De la première vidéo de présentation à la conférence de la nuit dernière, Nintendo a toujours mis en avant les nombreuses façons de jouer de la Nintendo Switch. Sur une télé, en version portable, seul ou à plusieurs, avec les Joy-Con, le Joy-Con Grip ou le Pro Controller, on croule sous le choix et on ne peut qu’être émerveillé devant les capacités d’adaptation de la console. Toutefois, toutes ces configurations peuvent-elles être logées à la même enseigne en matière de gameplay et de sensation ? Après avoir testé la machine dans de multiples configurations, voici notre avis :
Console de salon ou console portable ?
En mode Télévision
Lorsque la Nintendo Switch est sur son dock, l’image du jeu est alors transposée sur votre moniteur, tel une console de salon standard. Evidemment, il s’agit d’un format particulièrement classique qui ne semble pas casser trois pattes à un canard. Toutefois, cela nous permet de parler de la puissance supposée de la machine. Soyons clair, techniquement, la Switch n’a pas grand-chose d’impressionnant, en tout cas dans la sélection de jeux présentés. On est à peine un cran au-dessus de ce que fait la Wii U, c’est à dire un niveau bien en deçà des PS4 et Xbox One. The Legend of Zelda : Breath of the Wild est un exemple flagrant. Alors qu’ils sort dans six semaines, le titre de Nintendo affiche un aliasing marqué et nous inflige un clipping constant de verdure et même d’ennemis, à des distances parfois courtes. Bien que son statut d’open world aux gigantesques panoramas le rend plus enclin à ce genre de constat, cela reste très dommageable. Notez toutefois que ce manque de puissance n’empêche pas les jeux d’être beau d’un point de vue purement artistique, et Breath of the Wild en est d’ailleurs la preuve. Pour le reste, jouer sur une TV offre sans aucun doute un grand confort de lisibilité (de par la taille) par rapport à la version portative, sans compter un meilleur effet de profondeur selon la qualité de l’écran.
En mode Portable
La plus grosse surprise sans aucun doute été la qualité de l’écran de la Nintendo Switch. L’image est vraiment nette, les couleurs sont vives et la résolution de 720p sur 6,2 pouces est plus qu’acceptable. Là encore, c’est Breath of the Wild qui en apporte la preuve. En enlevant la Switch de son dock et en passant au format portable, j’ai été impressionné par la différence de qualité. Si les effets de profondeur sont sans doute moins prononcés, j’ai clairement préféré y jouer dans ce format, plus agréable. Cela en fait-il de la Switch une excellente console portable ? Pas si sûr…
Car qui dit console nomade dit autonomie, et la Nintendo Switch n’est sans doute pas la meilleure plate-forme de Nintendo dans ce domaine. Sur des jeux gourmands, comme l’est The Legend of Zelda : Breath of the Wild, une charge pleine tiendra moins de trois heures. A titre d’exemple, la Nintendo 3DS tire régulièrement dans les cinq heures (j’ai déjà fait six heures d’affilées sur Super Smash Bros for 3DS, pour donner une idée). Du coup, si la Switch accueillera sans aucun doute des jeux que l’on peut considérer comme performants pour une console portable, la batterie ne semble pas avoir suivi la montée de gamme, du moins pas assez pour répondre aux mêmes critères d’autonomie que ce à quoi Nintendo nous avait habitué. Bien que l’on pourra utiliser des recharges externes via le port USB-C, on a quand même l’impression d’avoir affaire à une console transportable plus qu’à une vraie portable. Un élément qui peut avoir une importance dans votre décision de l’acheter selon l’utilisation que vous comptez en faire.
Autre chose, si le jeu à deux sur un seul écran de Switch est possible via les deux Joy-Con qui y sont associés, pas sûr que tous les jeux y sont adaptés. D’un côté, le jeu de réflexion/adresse Snipperclips : Les Deux Font la Paire fonctionne à la perfection, le gameplay se déroulant que sur un seul écran fixe avec une bonne visibilité grâce à un design épuré. De l’autre, c’est une autre histoire quand on essaie de jouer à deux à Mario Kart 8 Deluxe, avec 12 Karts sur un circuit et des items dans tous les sens en écran splitté sur une surface de 6,2 pouces. Ai-je besoin d’en dire plus ? On est clairement dans le domaine de l’illisible et l’expérience fut plutôt désagréable, visuellement parlant.
Avec quelle "manette" jouer ?
La Nintendo Switch
Utilisé comme une console portable, la Nintendo Switch offre une configuration plutôt standard. Avec les deux Joy-Con clippés à l’écran de 6,2 pouces, on se retrouve avec un controller proche d’une mini-tablette en termes de taille, c’est à dire quelque chose de plus petit que le GamePad de la Wii U. Sans aucun doute, les sensations sont bien meilleures qu’avec cette dernière : non seulement la Switch est mieux équilibrée en termes de poids, mais la disposition des boutons est plus agréable à l’utilisation. Par contre, le stick droit en dessous des touches B,A,X,Y n'est pas optimal, comme je l'explique un peu plus bas. Autre chose, les touches de tranches et gâchettes sont plutôt proches : si cela les rend plus accessibles aux petites mains, il n’est pas interdit que les joueurs aux doigts de bûcheron aient plus de mal… Enfin, les fonctions gyroscopiques sont similaires à celle de la Wii U, en mieux puisque le format s’avère plus agile.
La Switch Pro Controller
Vendu à 70€ séparément du pack de base Nintendo Switch, la Switch Pro Controller est censée être la caution « gamer » en matière de maniabilité, l’équivalent de la Dualshock 4 pour PlayStation 4 ou de la Xbox One Controller pour la Xbox One. A ce prix, on ne peut espérer que du matériel de grande qualité, mais il faut bien avouer qu’on a été un peu déçu par les sensations. En effet, la bestiole fait un peu cheap, avec une impression de plastique pas très agréable en mains. Même si la manette fait le travail, on aurait pas craché sur une finition plus poussée, y compris au niveau des gâchettes et des boutons dont les rendus physiques manque de touché. Notez toutefois que le bestiau dispose de fonctions gyroscopiques et d’un accéléromètre, ce qui explique en partie le prix sans pour autant totalement le justifier à cause des sensations finales.
Joy-Con Grip + Joy-Con
Lorsque les deux Joy-Con sont clippés au Joy-Con Grip, on obtient une manette à la forme plutôt carrée et à la prise en mains clairement, selon mes premières impressions, sous-optimale. Comme je le disais auparavant, le stick droit placé directement en dessous des boutons B,A,X,Y semble loin d’être une évidence d’ergonomie, là où une position plus « centrale » (vers la diagonale bas/gauche de l’habituel quatuor de façade) est la norme. A vrai dire, l’ensemble Joy-Con Grip + Joy Con fait plus manette de dépannage qu’autre chose. Certes, ça ne rend pas l’ensemble injouable, mais la disposition bancale des touches et sticks risque de nuire à vos performances, avec quelques moments de frustration à la clef. Bien sûr, cela n’est à prendre en compte que pour les jeux les plus techniques qui demandent des enchaînements d’action plus ou moins complexes. Sur les jeux ne nécessitant pas d’utiliser le stick droit par exemple (principalement des jeux qui ne demandent pas de bouger la caméra), ça ne changera pas grand-chose à votre expérience.
Joy-Con seul
La première chose qui choque quand on joue avec un Joy-Con seul est la taille de la manette. C’est très, mais alors très petit. Mais le plus étonnant, c’est que plusieurs possibilités de prise en mains existent selon les jeux. Par exemple, sur un Mario Kart 8 Deluxe, on tient la manette à l’horizontale, avec au dessus deux petits boutons L et R à l’endroit où le Joy-Con s’enclenche normalement sur les côtés de la Nintendo Switch. Il faut bien l’avouer, la prise en mains peut cêtre perturbante et on a un peu l’impression de manipuler un gadget. Le controller n’est pas assez grand pour atteindre la paume de chaque main lorsque vous avez vos doigts sur les « gâchettes », ce qui vous laisse une petite sensation de vide qui n’est pas des plus agréables, vous obligeant à être plus crispé au niveau des phalanges. Du coup, je doute que cette configuration horizontale soit adaptée à des séances de plusieurs heures d’affilées.
En fait, le Joy-Con semble plus adapté à une prise en mains de style Wiimote, comme l’auront finalement prouvé la plupart des mini-jeux de 1-2 Switch. Dans le stand-off style Western par exemple, dégainer et appuyer sur la gâchette est un jeu d’enfant. Le mini-jeu Milk, quant à lui, nous demande de traire une vache, ce qui se fait en tenant le Joy-Con comme un pis tout en faisant des mouvements verticaux en appuyant sur les boutons L et R avec un bon timing. Là encore, sur de courtes sessions et avec une configuration de touche mono-tâche, ça fonctionne plutôt bien, en tout cas pour trois des quatres personnes de Jeuxvideo.com qui ont pu s’y essayer. Le dernier, Epyon, se sentait moins à l’aise à cause de l’ergonomie du Joy-Con, qu’il trouvait moins adapté aux gauchers. Toutefois, Panthaa, lui aussi gaucher, n’a pas ressenti de problèmes particuliers, comme quoi ce pourrait aussi être une histoire de préférence.
Autre point, c’est en utilisant le Joy-Con seul que l’on a vraiment pu profiter du « Vibration HD », les fonctions sensorielles améliorées du controller de Nintendo. Après avoir joué au mini-jeu Ball Count, toujours issu de 1, 2, Switch, on peut confirmer que la technologie est très efficace. Alors qu’une petite boîte s’affiche à l’écran, représentée par le Joy-Con pris à pleine main à l’horizontale, on doit pencher l’objet dans toutes les directions pour deviner combien de boules métalliques sont à l’intérieur. Et fichtre, aussi bête que cela puisse paraître, on a vraiment la sensation de ressentir le poids des billes qui bougent uniquement grâce aux micro-vibrations localisées, nous donnant une vraie illusion de transfert de masse. On les sent même s’entrechoquer ! Un concept remarquable qui pourrait avoir une utilisation poussée dans des jeux basés sur les sensations, même si j’ai l’impression qu’en termes de gameplay, cela reste une sacrée niche… Espérons que les idées pleuvent chez les développeurs, il y a vraiment quelque chose à faire...
Double Joy-Con
Le seul jeu auquel nous avons pu jouer en mode double Joy-Con est Arms. Pour faire simple, on se rapproche du combo Wiimote/Nunchuk de la Wii, auquel on peut soustraire les déconnexions lorsqu’on ne pointait pas l’écran pendant trop longtemps. La maniabilité est agréable, bien plus fluide et maîtrisée que dans le jeu de boxe de Wii Sports tout en permettant technique et précision. On peut vraiment viser nos coups de poing, se déplacer rapidement et gérer la défense en se protégeant. Etonnamment, c’est plus accessible qu’il n’y paraît et il ne faut pas plus de cinq minutes pour apprivoiser la bête. Cependant, il est à noter une nouvelle fois que la petite taille des Joy-Con peut poser problème à certains joueurs, avec des manettes qui glissent et des boutons petits et rapprochés (y compris les gâchettes) qui peuvent déboucher sur des misclicks. Encore une fois, ce n’est arrivé qu’à un seul d’entre nous (Epyon, qui a aussi les plus grandes mains, le bougre), alors tout le monde ne sera pas logé à la même enseigne.
Le mélange des configurations
Bien que toutes les configurations ne se valent pas en matière d’ergonomie et de maniabilité selon le type de jeu, le simple fait que la Switch puisse varier ces différentes possibilités au sein d’un même environnement reste un avantage certain. Varier entre Breath of the Wild sur TV ou sur l’écran de la Switch selon les préférences ou besoin, en deux secondes, c’est fort pratique. A titre d’exemple, on peut faire des parties locales de Splatoon qui mélangent joueurs en format portable, joueurs sur écrans TV avec la Switch comme manette et joueurs sur écrans TV avec une Switch Pro Controller dans les mains. Oui, ça demande huit Switch, mais si on a les potes après tout, pourquoi se priver ? La seule petite gêne qui pourrait survenir, c’est quand il faut se rappeler la configuration de bouton selon la configuration utiliser. A force de mettre un Joy Con à l’horizontale, à la vertical où de le clipser à un Joy-Con Grip, on ne sait parfois plus où sont les boutons. Un problème qui n’arrive que si on change de type de jeu régulièrement, cela dit.
Ce qui est sûr, c’est que la dimension sociale est ainsi présente, laissant les joueurs décider à leur guise de leur façon de jouer. Reste bien évidemment à trouver les concepts les plus adaptés à chacune des configurations pour obtenir des conditions de jeu optimales. Si Nintendo nous montre déjà la voix avec des titres comme Arms et le fourre-tout 1, 2, Switch, on espère que ces idées dépassent rapidement le stade de gadget fun au point d’attirer le public et les éditeurs tiers. Mais cela est un tout autre débat auquel les prochains mois apporteront les premiers éléments de réponse.
The Legend of Zelda : Breath of the Wild - Un dépaysement total !