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Ce qui définit une franchise, c'est en général sa capacité à mettre en scène, épisode après épisode, des éléments qui ont su charmer le public. Si le gameplay est un atout primordial, le plus souvent on associe surtout une franchise à ses personnages ou son contexte bien particulier. Dur d'imaginer un Halo sans Covenants ou encore un Uncharted sans Nathan Drake et sa bande. Pourtant, il est une série qui a su faire fi de tout rapport direct entre ses épisodes : Far Cry. Alors, n'y a-t-il vraiment aucun lien entre les différents épisodes de la franchise ? Pas si sûr si nous y jetons un œil avec attention.
Si on se base sur les origines de la saga, Far Cry premier du nom, par Crytek, contait l'histoire de Jack Carver, ancien soldat reconverti dans le tourisme qui se retrouve malheureusement attaqué par des mercenaires lors d'une escale dans un archipel micronésien. Le vétéran se retrouve alors face à un mélange de tueurs sanguinaires et de mutants échappés d'un labo haute sécurité. Un scénario de science-fiction qui donna suite à plusieurs épisodes avec un Jack déshumanisé petit à petit, engrangeant diverses mutations qui lui confèrent des traits animaux (rapidité, odorat, force...).
Avec Far Cry 2, Ubisoft (qui a repris la licence depuis quelques épisodes, dont le remake de Far Cry) semblait avoir décidé de faire table rase du passé, envoyant le joueur errer dans une Afrique de l'Est plus sauvage que jamais. Milices armées jusqu'aux dents, brousse brûlantes et conflits sanglants étaient le pain quotidien de ce titre proche d'un Blood Diamond, le tout se voulant des plus réalistes. A première vue, aucun lien avec Far Cry. Et pourtant... difficile de ne pas retrouver en Le Chacal, un des principaux protagonistes, quelque chose de Jack Carver.
Le Chacal est un ancien militaire, reconverti en trafiquant d'armes Il porte des chemises proches des coloris préférés de Jack et aime s'identifier à un animal dans les différentes cassettes ramassées par le joueur. Son propre nom en VO, Jackal ("chacal" en anglais), ne laisse pas beaucoup de doutes quant à son inspiration, qu'Ubisoft reconnaîtra par la suite.
Après un second épisode dans la sauvage Afrique, c'est au tour des iles du Pacifique de revenir au goût du jour avec Far Cry 3. Plages de sable blanc, cocotiers verdoyants, casoars et psychopathes... un vrai décor de rêve. Une nouvelle fois, Ubisoft semble avoir fait table rase du passé, mais est-ce vraiment le cas ? En plus d'un mode de difficulté jugé "pire que la malaria", Far Cry 3 dispose d'un nombre intéressant d'anecdotes faisant un lien avec un épisode passé.
Prenons l'exemple de cette folle aux abords de Badtown, qui vous parlera de son enlèvement par un marchand d'armes avec lequel elle a ensuite travaillé, ou encore du personnage de Hurk. Ce dernier, dans sa première mission avec le joueur, lui demandera d'aller récupérer des diamants de conflit de Bowa-Seko, une des aires de jeu de Far Cry 2. Hurk entame d'ailleurs un changement de taille dans la série, à venir dans le 4e épisode: Far Cry 4. Avec une aventure dans les hauteurs de l'Himalaya, une fois encore le jeu semble vouloir abandonner tout lien avec ses prédécesseurs, et pourtant ce n'est pas le cas. Grande première dans la série, des anciens font leur retour au casting en la présence d'Hurk et de Willis Huntley, tous deux personnages de Far Cry 3. Les épisodes antérieurs sont d'ailleurs maintes fois référéncés, notamment à travers les objets ramassés (vahiné Vaas, pilules contre la malaria, diamants de conflit, radar de Rook Islands...).
D'autres éléments viennent directement faire écho à Far Cry 2, à travers un personnage bien particulier : Longinus. L'homme s'est pris une balle dans la tête, et est passé de chef de guerre à prêtre vendeur d'armes. Un détail comme un autre, s'il n'expliquait pas avoir été "baptisé" dans les chutes Goka avant d'être soigné par le père Maliya, prêtre de Far Cry 2. Étrangement, les chutes Goka sont aussi le lieu de l'assassinat de Prosper Kouassi par le joueur, un chef de guerre dont la "renaissance" par le baptême dans les eaux de la cascade n'aurait rien d'inconcevable. L'homme vous enverra d'ailleurs chercher des diamants de sang pour "expier ses péchés", comme ne pas avoir épargné une famille ou ne pas avoir fourni de pilules anti-malaria à un homme pour son fils.
Références toujours : Far Cry 4 dispose à la fin de ses missions en compagnie d'Hurk d'un détail de taille concernant des personnages passés. Si Huntley se moque ouvertement d'un "abruti avec qui il avait dû faire le babysitter" en référence à Jason Brody, héros de Far Cry 3, Hurk le cite directement, parlant de ses fameux tatouages et en ayant "un pour Jack, un pour Jason et un pour Ajay". Hurk serait-il le lien ultime entre tous les Far Cry ? Lui, l'homme enfant ayant mutiler les macaques à coup de C4 ?
Les références étaient possibles via les différentes épisodes car on les savait situés dans une même période, un même univers. Toutefois, avec Far Cry Primal, on pouvait fatalement s'attendre à ce que toutes ces références ne soient plus de la partie. Et pour cause, l'aventure se déroule en l'an 7000 avant J-C. Pourtant, dans sa facétie habituelle, Ubisoft n'a pas manqué d'offrir aux fans un clin d'oeil aux autres épisodes de sa série... et à travers le personnage d'Urki. Son nom a une sonorité familière ? Et pour cause, c'est l'ancêtre de Hurk, preuve vivante que le malheureux de Far Cry 3 et 4 n'a hélas pas beaucoup évolué depuis mais est le seul personnage à faire un lien direct entre tous les épisodes, par présence ou référence. Comme quoi, on a toujours besoin d'un plus abruti que soi.
Far Cry est donc une série qui aime se référencer discrètement, et qui fatalement ravit ses amateurs à travers des easters eggs savoureux. Difficile de savoir ce qui sera au menu du prochain épisode, mais l'on peut déjà parier sans trop risquer que Hurk sera probablement au programme, d'une manière ou d'une autre.