Nous avons pu voir tourner le nouveau Call of Duty : WW2 il y a quelques jours lors d'un événement dédié à la presse internationale. Le reveal étant désormais derrière nous, nous avons pu diffuser notre preview du titre (lire la preview de Call of Duty : WWII) et visionner le trailer de la prochaine production de Sledgehammer. Durant ce fameux événement londonnien, nous nous sommes entretenu avec Micheal Condrey et Glen Schofield, les deux têtes pensantes du studio. Une table ronde d'une demi heure, mais également un entretien exclusif d'une vingtaine de minutes nous fut accordé et voici ce que nous avons retenu et classé pour plus de lisibilité.
Trailer de Call of Duty : WWII
Aviez-vous anticipé la volonté des joueurs de voir ce fameux « retour aux sources » ?
Schofield : Il y a trois ans, l’envie était d’aller vers le futur et trois années plus tard, c’est un retour vers le passé qui prédomine. Ca fait plus de 10 ans que l’on n'a pas vu cette période dans un jeu. Vous savez, « Il faut Sauver le Soldat Ryan » a maintenant 19 ans… Il y a une génération entière de joueurs qui n’a pas connu les jeux sur la Seconde Guerre Mondiale, surtout sur cette génération de console, avec cette puissance et ces outils. [...] Sur cette histoire que nous souhaitons raconter, on a doublé les effectifs du studio, on a engagé un directeur de la narration. Ce qu’on a appris sur les autres jeux, on l'a ici multiplié par deux pour rendre le tout plus spectaculaire et plus « spécial ».
Condrey : 3 ans de développement, c’est beaucoup. Quand on a commencé, on faisait des jeux en moins d’un an. Avec trois années d’avance, c’est difficile de prédire à quoi ressemblera la pop culture et ce qui intéressera les fans. Il y a trois ans, quand on a décidé de faire WW2, c’était avant tout par passion, et c’est amusant de voir que c’est entre-temps revenu « à la mode ». On a hate de voir Dunkirk, le film, cet été. On ne savait absolument pas que ça allait sortir en développant le jeu.
Quand les gens disent que vous avez fait WW2 parce que DICE a sorti Battlefield 1 ? Ca vous ennuie ou ça vous fait rire ?
Schofield : Les deux (rires).
Condrey : Pour moi, les grands jeux et les grands films sont bons pour les joueurs. C’est très curieux qu’il y ait par exemple Dunkirk qui s’attaque à un pan de la guerre qu’on explore aussi. D’ailleurs, le film sortira cet été et, à peu près au même moment, nous proposerons aux joueurs d’essayer notre multijoueur à l'E3. C’est une coïncidence totale et nous n’en avions aucune idée il y a deux ans et demi. Mais pour revenir à la question, ca ne nous dérange absolument pas.
Schofield : Tous les jeux qu’on a fait ont à chaque fois été comparés à d’autres œuvres. Au fil des années on s’y fait et lorsque le jeu sort enfin, il se débrouille tout seul, les comparaisons cessent. La même chose est arrivée avec Advanced Warfare, et même Dead Space.
Condrey : C’est un bon exemple, Advanced Warfare, c’était également trois années de développement et dans le même timing sont sortis Elysium, Edge of Tomorrow, et Oblivion. C’était l’ère de l’exosquelette, avec notamment Titanfall. On avait misé sur quelque chose sur lequel misaient d’autres firmes. C’est vraiment intéressant de voir comment ça s’est produit. Totale coïncidence.
Vous pensez que c’est impossible un jour d’avoir un Triple A dans lequel on joue un Allemand ?
Schofield : On a essayé de trouver un maximum de données et d’infos sur l’aspect militaire. Une des choses principales qui ressortait de ces recherches et entretiens avec des vétérans ou des gens touchés par la guerre était qu’ils ne se considéraient pas comme nazi. Leur famille était fière d’être allemande, eux aussi, les vétérans étaient fiers d’être militaires, mais pas nécessairement d’être nazi. On a donc fait cette distinction. Vous savez, je suis à moitié allemand et les allemands sont humains. Il y a des passages dans le jeu dans lequel un soldat allemand vous aide par exemple, où dans lequel vous devez aider des civils allemands alors que votre escouade est mal en point. On essaye de glisser ce genre de réflexions dans le jeu et on fait de même avec la résistance. On s’assure que le sacrifice qu’ils ont fait soit reconnu comme un acte héroique.
Ca a été en discussion au studio ? Mettre l’accent sur le côté allemand ? Finalement, c’est un shooter qui se concentre sur les alliés, comme la plupart des shooters sur la Seconde Guerre Mondiale…
Schofield : On parle de tout quand on développe, on explore chaque scénario, et ça a toujours été un sujet très « touchy ». Je tourne autour du pot parce qu’on fait… on a une partie du jeu dans laquelle… (Glen regarde le responsable de la communication, échange brièvement avec et nous passons à une autre question, sentant que le sujet ne doit pas encore être abordé).
Pouvez-vous nous en dire plus sur le nouveau système de QTE, qui ressemble à celui d’un Telltale avec une visée suivie d’une pression de touche.
Schofield : Il demande plus de technique que les anciens QTE. Je pense que CoD a toujours été bon pour ça. Regardez le "Breach Moment" par exemple, c’est un bon exemple de QTE amené de manière intelligente dans l’action. On tente à chaque fois d’introduire un peu de gameplay, car la plupart du temps les QTE sont de la cinématique in-game.
Et que se passe t il si on rate le QTE ? On meurt ou on recommence juste avant ? Y a-t-il une « seconde chance » comme dans un jeu Quantic Dream par exemple ?
Ca dépend du QTE. Par exemple, vous avez bien vu la cloche (en référence à la cloche qui s’écroule dans le trailer). Il n’y a pas grand-chose à faire si vous ratez le QTE qui vous dit d’esquiver une cloche de 10 tonnes vous tombant dessus, n’est ce pas ? Vous ne pouvez pas lui tirer dessus (rire). Ca dépend donc vraiment de l’événement. On ne se repose pas sur les QTE, c’est un plus qui nous permet de garder de l’interactivité et peut-être d'amener un peu plus d’histoire.
Quels étaient les principaux challenges rencontrés durant le développement du jeu ?
Condrey : Pour moi, plus on avançait dans nos recherches, plus on écoutait les histoires de vétérans et récits héroïques de sacrifices pour la nation et plus notre focus était mis sur le respect du contenu et du socle narratif qu’on avait. Quand on a l’opportunité de raconter ces histoires, on sent vraiment un poids, très lourd, sur nos épaules. Ca a donc été un gros challenge de combiner les traceurs de la formule Call of Duty, qui comporte pas mal de fun et d’action, avec cet héritage que l’on doit traiter avec honneur et respect.
Schofield : Un des challenges, différent et moins psychologique, était qu’on devait recréer chaque animation du jeu à partir de zéro. C’était il y a 70 ans, les militaires couraient différemment, n’étaient pas entrainés de la même façon qu’aujourd’hui. Ils n’avaient pas le même équipement, et parfois n’avaient que très peu de connaissances militaires : tout était différent à l’époque. Ca a donc été un énorme investissement en temps et en recherche pour arriver à un rendu correct pour ces variables. Pour vous citer un exemple, je parlerai des bâtiments. Ceux qu’on voit dans le jeu ont été construits au tout début du 20ème siècle. Ca peut paraitre anodin, dit comme ça, mais quand une bombe frappe ces bâtiments, ils explosent littéralement, générant des débris de roche qui partent dans toutes les directions. On a dû développer un système pour ces nouvelles destructions. Ca a généré un énorme investissement en R&D.
C’est un nouveau moteur graphique que vous utilisez ?
Condrey : Non. On a passé trois ans à développer de nouveaux systèmes pour le moteur d’Advanced Warfare. Le précédent moteur était nouveau pour la génération de consoles, et on en est très fiers. Depuis, on l’a amélioré avec des nouveaux systèmes d’IA, d’animation, de son, de destruction, de rendu, d’éclairage, de brouillard… Tout ce qui améliore sensiblement la technique du jeu et les graphismes. On est super fiers de ce nouveau rendu.
Le principal ajout d’Advanced Warfare était son gameplay vertical. Sur WW2, on est "pieds à terre", quel est le gros ajout en matière de feeling ? Avez-vous travaillé sur des maps plus vastes ? Sur de nouvelles features de gameplay ?
Schofield : Il y a plusieurs choses à analyser quand on fait un jeu et le but est de passer au peigne fin chaque pan du titre, de la police d’écriture jusqu’au HUD. On a donc fait quelques ajustements de gameplay, c’est vrai, mais il y a aussi de gros changements. Vous avez raison en disant que le maitre mot du précédent jeu était « verticalité » et selon moi, le maitre mot de CoD : WW2 est « réalisme ». Le réalisme des manœuvres de tank, les basses audio de chaque tir, les vibrations de la manette, tout est bien plus réel et crédible que dans Advanced Warfare. Bien évidemment, en dehors de ça, on a les nouveaux systèmes comme la santé, l’escouade…
A propos du système de santé justement : est ce que nous aurons un système classique de couverture pour récupérer sa vie ou bien devrons-nous gérer cette donnée avec le médic de l’escouade ?
(Glen Schofield demande au responsable de la communication si nous pouvons aborder la question du système de soin). C’est une bonne question, mais nous ne pouvons pas encore en parler ensemble malheureusement, on ne veut pas spoiler nos propres annonces futures.
Nous pourrons jouer plusieurs personnages dans le jeu, y compris un soldat de la Royal Air Force : pourrons-nous contrôler un avion durant des batailles ? Les véhicules font-ils partie du jeu ?
On a abordé un peu plus tôt les sensations réalistes que les joueurs vivront à bord d’un tank. Et… (Glen Schofield regarde son responsable de communication) C’est la Seconde Guerre Mondiale, il y aura donc pas mal de choses qui, si elles sont légitimes, seront dans le jeu…
Je peux essayer d’être plus précis : pourra-t-on vraiment contrôler des avions ou juste être dans une tourelle ?
Schofield : Je ne sais pas… (le responsable de la communication autorise progressivement les intervenants à en dire un peu plus). Ca fait partie des spoilers, mais on peut dire qu’on contrôlera un tank, qu’on sera parfois dans une jeep, et plus encore…
Un grand merci à Glen Schofield et Michael Condrey pour leur sympathie et leurs réponses à cette table ronde ainsi qu'à entretien exclusif.