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Voici le printemps terminé : difficile de choisir parmi la centaine de titres sortis ces dernières semaines. Le bilan présenté ici est plutôt orienté science fiction/fantastique, mais aussi marqué par le retour de Codemasters sur Linux, avec Micro Machines World Series ! Agrémentée de nouvelles de la communauté, voici la sélection arbitraire du moment sur Linux !
Rise and Shine
Rise & Shine est le premier jeu PC du jeune studio espagnol Super Awesome Hyper Dimensional Mega Team (ouf) qui officiait plutôt sur mobile jusqu'ici. Avec ses graphismes dessinés à la main et son ambiance de guerre cartoonesque, Rise & Shine fait invariablement penser à la série Metal Slug, bien que la comparaison n'aille pas plus loin.
Propulsé dès le début du jeu en zone de guerre, l'enfant Rise prend en main Shine, une arme bavarde aux facettes multiples, qui lui confère le rôle de sauveur de sa planète envahie par les belliqueux grunts, venus de la planète voisine. L'arme permet de controler les projectiles, qui peuvent être de nature différente (ballistique pur, électricité, etc.), et peuvent donc interagir de façon variée avec les décors créant des puzzles plus ou moins subtils. Le jeu est pour beaucoup composé de puzzles plutôt réussis, et ponctué de phases d'arcade. Il ne s'agit donc pas d'un pur shoot à la Metal Slug : le jeu n'est pas donc très nerveux, et certains pourront même juger les contrôles du personnage un peu patauds.
La difficulté est élevée et assez peu progressive : dès le 2è boss de fin de niveau, attendez vous à une série conséquente de morts, jusqu'à mémorisation de la bonne (et longue) séquence à reproduire avec une synchronisation quasi métronomique. Sous ses airs sages, Rise and Shine reste donc un jeu exigeant.
Point fort du jeu, la direction artistique est quant à elle irréprochable. Les graphismes sont particulièrement beaux et bourrés de détails : les décors (y compris les plans de parallaxe) sont entièrement dessinés à la main, sans aucun motif se répétant, chaque plan est donc unique ! On prend un vrai plaisir à découvrir les paysages en progressant dans l'histoire. La version Linux repose sur le moteur Unity : elle tourne sans problème sur des machines modestes et les pilotes libres. On ne trouve malheureusement pas de version sans DRM. Enfin, et c'est un défaut de nombreux jeux indés : Rise & Shine est relativement court, comptez à peine trois heures pour en venir à bout, ce qui rend le tarif de base sans doute un peu élevé.
Le premier essai pour ce jeune studio est donc en partie validé, et on espère les voir revenir dans des projets plus étoffés !
Micro Machines World Series
Bonne nouvelle pour les amateurs de courses déjantées ! Après F1 2015 et Dirt Rally, Codemasters fait son retour sur Linux avec la série Micro Machines. Micro Machines World Series est finalement sorti avec une petite semaine de retard, mais avec un support Linux dès la sortie. Le jeu offre tous les éléments classiques de la franchise et quelques nouveautés. Les courses se déroulent sur (seulement) une dizaine de pistes aux décors miniatures (cuisine, billard, jardin…) à l'aide de véhicules améliorables hyper nerveux. Les pistes sont ponctués d'éléments augmentant l'interactivité : catapultes, ventilateurs, téléporteurs.
Un mode arène est également disponible, incluant jusqu'à 12 joueurs. Le jeu est jouable en ligne avec un système de classement, divisions, saisons et des défis réguliers. Malheureusement, le mode course classique n'est pas accessible en multijoueur local. Le jeu souffre donc, au moins pour l'instant, de quelques défaut notamment liés à un manque de contenu (pistes, véhicules, armes, mode chrono etc.) mais il est difficle de bouder notre plaisir car le genre est encore peu représenté sur Linux. On espère donc maintenant un suivi assidu de la part des développeurs !
Curieusement, alors que le développement repose sur le moteur Unity, le portage de la version Linux est assuré par Virtual Programming, déjà responsable du portage de The Witcher 2 ou Bioshock Infinite, qui utilise eON le wrapper DirectX vers OpenGL maison. Loin des déboires des premières versions de The Witcher 2, Virtual Programming nous fournit un port d'excellente qualité et l'utilisation d'un wrapper ne se fait pas sentir. Enfin, si les cartes Intel ne sont pas officiellement supportées, le jeu est jouable avec les pilotes libres sur cartes AMD.
À la poursuite de l'oncle perdu : A Story About My Uncle
Un oncle baroudeur et inventif qui disparaît sans laisser un mot, un neveu anonyme mais curieux qui tombe sur les notes étranges de son oncle et sur une combinaison technologiquement avancée. Le tableau est planté et en quelques minutes de jeu et le joueur est rapidement propulsé dans une réalité alternative (rochers flottants à la Magritte, sigles étranges jalonnant le parcours...), et va tenter de découvrir pourquoi l'oncle Fred a disparu (et a laissé trainer ses emballages de chips dans la 4è dimension).
Trois ans après la sortie Windows, les développeurs de Gone North Games ont tenu parole : le jeu est enfin disponible sur Linux et Mac OS. Il va falloir explorer cet univers 3D en mode première personne (le joueur ne verra que les mains du protagoniste) en utilisant les capacités de l'armure, qui va s'améliorer au fil du jeu. Elle vous permettra de résister aux chutes, bondir sur des distances énormes ou encore s'accrocher avec le grappin. De façon très pratique, les sauts sont également contrôlables une fois le personnage lancé dans les airs.
A Story About my Uncle présente une curieuse ressemblance avec l'étonnant Valley : un plateformer 3D non violent, aux graphismes très stylés et rythmé par des musiques accrocheuses dont la jouabilité impeccable donne une sensation de grande liberté. On prend un vrai plaisir à contrôler le personnage pour s'élancer dans le vide, louvoyer dans les airs, ou s'accrocher aux éléments du décor, sur la piste de l'oncle disparu. À la différence de Valley, le joueur rencontrera sur son parcours des êtres vivants plutôt curieux, à mi-chemin entre Fraggle Rock et Avatar (qui auraient sans doute gagné à être un peu plus "épicés"), qui l'aideront dans son périple.
Même s'il est parfois ponctué de pics de difficulté détonnant avec l'ensemble, le jeu reste accessible et très progressif. Le portage Linux est très bon, fluide sur machines modestes et exempt de DRM. Enfin, l'histoire est malheureusement un peu courte et pourra être complétée en moins de 4-5 heures.
Hollow knight : un metroidvania pas creux
Voici encore un indé aux graphismes entièrement dessinés à la main, sorti sur Linux et Mac OS mi-avril, en même temps que la traduction française. Du genre "metroidvania", Hollow Knight propose une exploration des souterrains de Dirt Mouth, monde sombre peuplé de créatures à la mine mélancolique. Le chevalier part à l'aventure armé d'un simple clou, qui lui permet de combattre les ennemis, détruire les matériaux les plus fragiles ou encore couper une liane pour décrocher une plate-forme. L'exploration du monde est assez libre, avec les habituelles zones déblocables lorsque le personnage a acquis les charmes ou les outils nécessaires.
La jouabilité et la conception en général sont exemplaires. Le titre évite les écueils de bien des jeux de plate-forme, et le contrôle du joueur est précis et très réactif. Le stick droit permet de contrôler la zone de vision et d'éviter les sauts de l'ange à l'aveuglette, qui dans certains jeux poussent à l'agaçante litanie du die and retry. De nouveaux mécanismes apparaissent lors des changements de niveaux, évitant de rendre le jeu trop répétitif. L'ensemble est servi par une difficulté très progressive.
À l'instar de Rise & Shine, les graphismes sont vraiment réussis aussi bien en avant qu'en arrière-plan, évitant la technique "ligne claire et à plat" qui donne un aspect plastique à pas mal de jeux du genre. Malgré le côté rétro, on échappe avec soulagement au sempiternel pixel art. La musique est elle aussi excellente, s'adaptant parfaitement à l'ambiance un peu mélancolique du jeu. Le portage Linux est très bon, et le jeu disponible sans DRM tournera aussi sur pilote libre et cartes intel. Les développeurs proposent une durée de vie honnête : comptez 25 heures minimum pour venir à bout de l'histoire. Vous l'aurez compris, Hollow Knight frise le sans-faute ! Enfin, cerise sur le gâteau : des contenus gratuits doivent débarquer dès ce mois de juillet.
En vrac sur la banquise
StarCrawlers sort de l'accès anticipé
Pour ceux qui seraient allergiques aux accès anticipés et fans de dungeon crawler, StarCrawlers est sorti d'accès anticipé fin mai. Les plus anciens se souviennent peut-être de Captive sur Amiga et Atari ST, un dungeon crawler à l'ambiance SF et présentant déjà des éléments générés procéduralement. Star Crawlers reprend un peu l'idée de fond et en modernise évidemment les ingrédients : exploration en case par case, personnalisation via la distribution des points de compétences, ambiance SF. Les armes sont également créées par génération procédurale.
Le joueur prend toutefois de la hauteur, en troquant le donjon obscur et humide pour l'épave de vaisseaux abandonnée. Pour une fois, il ne sera pas question de faire évader une bande de nains, magiciens et autres voleurs revanchards, mais de diriger une équipe de malandrins parmi les plus infâmes de toute la galaxie. Legend of Grimrock 2 n'étant pas sorti sur Linux, Star Crawlers devrait donc être un remplaçant à l'ambiance SF tout à fait honorable.
ARK : Survival Evolved en version finale (mais buguée ?) le 8 août
ARK : Survival Evolved est un des jeux les plus joués sur Steam depuis sa sortie en accès anticipé en juin 2015. Deux ans de tests qui font dire aux mauvaises langues que l'accès anticipé sert simplement à justifier l'absence de contrôle qualité. Les phases d'accès anticipé sont en effet délicates à gérer pour les développeurs, les régressions induites par les patches pouvant sérieusement frustrer les joueurs les plus assidus. Il n'est d'ailleurs pas rare de voir des joueurs cumulant des milliers d'heures sur le jeu, mettre une note négative dans les commentaires Steam ! Ainsi, Ark est actuellement noté avec le médiocre "variable" sur Steam.
Le jeu possède pourtant un contenu gigantesque, un bestiaire très varié et des mécanismes d'artisanat (crafting) très élaborés et inédits, comme l'apprivoisement des dinosaures ; sans aucun doute un des jeux de survie les plus complets jamais créés. Les bugs, problèmes de performances et changement d'interface ont cependant lassé pas mal de joueurs, et la version Linux semble encore moins suivie. Si les contenus débarquent toujours sur ce système grâce au moteur utilisé (Unreal Engine 4), les patches corrigeants les bugs sont moins nombreux. La version Linux souffre par exemple d'un bug graphique (textures noires ou arc-en-ciel) vraiment pénalisant, empêchant la visite des grottes et présent… depuis la sortie du jeu ! Les joueurs Linux attendent donc avec impatience cette version finale, en espérant que les développeurs s'intéresse à tous les systèmes pour la sortie de la version qu'on espère stable!
Planet Nomads : rendez-vous en planète inconnue
À l'inverse, après 2 ans de développement et 7 mois de phase alpha, Planet Nomads est désormais disponible en accès anticipé. Le jeu propose de survivre sur une planète après le naufrage de votre vaisseau. Il s'agira donc de gérer les paramètres habituels de faim, température, endurance, radiation, etc. ainsi que de fabriquer les objets dont vous avez besoin pour progresser : bâtiment, armes, véhicules…
Les décors sont beaux et font invariablement penser à No Man's Sky, les planètes utilisant d'ailleurs une génération procédurale des terrains. Les développeurs sont très actifs et le jeu a déjà reçu (plusieurs patches) corrigeant des bugs et ajoutant du contenu. Il s'agit toutefois d'un accès anticipé, et le contenu doit encore beaucoup s'étoffer d'après la feuille de route.
Vulkanisation sur… Android !
Il semble que l'année 2017 soit une année de transition pour l'API Vulkan. Après Mad Max, Feral Interactive continue de porter ses jeux sur l'API Vulkan et participe même à l'amélioration des pilotes Linux. Plusieurs patches ajoutés par Feral permettront de jouer à Dawn of War III sur GPU Intel, et donc avec les pilotes libres. Si les développements en natif ne sont pas encore à l'ordre du jour, les portages de jeux existants se multiplient. De façon un peu surprenante, Feral interactive a également porté sur Vulkan la version Android de GRID : Autosport. L'API permet des gains de performances, mais également de limiter la consommation, qui reste un enjeu sur mobile.
Android n'est certes pas un vrai Linux, mais cette nouvelle reste intéressante car l'API Vulkan sur mobile est la même que celle sur PC, à l'inverse d'OpenGL ES qui diffère d'OpenGL. Tout portage mobile peut donc simplement débarquer sur Linux ! L'étape suivante devrait être l'exportation des jeux développés à l'aide des moteurs. Rappelons enfin que certains moteurs possèdent déjà l'exportation Vulkan (Serious Engine 4, Source 2), d'autres sont en phase beta (Unity, Unreal Engine 4) ou en phase d'implémentation (Cry Engine).
Croteam, encore et toujours !
Pour terminer, on reparle encore de Croteam ! Peu de compagnie assurent un suivi aussi marqué de leurs jeux : Après Serious Sam TFE et TSE, Serious Sam III a été adapté sur le moteur fusion. Les développeurs en ont profité pour modifier les cartes et les ennemis et ajouter un mode benchmark qui permet d'évaluer les gains liés à l'API Vulkan. Cette fonction met en évidence un gain moyen de performance de 15 à 20% par rapport à OpenGL. Les gains dépendent toutefois de la machine et des scènes, Vulkan étant particulièrement efficace sur les systèmes limités par le CPU. Ceci montre une fois encore l'intérêt de l'API pour le futur du jeu sur Linux !