Dès l’épisode Yoshi’s Story, sorti sur Nintendo 64, on retrouvait l’idée de décors en mode « fait main » cartonnés, ce qui se prêtait déjà fort bien à l’univers du dinosaure. Yoshi’s Crafted World pousse l’idée bien plus loin. Ici, chaque niveau semble avoir été construit par des gamins dans leur chambre avec ce qu’ils avaient sous la main. Des buissons aux arbres en passant par des animaux, des maisons ou encore des trains, c’est un véritable esprit Do It Yourself qui anime l’aventure. Mais plus que le simple décor, c’est la façon dont on peut interagir avec cet environnement qui fait de Crafted World une aventure singulière.

On garde le principe de base de la série. Yoshi peut récupérer des œufs qu’il utilise comme projectiles afin d'attaquer les ennemis ou de toucher des cibles à distances. Pas de temps limité pour vous presser dans vos pérégrinations, vous pouvez vous balader à l’envie, ce qui s’avère parfait pour contempler le paysage. En cela, soyons clairs : N’espérez pas trouver du challenge de gameplay immédiat dans Yoshi’s Crafted World. Comme toujours avec la série, les ennemis flânent plus qu’ils n’agressent et les phases de plates-formes semblent être des plus indulgentes. L’avantage, c’est qu’il est parfaitement adapté à tous les publics, y compris ceux qui veulent juste profiter de l’univers sans pour autant être de férus gamers. Finir le jeu sans frustration tout en ayant profité d’une belle petite aventure, c’est aussi ça le jeu vidéo après tout. Toutefois, de ce qu’on a pu en voir, les gamers expérimentés auron quelques friandises à se mettre sous la dent, du moment qu'ils aiment l’exploration.

Outre la formule classique « je vais jusqu’au bout du niveau », Yoshi’s Crafted World développe son concept avec de multiples items à trouver pour finir l’aventure à 100 %. Dans chaque niveau, vous devez trouver plusieurs fleurs, 20 pièces rouges plus ou moins cachées, finir avec toute votre vie et ramasser un certain nombre de pièces classiques. Quatre objectifs supplémentaires qui ne sont pas nécessaires pour terminer l’aventure classique, mais qui, on n’en doute pas une seule seconde, débloqueront des stages spéciaux si vous les réussissez dans tous les niveaux de chaque monde. C’est dans cette quête de collectionneur, généralement, qu’il faut porter une attention particulière aux détails, une tâche qui peut grandement être aidée par une connaissance quasi encyclopédique des mécanismes de game design. Ceux qui jouent aux jeux Nintendo depuis plus de 20 ans savent forcément de quoi nous parlons, entre les pièces qui indiquent en fait un chemin, les zones qui semblent ne servir à rien et donc servent forcément à quelque chose, etc.

Là où Crafted World se veut plus original, c’est évidemment dans l’utilisation des décors : le premier plan et le background font autant partie de l’aventure que la ligne de gameplay 2D de Yoshi. Vous voyez un buisson bouger dans le fond ? Tirez dessus et peut-être qu’une pièce rouge s’y cache. Deux pétales derrière un arbre n’ont pas échappé à votre œil d’épervier ? Tant mieux, vous venez de trouver une fleur. C’est cette constante recherche du trésor tapi dans l’ombre qui guide vos pas. Mais si dans Yoshi's Woolly World, ces phases d’exploration n’étaient pas des plus amusantes, elles semblent prendre une tournure plus excitante dans Crafted World grâce à cette direction artistique qui influe plus singulièrement, et plus souvent, avec le gameplay. Les changements de plans montrent l’envers du décor et les raccords à bout de scotch, ainsi que le côté dépliable de certaines structures, poussent plus le joueur à la découverte que dans le laineux prédécesseur. Petit bémol toutefois, certains secrets invisibles se découvrent plus au hasard que grâce à un œil aguerri, ce qui peut s’avérer frustrant par moments. Les férus de 100 % risquent de se retrouver à sauter dans tous les coins au cas où un nuage invisible aurait été placé à un endroit incongru, ce qui ne s’avère pas des plus pertinents en matière de fun.

Yoshi’s Crafted World semble déjà être une expérience enrichissante en solo, mais on est davantage intéressé par l’idée de vivre cette aventure à deux, avec sa moitié, un ami ou même (voire surtout), un enfant. Rares sont les jeux à aussi bien se prêter à la coopération entre deux personnes drastiquement opposées en termes de typologie de gamer. En étant ni pressé par le temps, ni (vraiment) stressé par la mort, cela enlève tous les éléments de frustration qui peuvent exister quand un joueur expérimenté essaie d’effectuer un passage plus complexe aux côtés d’un débutant. Ici, vous pouvez tranquillement laisser un enfant trouver lui-même la solution à un problème, voir vous amuser à lui donner des indices quand vous avez déjà compris comment fonctionne un mécanisme. Cette accessibilité exemplaire est clairement la force du nouveau jeu de Good-Feel. Une fois le titre terminé et le concept bien compris, il sera alors temps de se tourner vers les challenges supplémentaires, comme la recherche de mini-poochies en temps limité dans des niveaux faits à l’envers (ce qui permet de mieux voir l’aspect « crafting » des décors faits à base de boîtes de lait et autres objets du quotidien), ou encore de trouver des éléments cachés indiqués en amont par un PNJ.