Mais qu'est ce que c'est que ça ?

Ce premier né d'Amazon est à la croisée de nombreux genres. Il y a du Hero Shooter, du moba mais aussi un peu de Evolve dans son ADN. ça commence par le choix d'un personnage qui possède une arme principale et des pouvoirs spéciaux (dans la plus pure tradition du Hero Shooter), puis ça devient rapidement un peu plus exotique. Mais commençons par le commencement et choisissons un chasseur.

Sur l'écran de sélection du personnage, les joueurs d'Overwatch et Paladins : Champions du Royaume sont en terrain connu. Tous les archétypes sont là : balafre sur la joue et sourire de vieux baroudeur fièrement affiché, Mendoza est le soldat du groupe, il n'y a pas 76 façons de le jouer ce qui le rend parfait pour les débutants.Tosca combine téléportation et poison pour incarner à la perfection l'équivalent héroïque du moustique tandis qu'Ajonah est un sniper, avec ses mines et son grappin elle rappelle Fatale jusque dans la teinte bleutée de son épiderme. Notons que certains designs sont franchement réussis : Earl le trucker de l'espace et Bug le robot jardinier sont des concepts à la fois originaux et débordant de personnalité.

Une fois le chasseur sélectionné, celui-ci embarque dans une capsule de l'espace, joyeusement catapultée à travers la stratosphère jusqu'à l'arène où les combats ont lieu, on est accueilli par les bruissements de la jungle et soudain, ça ne rappelle plus du tout Overwatch . La carte est large et ouverte, séparée en cinq zones. Chacune arborant sa palette de couleurs propre, on passe en un instant des grandes pleines ensoleillées du centre à l'obscurité bleutée de la grotte puis à l'ambiance ocre du canyon de corail. La caméra nous suit à la troisième personne, un choix judicieux pour une map ouverte où les attaques arrivent de tous les angles.

Lorsque le combat éclate, un chasseur dispose de son arme et de 4 capacités. Aucune d'entre elles n'est ni follement impressionnante ni follement originale. Ce qu'elles sont en revanche, c'est personnalisables, il est possible avant chaque match de changer un peu son chasseur en faisant varier ses capacités. Mais après quelques heures de bidouillages force est de constater que les options sont limitées. Certains joueurs d'Ajonah auront une seconde d'invisibilité après avoir utilisé leur grappin alors que d'autres auront un bonus de dégâts dans la tête, mais au bout du compte le personnage se joue de la même façon. On a quand même pu trouver quelques variations intéressantes, capables de changer la façon dont un chasseur approche le combat, mais celles-ci restent rares. Il faudra à n'en pas douter de nombreuses heures pour maîtriser entièrement un chasseur mais le faible nombre de variations et l'absence d'équipement à acheter tel qu'on pourrait en trouver dans un moba risquent fort de limiter la profondeur du gameplay.

Revenons à la partie, vous n'entendrez pas que le bourdonnement des moustiques, mais aussi le pas lourd et régulier des créatures qui peuplent la carte. Car Crucible mixe son pvp avec du pve et c'est là qu'il s'inspire fortement du moba, pour monter de niveau les chasseurs doivent exterminer la faune locale, de la même façon qu'un joueur de league of legends doit consacrer du temps à farmer des sbires. Monter de niveau ne fait pas seulement grimper les statistiques de base, mais débloque également les variantes de pouvoir dont nous avons parlé au paragraphe précédent. Tu veux ton bonus de 50% sur les headshots ? Alors il faudra prendre ton fusil sous le bras et flinguer du dinosaure jusqu'à monter niveau 5. La mécanique est intéressante car elle rend la prise de décision plus complexe. Un joueur courant rejoindre son équipe n'aura pas envie de s'arrêter pour tuer un troupeau, mais si cette partie de chasse permet un gain de niveau et le déblocage de sa variante la plus puissante...il y réfléchira à deux fois.

Ce mélange entre PVE et PVP se retrouve dans tous les modes de jeu, passons-les justement en revue.

Au coeur de la ruche

Le premier mode est "Coeur de la ruche", la ruche est l'Alpha des bestioles qui rodent sur la carte. Elle est gigantesque, elle n'aime pas du tout être dérangée et il en apparaît une sur la carte toutes les trois minutes. La première équipe à en tuer 3 et à récolter leurs coeurs remporte la partie. Ce mode requiert de la coordination, car celui qui provoque la ruche alors que l'équipe adverse attend en embuscade condamne son escouade à être pris entre de feux, un état de fait rapidement suivi par la mort. Coeur de la ruche exige également une utilisation optimale de son temps : courir après les ruches sans prendre le temps de chasser le petit gibier (c'est des dinosaures de l'espace de 2 tonnes 5, "petit gibier" est une façon de parler) c'est finir par être tellement en retard en expérience que gagner le moindre combat devient impossible. C'est clairement le "pathing" (la capacité à se déplacer de façon optimale à travers la carte, en récoltant un maximum d'objectif en un minimum de temps) qui séparera les meilleurs joueurs du reste. D'autant plus que les développeurs se sont fait un plaisir de saupoudrer une myriade de bonus à travers la carte, qui vous feront faire des détours supplémentaires si vous les voulez.

Le chasseur Alpha

"Alpha Hunter" est le second mode de Crucible et se trouve être la version Battle Royale du jeu. La base est la classique (pas de réapparition, une zone se referme pour forcer les joueurs les uns vers les autres), mais le titre injecte une certaine originalité dans la formule. Premièrement les créatures peuplent toujours la carte, et il est toujours nécessaire de monter de niveau, mais exterminer une horde de dinosaurs en furie... ce n'est pas très discret, on se surprend constamment à regarder par-dessus son épaule pendant nos parties de chasse, de même on observe les troupeaux paître paisiblement au loin en espérant qu'une soudaine panique parmi les bestioles ne trahisse la présence d'un autre chasseur. La seconde nouveauté, et celle qui donne tout son piment à "Alpha Hunter", c'est les alliances. Le match se joue par équipe de deux, mais si votre équipier mord la poussière, il vous suffira de croiser la route d'un autre joueur qui a également perdu son partenaire pour pouvoir proposer une alliance. D'une simple pression de bouton, une nouvelle escouade est formée, vous et votre nouvel ami pouvez vous suivre sur la mini-map et ne pouvez plus vous infliger de dégât. Seulement cette nouvelle amitié est fragile, tel un stagiaire dans une grande entreprise vous êtes remplaçable à n'importe quel moment. Une nouvelle alliance peut être formée entre votre allié et un autre joueur solitaire et elle annulera automatiquement votre accord. Cette intelligente mécanique instaure une aura de paranoïa sur la partie, on passe les affrontements à se demander si le chasseur qui couvre nos arrières n'est pas sur le point de se faire la malle avec un autre, et de nous vider un chargeur dans le dos au passage.

Raconter des histoires même sans scénario

On s'en voudrait de ne pas parler des efforts effectués par les développeurs pour offrir une personnalité à leurs héros. Ce n'est pas parce qu'un jeu ne dispose pas d'une campagne en solo que ses personnages doivent être des robots vides de toute personnalité. Blizzard l'a compris et développe bandes dessinées et cinématiques autour des héros d'Overwatch, Apex Legends l'a parfaitement compris et les personnalités de ses personnages transparaissent à travers chacune de leurs actions, et on dirait bien qu'amazon a également reçu le message. Deux personnages qui réapparaissent au même endroit de la carte vont engager une petite conversation pendant qu'ils courent côte à côte pour rejoindre l'action. Pour être tout à fait franc on n'est pas encore au niveau d'un Apex Legends dans lequel les personnages dégoulinent littéralement de personnalité, ici les répliques sont un peu plus conservatrices, un peu moins exceptionnelles. De plus la large taille de la carte signifie que ces conversations improvisées n'arrivent pas si souvent que ça, car la taille de la carte encourage à se séparer pour couvrir plus de terrain et ramasser plus de bonus, les chasseurs ne se retrouvant généralement que pour les affrontements avec l'équipe adverse durant lesquels les tentatives de socialisation ont tendance à être noyées sous les tirs de blasters.

Petite attention supplémentaire que l'on tient à saluer : chaque chasseur possède son propre thème musical, qui joue pendant que la partie se prépare, et la plupart d'entre eux sont réussis.

Une économie Free to play

Combien vais-je devoir débourser pour jouer à Crucible ? C'est très simple, rien à l'achat. Et rien ensuite. Le titre se veut entièrement Free To play, les espèces sonnantes et trébuchantes ne vous vaudront que des cosmétiques. De ce que l'on a vu, un skin pour votre chasseur favori coûtera dans les 10 euros, un tarif aligné sur ce que l'on peut voir chez les concurrents.

Le passe de combat (incontournable depuis qu'Epic Games a démontré son plein potentiel) est évidemment de la partie, contrairement à celui d'Apex Legends qui s'est fait beaucoup attendre, on nous promet qu'il sera disponible deux semaines après la sortie du titre (actuellement prévue pour le 20 mai).

Dernière information et non des moindres pour un jeu qui se veut compétitif, le tickrate des serveurs est pour l'instant de 31,25, c'est loin des 64 que l'on a sur Counter-Strike : Global Offensive (et très loin des 128 annoncés pour Valorant ) mais c'est toujours plus que les 20 d'Apex Legends (qui font d'ailleurs beaucoup râler la communauté). Pas la peine de tourner autour du pot, un tickrate de 30 ne satisfera pas les joueurs évoluant à haut niveau et est tout bonnement inutilisable en compétition, mais nous n'en sommes pas là et pour l'instant, c'est sur les sensations qu'il procure et sur sa capacité à retenir les joueurs que Crucible doit faire ses preuves, bien plus que sur la solidité de son netcode.