Étonnant projet que ce Bleeding Edge, qui nous vient d’un studio pourtant peu coutumier de la fureur des affrontements multijoueurs. Car qu’on se le dise, le premier jeu Ninja Theory estampillé Xbox Game Studios est un jeu de combat en arène coopératifs et compétitifs. Et si l’on ne savait pas trop quoi penser de Bleeding Edge jusque là, quelques parties ont suffi à nous intriguer : le titre a du potentiel.
Nous avons pu découvrir Bleeding Edge sur le showcase de l'E3 2019 de Xbox. Nous avons joué sur plusieurs sessions d'environ 20 minutes, pour un cumul d'environ 1h de jeu. La démo tournait sur un devkit Xbox One X.
À l’aube des années 2010, le petit studio Ninja Theory traverse une période peu évidente de sa vie. À plusieurs reprises, le studio a prouvé sa valeur mais peine à survivre, dans un contexte de plus en plus compliqué pour une structure aussi modeste que la sienne. Avec l’arrivée des consoles de 8ème génération et l’augmentation des coûts de production, les cadres de Ninja Theory ont décidé de se réorganiser en plusieurs équipes, pour plus de souplesses. Et tandis que certains travaillaient sur DmC Devil May Cry, d’autres œuvraient sur des projets plus modestes, mais autrement plus rentables. C’est ainsi que le studio a donné un coups de main à Disney sur son Disney Infinity, ou démarrer plusieurs petits développements ; ces projets annexes devaient, à termes, permettre la production de petits titres moins ambitieux que les créations habituelles du studio, mais plus en accord avec l’air du temps et ce qui marche auprès du grand public. Parmi ces embryons de jeux vidéo, un curieux jeu de combat en arène, empruntant tant au monde du MOBA qu’à DmC Devil May Cry, qui venait tout juste de sortir. Les designers qui travaillaient sur ce prototype ont fini par se passionner pour ce qui à la base n’avait pas plus de prétention que de permettre au studio de faire rentrer un peu d’argent. Ainsi, le prototype a pris de l’ampleur jusqu’à devenir un véritable jeu vidéo, celui dont il est question aujourd’hui : Bleeding Edge. Une jolie petite histoire qui pourrait peut-être trouvé une issue favorable.
Comme Overwatch, mais pas pareil
Bleeding Edge est donc un jeu de combat en arène, coopératif et compétitif. Deux équipes de quatre joueurs s’affrontent dans des parties à objectifs, en misant sur l’application de stratégies d’équipe et la bonne utilisation des pouvoirs de chacun des combattants. Le jeu évoque assez rapidement Overwatch, ne serait-ce que parce que certains personnages rappellent le shooter de Blizzard, ou que l’on retrouve la possibilité d’utiliser trois pouvoirs différent. Comme dans Overwatch, ou n’importe quel MOBA en fait, on retrouve les classes habituelles (DPS, tank, healer) et donc la nécessité de mettre sur pieds une équipe équilibrée.
Passé le petit jeu des comparaisons, Bleeding Edge fait vite valoir son identité. Il y a d’abord le casting : s’il est évident qu’Overwatch a été une source d’inspiration, chaque personnage bénéficie d’une esthétique soignée qui le rend unique et très appréciable. On trouve un peu de tout, et surtout du n’importe quoi, entre le ninja-samurai-rappeur, le black metalleux armée d’une hache-guitare, la petite mamie montée sur un mini-dirigeable, ou la femme géante, montée sur une énorme roue de moto. L’ensemble jouit d’un cachet inimitable, rappelant qu’il s’agit d’une production Ninja Theory : si les titres du studio sont souvent assez perfectibles, ils ont toujours eu ce petit quelque chose de plus qui les rendent inoubliables. Et on le retrouve dans Bleeding Edge.
En fait, on pourrait presque dire que Bleeding Edge est un genre d’Overwatch, à la troisième personne. « Presque » parce que le titre de Ninja Theory n’a pas la même finesse que le bébé de Blizzard, mais aussi et surtout parce qu’il n’est pas un jeu de tir : c’est d’abord un jeu de mêlée. Et ça, il le fait plutôt bien.
Lame party
Nos premières parties de Bleeding Edge furent plutôt confuses : les joueurs ne savaient pas vraiment quoi faire et tout le monde se contentait vaguement de taper sur les joueurs ennemis. En résultait un genre de joyeux bazar qui, passé le plaisir de découvrir les caractéristiques de son personnage, se transformait lentement en un pugilat aussi grotesque que vide de sens. Et puis… et puis les joueurs ont commencé à comprendre le fonctionnement du mode de jeu présenté (de la conquête de territoire) et surtout l’importance d’établir une stratégie d’équipe. À l’inverse d’Overwatch, Bleeding Edge repose la majeure partie de son gameplay sur le corps-à-corps ; on est donc amené à donner mais aussi à recevoir beaucoup, beaucoup de coups en seulement quelques secondes. Cela renforce le rôle des healers qui doivent faire leur boulot à la perfection pour que leurs petits copains ne les quittent pas trop vite. Avec son format en quatre contre quatre, la mort (temporaire) d’un joueur peut créer un véritable déséquilibre sur le terrain, le genre à créer un gros retournement de situation et pourquoi pas emporter la victoire sur le fil.
Bleeding Edge trouve son équilibre, entre la fureur des combats de mêlée, et la réflexion tactique. Ce grâce à des commandes finalement toute simple : chaque personne dispose d’une petit combo de corps-à-corps (il suffit de marteler la touche X), ainsi que de trois coups spéciaux. Il est important de connaître et maîtriser ces coups spéciaux puisqu’ils peuvent permettre de créer des combos avec ses équipiers, ou même plus simplement de faciliter l’activation d’un « Super ». On finit par apprendre les particularités de chaque personnage jouable et on peut, à partir de là, varier ses approches et improviser, en fonction de la situation. Dans l’absolu, cela n’a absolument rien d’original : plein de jeux l’ont déjà proposé par le passé. Mais pas nécessairement sous cette forme-là.
D’autant qu’il faut saluer la capacité de Ninja Theory à rendre fun le fait de frapper sur quelque chose. Cela passe tant par les animations extrêmement soignés des personnages, que par les effets visuels et sonores ; on reconnaît ici le travail des créateurs de DmC Devil May Cry. Si ce « reboot » de la série n’avait pas plu à certains dans, Ninja Theory avait réussi à créer un grand beat’em all, rempli de bonnes petites idées, et surtout d’un feeling de frappe très satisfaisant. C’est un peu pareil ici.
Quelque imperfections
Pour autant et malgré toute sa bonne volonté, Bleeding Edge paraît un cran en dessous des dernières productions du studio. Les déplacements sont un peu mous, la seule arène disponible durant l’essai manquait cruellement de folie et la nature même des affrontements rend les parties un peu confuses par moments. De quoi nuire au plaisir de jeu. Malgré sa direction artistique complètement délurée, Bleeding Edge donne parfois l’impression d’être trop sage. Mais peut-être n’en a-t-on pas assez vu.
Retrouvez toutes les infos de l'E3 2019
Malgré ses défauts, on a envie d’aimer Bleeding Edge. Son visuel chatoyant, ses personnages charismatiques et ses contrôles très plaisants lui offrent un avantage conséquent. Mais réussira-t-il à être plus qu’un pseudo-Overwatch à la troisième personne ? Peut-être pas, mais le titre de Ninja Theory a suffisamment de personnalité pour jouer les trublions. Aux yeux de certains joueurs, il pourrait incarner une alternative envisageable aux cadors du genre et se faire une jolie réputation. On sera rapidement fixé puisque le titre débarquera sur Xbox One et PC le 27 juin prochain, et une disponibilité day-one dans le Xbox Game Pass.