Respectivement publiés en 2015 et 2017 sur le sol japonais, les spin-offs The Great Ace Attorney: Adventures et The Great Ace Attorney 2: Resolve s’offrent pour la première fois une sortie en Amérique du Nord ainsi qu’en Europe. A quelques semaines la sortie, nous avons pu nous essayer aux premières affaires de la collection titrée Chronicles. Voici nos premières impressions.
Si Phoenix Wright est un nom bien implanté dans notre paysage vidéoludique, jamais encore nous n'avions eu l'occasion de rencontrer son ancêtre, Ryunosuke Naruhodo ; ce dernier est le protagoniste de The Great Ace Attorney: Adventures et de The Great Ace Attorney 2: Resolve, volets parus en 2015 puis 2017 au Japon qui s'exportent pour la première fois dans nos contrées. Ils nous embarquent à la fin du XIXe siècle, en plein cœur de la période Meiji sur le territoire nippon, et de l'ère victorienne en Angleterre. Car oui, notre jeune avocat entreprend un grand voyage afin de défendre de nouveaux clients dans la capitale londonienne, et d'enquêter sur une organisation criminelle internationale. Dans le cadre de cette preview, nous avons eu accès aux premiers cas de The Great Ace Attorney: Adventures, qui nous introduisent dans un contexte particulier, alors que l'Empire britannique vient de signer un traité d'amitié avec le Japon. Retour sur cet aperçu qui nous a laissés un avant-goût plutôt agréable.
Notez que The Great Ace Attorney Chronicles n'est malheureusement disponible qu'en anglais, et qu'aucune traduction française n'est prévue pour l'heure. Le niveau reste abordable pour un joueur ayant au minimum retenu ses cours de lycée, mais il est nécessaire de préciser la présence ponctuelle d'argot et de quelques mots devant lesquels vous serez susceptibles de buter. Les doublages, bien que peu présents, sont quant à eux disponibles en japonais ou en anglais.
Aussi charmant qu'extravagant
The Great Ace Attorney: Adventures et The Great Ace Attorney 2: Resolve proposent chacun cinq meurtres à élucider et une excellente durée de vie de 30 heures environ. Libre à vous de parcourir les cas semi-connectés dans l'ordre que vous souhaitez, mais nous ne pouvons que vous conseiller de suivre rigoureusement le fil narratif sous peine de vous gâcher certains éléments majeurs de l'intrigue principale. D'autant qu'il sera plus agréable de constater l'évolution de notre héros qui gagne en confiance au fil des chapitres. Notre avocat est Ryunosuke Naruhodo, un ancêtre un poil plus craintif et fébrile que notre cher Phoenix Wright, qui reste tout à fait sympathique. Celui-ci n'est après tout encore qu'étudiant quand il débute sa première affaire, laquelle le place dans une situation des plus cocasses : il est en effet le principal accusé du meurtre d'un professeur d'anglais et va devoir prouver à lui seul son innocence.
Sans trop en dire, Ryunosuke aura tout de même le loisir de compter sur les conseils de quelques assistants aux personnalités toujours bien dessinées. On retient d'ailleurs de ces quelques heures de jeu une incroyable palette de personnages qui semblent chacun vivre dans leur propre univers extravagant. Adepte des caricatures, The Great Ace Attorney vous présentera des témoins, jurés et suspects toujours excentriques, souvent dotés de délicieuses animations susceptibles de vous décrocher un petit rire ; le sergeant se tire la moustache à la moindre déconvenue, l'Européenne porte sur sa tête un cygne qui bat des ailes quand elle est outrée, Ryunosuke n'hésite pas à se coller deux bonnes baffes pour se donner du courage avant d'entamer un procès. Pour chipoter, on peut néanmoins noter quelques effets de flou et textures disgracieuses constatés sur certains visages ou éléments de décors. L'univers visuel reste charmant, et se voit sublimé par une bande-son qui saura accompagner les instants de tension de chaque affaire. Notons aussi le plaisir de savourer chaque petite cinématique animée et doublée en début de chapitre.
Un lent préambule
Si vous n'êtes pas familier au vaste univers des Ace Attorney, ce premier épisode - baptisé the Great Departure - sera une bonne entrée en matière pour les débutants et une piqûre de rappel pour les habitués : On vous présentera par exemple votre carnet de bord, fort utile pour consulter le profil de chaque individu impliqué ou pour analyser les pièces à conviction. C'est cet outil qui constituera l'âme de vos enquêtes et qui vous permettra de débusquer les contradictions avec certains témoignages, par exemple. Et puis, on vous expliquera le fonctionnement d'un contre-interrogatoire, cette technique consistant à examiner les témoignages suspects au peigne fin pour en déceler les failles. Moins passionnante et plus dirigiste que le reste de nos aventures, cette introduction constitue un tutoriel bien utile, mais bien trop long à notre goût. Voilà qui fait craindre quelques soucis de rythme pour le reste du récit. Alors même que le coupable de l'affaire est tout trouvé, le procès parvient à s'étirer encore durant plusieurs heures de passivité qui peuvent paraître un poil douloureuses. The Great Ace Attorney: Adventures saura heureusement se montrer plus passionnant par la suite, et se laisser parcourir avec bien plus de liberté d'action.
De manière générale, les plus réfractaires aux romans visuels risquent de grincer des dents : bien qu'intégrant des éléments d'enquête et d'analyse de plus en plus libres dans leur utilisation, votre parcours dans The Great Ace Attorney restera toujours très linéaire. L'abondance de dialogues parfois trop verbeux peut donner une sensation de lourdeur ; d'autant plus si vous avez déjà deviné l'issue d'une conversation qui mettra de longues minutes à se clôturer, ou que vous déclenchez par mégarde un monologue déjà connu qu'il sera impossible de passer entièrement. Le rythme du récit fera en revanche preuve d'ingéniosité dans ses rebondissements, actes manqués et autres moments de tension : situations lors desquelles les échanges se font plus courts, plus intenses, ponctués des classiques "Objection !" qu'on aime entendre, et de plans variés qui offrent une immersion impeccable. Sur console, les vibrations de votre manette viendront pigmenter les moments culminants.
Les affaires sérieuses commencent
Si nous n'avons pas encore pu découvrir l'étendue complète des cas, les dernières s'avèrent en tout cas plutôt agréables à parcourir. Côté enquête pure, nous avons pu confronter des preuves avec des témoignages, exposer les mensonges ou contradictions de témoins et jurés en leur faisant répéter leurs lignes de dialogue, ou leur demander de développer certains arguments. À plusieurs reprises, il arrive de devoir écouter les versions de plusieurs témoins présents en même temps à la barre. Le gameplay devient alors plus généreux. Lorsqu'un témoignage est en cours, l'œil très attentif de notre Ryunosuke peut percevoir des réactions suspicieuses d'autres personnages et les interroger. Considérons qu'il s'agit de sa capacité spéciale.
Autant dire que les affaires sérieuses débuteront réellement une fois les terres londoniennes foulées. Déceler le vrai du faux dans les témoignages d'une flopée de personnages semble plaisamment plus ardu qu'au début, tandis que nos chances de remporter la partie s'effritent en cas d'erreur ; le champ d'actions s'élargissant progressivement et le jeu vous prenant moins par la main. La difficulté se corse, mais reste toujours abordable. Aussi en cas d'échec, vous serez simplement ramenés au début de la scène. Notons aussi que notre troisième cas - le plus captivant pour l'heure - fait preuve d'une excellente créativité : les 6 jurés - totalement délurés - conviés votent en lançant littéralement un poids enflammé du côté gauche ou droit d'une immense balance de Thémis ; de quoi ajouter un peu de piquant au procès. Vous aurez l'occasion à plusieurs reprises de contredire leurs arguments pour les faire changer d'avis. Cette nouvelle mécanique à la série baptisée “Examens de synthèse" est d'une fraîcheur indéniable.
The Great Ace Attorney Chronicles est parvenu à afficher un univers de plus en plus séduisant au fil des heures. On aime d'abord ses personnages totalement extravagants et leurs animations qui les rendent si vivants. Et on apprécie les mécaniques d'enquête qui se dévoilent progressivement. D'abord très dirigiste, le jeu se montre plus généreux par la suite en termes de libertés et de possibilités. Les zones d'ombres résident dans le rythme assez irrégulier de notre récit et dans le développement de l'intrigue principale (qu'il conviendra de ne pas réveler ici). La durée de vie semble en tout cas tout à fait généreuse, un seul procès pouvant vous occuper plus de cinq heures. Reste à constater la qualité de chacun d'entre eux. La sortie du jeu est prévue le 27 juillet sur Steam, PS4 et Nintendo Switch.