et que cela ne soit pas qu'une question d'avoir la dernière supercar d'un constructeur allemand. Vous pourrez donc bosser sur votre bagnole et ainsi rouler plus tard sans rougir à côté d'une Huracan ou d'une 911.
Mais c'est surtout grâce à la customisation visuelle que vous vous attacherez le plus à votre voiture. Moi qui suis un dingue de personnalisation et de customisation, dans tous mes jeux et principalement dans les jeux de course, j'étais au paradis. Enfin, presque. Parce que si les possibilités sont nombreuses (par-choc avant/arrière, jupe, phares, jantes, coffres, ailes avant/arrière, ailerons...) et que le choix en terme de pièces détachées est plus que conséquent, on pourrait émettre quelques réserves sur l'outil d'application d'autocollants. Peu intuitif et globalement mal pensé, il sera cause de moult crises de nerfs, lorsque vous aurez déplacé par inadvertance un sticker ou deux sans le vouloir. Après plusieurs heures de jeu, je n'avais pas encore réussi à comprendre comment fonctionnaient certains éléments... Habitué à l'outil de la série Forza, j'ai également été étonné de voir qu'il n'est pas possible de "copier" le côté opposé d'une voiture, une fonction très utile lorsque l'on cherche à obtenir le même rendu d'une portière à l'autre. Nonobstant ce détail assez frustrant, surtout pour les maniaques de la symétrie, on ne peut qu'être ravi devant une telle prolifération de stickers, certains étant même tirés d'anciens épisodes de la série. De ce point de vue là, c'est un grand bravo : les amateurs de customisation devraient passer de nombreuses heures au garage, à bichonner leurs jouets.
Wouh, wouh, assassin de la police
La série des Need For Speed ne serait rien sans les interventions musclées quoique légitimes des forces de Police. Dans ce reboot, elles sont donc toujours présentes, mais peut-être plus en retrait qu'autrefois. Ce qui ne sera pas un mal, me direz-vous, surtout après l'épisode Rivals où il était impossible de passer la troisième sans se faire péter le museau par le premier condé venu. Une efficacité redoutable mais décourageante, qui avait valu bien des critiques à cet opus en particulier. Après seulement quelques heures de jeu, il apparaît clairement que Ghost Games a tenu compte de ces critiques : la marée chaussée est désormais plus... timorée et presque passive, finalement. Mais lorsqu'elle a décidé de vous coller au train, elle le fait avec une hargne que ne renierait pas un pitbull nourri au yaourt pendant un mois.
Les images présentes dans cet aperçu ont été fournies par l'éditeur
Fans des Need For Speed Underground, Most Wanted et autre Carbon, réjouissez vous, puisque les NFS « Fast & Furious » sont de retour : ambiance nocturne, tuning, et flicailles sont de retour pour offrir un nouveau cocktail... pas si détonnant qu'on le souhaiterait, en fait. Entendons-nous, ce reboot est très prometteur mais la conduite mollassonne des premières courses n'inspirait pas la plus grande des confiances pour les heures de jeu à venir. Le scénario, quant à lui, paraissait plus accessoire qu'on ne l'aurait imaginé, même si pour certains cela ne sera pas un mal. Et il y a cet outil de customisation visuelle, très complet mais énervant à l'utilisation. Bref tout n'est pas parfait, mais ce dernier aperçu de Need For Speed, avant sa sortie le 3 novembre prochain, reste particulièrement encourageant. Nul doute que les fans des Underground et co' y trouveront leur bonheur, et devraient passer de nombreuses heures à arpenter les rues de cette ville au charme indéniable. Réponse début novembre, donc.