Silent Hill 2 n'est pas un simple jeu vidéo, c'est LE jeu vidéo (avec Metal Gear Solid) qui a élevé ce média jeune en 2001 au rang d'Art. Je me souviens encore fébrilement du jour où j'ai exploré cette ville plongée dans le brouillard pour la première fois et ce sentiment pesant qui ne me quitte plus depuis. 23 ans plus tard, Konami veut faire naître la terreur dans le cœur d'une nouvelle génération de joueurs, et pour ce faire réinvente ce classique vidéoludique avec un remake. Cette modernisation de Silent Hill 2 orchestrée par Bloober Team (Blair Witch, The Medium) relève-t-elle ce défi considéré par beaucoup comme impossible ? Voici mes impressions après 3 heures de jeu.
Lors d'un événement estival organisé à Londres par Konami en amont de la gamescom 2024, la rédaction de JV a pu explorer le remake de Silent Hill 2 développé par la Bloober Team au cours d'une session de jeu d'une durée de 3 heures sur PlayStation 5.
Une refonte moderne et fidèle
Concevoir le remake de Silent Hill 2, telle est la mission supposée impossible confiée à la Bloober Team par Konami. Les studios auraient pu se contenter d'une simple refonte graphique, mais il n'en est rien. Attention ! Silent Hill 2 de 2024 n'a visuellement rien à voir avec Silent Hill 2 de 2001. Certes, il se dégage de cette bourgade nord-américaine envahie par le brouillard la même atmosphère lugubre, et ce sentiment de déjà-vu qui émane du titre (à condition d'avoir joué à Silent Hill 2) participe pleinement à faire naître un sentiment de malaise.
Pourtant... les choses ont bel et bien changé au cours des deux dernières décennies. Je fus agréablement surpris par les modifications apportées par les artistes qui se sont appliqués à ajouter du détail et à faire de Silent Hill une vraie zone urbaine sans trahir les plans d'origine. Le soin apporté à la moindre bâtisse, la moindre pièce témoigne d'un réelle envie de bien faire. Puis, les environnements et les graphismes ne sont pas les seuls aspects qui profitent de cette refonte. Bloober Team se devait de moderniser un gameplay qui accusait le poids des années.
Les développeurs ont totalement repensé le système de combat afin d'offrir aux joueurs des séquences sous haute-tension. James Sunderland n'est pas un guerrier par nature, et cela se ressent pleinement en 2024 face à des ennemis prompts à mettre un terme à son périple. Ce remake n'a visiblement pas peur du changement, même les plus drastiques. Silent Hill 2 se vit désormais « caméra à l'épaule » (et toujours à la troisième personne) ce qui participe à en faire un jeu vidéo de son temps. Les studios se sont même permis de repenser la majorité des énigmes qui ponctuent le périple de James Sunderland. Si certaines ne sont que très peu modifiées, d'autres sont totalement réinventées pour l'occasion et il en existe même des nouvelles.
De nouvelles zones à explorer ont également été créées et plusieurs séquences ajoutées en 2024, histoire de surprendre et défier les fins connaisseurs des versions passées. Avoir survécu à Silent Hill 2 sur PlayStation 2 ne garantit en rien de survivre au remake de Silent Hill 2. Et c'est une excellente chose. Pour finir le tour des nouveautés notables, je pourrais évoquer les combats de boss qui gagnent en intensité. Le premier face à Pyramid Head est enfin digne d'intérêt, au-delà de la rencontre entre deux légendes vidéoludiques. Bloober Team dépoussière, réinvente et altère, mais ce n'est pas là son plus grand fait d'armes.
Un retour à Silent Hill redouté
Osé toucher à Silent Hill 2, c'est prendre le risque de profaner un temple sacré du jeu vidéo. Bloober Team en est pleinement conscient et fait de son mieux pour ne pas froisser (outre mesure) les fans de la licence et surtout du second opus. En 2001, le survival-horror de Konami faisait des limitations techniques de la PS2 une force. Deux décennies plus tard, son remake exploite les technologies de pointe offertes par la PlayStation 5 et le PC pour transfigurer un chef-d’œuvre du 10e Art. Les artistes sont en quête de photo-réalisme, en attestent la modélisation des figures iconiques du jeu ainsi que leurs expressions faciales, mais ce n'est pas ce qui m'a le plus marqué. En effet, l'illustre brouillard, présence antagoniste mythique du jeu, est de retour plus menaçant et vivant que jamais.
Silent Hill 2 se distingue par sa propension à instiller un sentiment persistant de mal-être dans le cœur de ceux qui osent braver ces lieux maudits. Cela passe par des graphismes qui jouissent d'une technique solide et d'une direction artistique inspirée, et d'un sound design saisissant. L'ambiance sonore est tout aussi essentielle que celle visuelle, et Bloober Team l'a bien compris en mettant un point d'honneur à faire naître la peur par le son dans le coeur des joueurs. Silent Hill 2 n'est pas parfait pour autant. Les animations des personnages sont encore (trop) rigides et l'absence de dégâts localisés sur les ennemis laisse à désirer face à une concurrence qui en a fait sa marque de fabrique (les remakes Resident Evil 2 et 3 en tête).
Ces premières heures passées à Silent Hill ont rassuré le fan de la saga que je suis. Les équipes de Bloober Team mettent leurs talents au service d'une vision moderne et pourtant fidèle d'un jeu vidéo ô combien culte. Ce remake de Silent Hill 2 ne se contente pas de respecter la version originale, il la transcende sur plusieurs points, aussi bien visuellement que par le gameplay. Un vent de changement souffle sur cette petite ville américaine, et ce n'est pas pour me déplaire... bien au contraire. Il me tarde de découvrir la suite des mésaventures de James Sunderland tant mes premières impressions furent à ma grande surprise excellentes.