Depuis un peu plus d’an maintenant, il ne se passe pas une semaine sans qu’une société, une marque ou un constructeur annonce sa volonté d’investir le tout jeune marché de la réalité virtuelle. Parmi eux, Samsung a été l’un des premiers à dégainer un “casque sans-fil”, fonctionnant exclusivement avec des smartphones sous Android, et pas n’importe lesquels : le Galaxy Note 4 et le Galaxy S6. Ainsi, le Gear VR n’est, en soi, qu’une coquille vide, ou presque, uniquement destiné à recevoir un téléphone haut de gamme, qui va alors faire office d’écran. Au moyen de deux lentilles grossissantes, du gyroscope et de divers capteurs, l’effet d’immersion est censé être parfait. Après plusieurs jours d’utilisation du Gear VR, il est temps de tirer un bilan global sur la qualité de l’appareil et son utilité.
Comme dit plus haut, le Gear VR est pour le moment disponible en deux versions : l’une fonctionnant exclusivement avec le Samsung Galaxy Note 4, et l’autre avec le Galaxy S6. C’est ce dernier que nous avons pu utiliser pendant plusieurs jours. Par rapport à la version “Note 4”, le Gear VR “Galaxy S6 Edition” a l’avantage d’être plus compact et plus léger, et donc plus confortable à porter, le reste étant sensiblement identique.
On retrouve ainsi un design qui donne dans le blanc et la sobriété, qui n’est pas sans rappeler le look du Morpheus de Sony. À l’avant, le cache de protection se retire d’une simple pression d’un bouton, et le smartphone s’insère avec une facilité déconcertante. Sur le côté droit, on trouve une surface tactile, un bouton “retour” et le réglage du volume. Sur le dessus, une molette permet de régler la précision des lentilles, ce qui est d’une importance capitale lorsque l’on porte des lunettes. Il faut en effet savoir que le Gear VR n’est pas du tout confortable à porter avec une paire de binocles sur le nez et qu’il est tout à fait conseillé de les retirer au moment d’enfiler l’appareil sur la tête. Heureusement, l’ajustement des lentilles fonctionne très bien, même lorsque l’on est atteint d’une forte myopie, comme l’auteur de ces lignes.
Question confort, là encore, il n’y a pas grand-chose à reprocher au Gear VR. La large bande rembourrée à l’arrière, ainsi qu’au-dessus permettent un usage prolongé sans gêne, d’autant plus que l’ensemble reste léger, même une fois le Galaxy S6 inséré. La mousse autour des yeux sait se faire discrète, tandis qu’une ouverture sur le côté offre une bonne diffusion de la chaleur et empêche l’apparition de buée sur les lentilles. Bref, d’un point purement matériel, le Gear VR est assurément un excellent casque de réalité virtuelle, profitant à la fois d’une très bonne finition et d’un design réussi.
Abordons maintenant l’aspect logiciel, là aussi extrêmement important. On le redit : l’installation en elle même est d’une simplicité enfantine. Il faut au préalable télécharger l’application Oculus sur le Galaxy S6 et créer un compte (sans forcément entrer ses informations de carte bancaire, rassurez-vous). Une fois celle-ci finalisée, il ne reste plus qu’à insérer le smartphone dans le casque. L’appareil détecte alors le changement et bascule dans une interface entièrement pensée pour la réalité virtuelle, conçue par Oculus VR.
On touche d’ailleurs là un premier point négatif du Gear VR : cet écosystème, baptisé Oculus Home, est certes plutôt agréable à l’oeil, mais s’avère finalement peu ergonomique. Séparé en deux grandes sections (“bibliothèque” et “boutique”), il manque cruellement de fonctions avancées. Il est par exemple impossible de rechercher une application ou un jeu par mots clés, tandis que la boutique se contente de tout stocker en vrac, avec à peine une distinction entre “jeux”, “applications” et “expériences”. Pas de classement par catégorie, par note, ou par nombre de téléchargements… On sent clairement que l’interface a été conçue à la va-vite, et l’on espère surtout qu’elle sera rapidement mise à jour.
Malgré tout, une fois le casque enfilé, la navigation reste aisée, grâce à la présence du pavé tactile sur le côté, qui permet de facilement contrôler l’ensemble. On pointe le curseur en bougeant la tête, on effleure le touchpad du doigt et on passe d’une application à l’autre en quelques secondes. Aucune latence n’est à constater, et encore moins un quelconque mal de crâne ou effet de nausée, ce qui est une excellente nouvelle.
Les bienfaits d'une définition 2K
L’avantage d’utiliser ici le Galaxy S6 est notamment de profiter d’une finesse d'affichage plus élevée que la moyenne des casques du marché. Rappelons en effet que la dalle de 5,1 pouces du smartphone de Samsung propose une définition de 2560 x 1440 pixels, alors qu’un Oculus Rift ou un HTC Vive se contentent du Full HD (1920 x 1080). Cette montée en résolution permet de minimiser largement l’effet “grille” sur l’image. Ce n’est cependant pas encore parfait et l’on distingue toujours la trame de fond, mais c’est actuellement ce que vous trouverez de plus fin sur un casque de réalité virtuelle. Nul doute qu’il faudra attendre les premières dalles capables d’afficher du 4K, voire du 8K, pour profiter d’une image parfaitement nette.
Maintenant que le Gear VR est paramétré et posé sur votre nez, vous vous posez certainement LA grande question : concrètement, qu’est-ce que je fais avec ? Le premier réflexe est bien entendu d’aller faire un tour dans la section “jeux” de la boutique. Ces derniers sont de plus en plus nombreux, mais l’on déplore un prix de vente souvent très élevé (jusqu’à 10 dollars), couplé à la rareté d’une version de démonstration. De plus, on regrette que pas mal de titres se contentent de peu, singeant mollement un jeu de tir sur rail ou dans l’espace, sans aucun effort d’imagination. Heureusement, quelques uns ont retenu notre attention et sont clairement à essayer. Voici notre sélection non exhaustive et 100 % subjective, à laquelle nous avons ajouté une poignée “d’expériences” s’éloignant du pur jeu vidéo, mais valant tout de même le coup d’oeil.
Dreadhalls
Cardiaques, passez votre chemin : Dreadhalls est très certainement l’une des expériences de réalité virtuelle les plus éprouvantes que vous pourrez connaître. Le principe est pourtant connu : vous devez sortir d’un donjon labyrinthique, en vous orientant avec votre carte, en crochetant les portes… et en évitant absolument le contact avec l’une des créatures qui peuplent ces couloirs humides. Mélange de jeu d’horreur et de rogue-like, Dreadhalls procure une immersion tellement convaincante qu’il est difficile d’y jouer d’une traite la première fois.
Herobound (Spirit Champion & Fire Steps)
Herobound est la preuve parfaite que la réalité virtuelle peut aussi fonctionner lorsqu’elle n’est pas vécue en vue subjective. Les deux épisodes reprennent en effet un gameplay à la Zelda (exploration de donjons, énigmes et combats), à travers une vue isométrique à la fois très jouable et immersive. On tourne la tête pour découvrir de splendides décors, tout en dirigeant son personnage au pad. Assez basiques dans leurs mécaniques de jeu, les deux titres n’en restent pas moins extrêmement intéressants, d’autant plus qu’ils sont entièrement gratuits.
Temple Run VR
Vous connaissez certainement Temple Run, peut-être même que vous l’avez discrètement installé sur votre mobile et que vous y avez passé beaucoup trop de temps. Ce pur “runner” en 3D s’exporte pour la première en réalité virtuelle, et le résultat est très convaincant. Sauter, se baisser, se retourner pour voir le monstre qui vous pourchasse… Le tout se fait avec un naturel déconcertant.
Smash Hit Plunder
Pour le moment, Smash Hit Plunder n’est qu’une simple démo, mais devrait devenir un jeu complet dans les mois à venir. Et autant vous dire que l’on a hâte de s’y essayer plus longtemps. Ce titre est à la fois une course au trésor et un jeu d’exploration en vue subjective. Vous vous déplacez dans les différentes pièces d’un donjon/château, et devez attraper et briser le plus de pots, coffres, jarres possible, afin d’amasser les pièces d’or qu’ils contiennent. La réalisation en pixel-art fonctionne du tonnerre, tandis que les déplacements “par à coup” sont aussi surprenants qu'efficaces.
Anshar Wars
Des shooters spatiaux en réalité virtuelle, il en existe beaucoup. Beaucoup trop, même, la qualité n'étant pas souvent au rendez-vous. On va donc vous épargner du temps perdu : si vous cherchez un shoot’em up réussi, et gratuit, téléchargez Anshar Wars. Jouable uniquement avec les mouvements de la tête et le pavé tactile du Gear VR, Anshar Wars est particulièrement plaisant et immersif.
Titans of Space
Allons droit au but : Titans of Space n’est pas vraiment un jeu, mais doit absolument être essayé, d’autant plus si vous vous intéressez un minimum au cosmos. Ce voyage éducatif dans l'Espace vous présente l’ensemble des planètes du système solaire et met en avant quelques-unes des étoiles les plus imposantes de l’univers. Le voyage est vertigineux, et nous fait sentir minuscule.
Ocean Rift
De l’Espace infinie aux profondeurs des océans, il n’y a qu’un pas, que la réalité virtuelle vous fait franchir sans frémir. Là encore, Ocean Rift n’est pas vraiment un jeu, mais plutôt un trip aquatique reposant et fascinant, où vous pourrez évoluer au milieu des requins et des tortues, sans avoir à claquer votre PEL dans un billet pour les Maldives. On se déplace au moyen d’une manette bluetooth, tout en douceur, et on lève la tête pour profiter d’une splendide faune et flore.
Reportage sur le Gear VR au TGS 2014
Alors, on achète ou pas ?
Au final, le Gear VR de Samsung s’avère clairement un produit de qualité : bien conçu, confortable à porter, très simple d’installation et d’utilisation, c’est assurément le casque de VR “sans fil” le plus convaincant du marché. Oui, mais voilà : il n’est pas à la portée de tout le monde. Alors qu’un produit concurrent comme l’Homido coûte moins de 70€ et peut être utilisé avec n’importe quel smartphone moyen et haut de gamme, le Gear VR implique un budget beaucoup plus élevé. Déjà, il faut bien entendu avoir à disposition un Galaxy Note 4 ou un Galaxy S6, deux appareils qui sont difficilement trouvables à moins de 500€. Ensuite, le Gear VR en lui-même est vendu en moyenne 200€, qu’il soit en version “Note 4” ou “S6”. Bref, si vous êtes déjà possesseurs d’un des deux smartphones compatibles ou si vous pensez bientôt les acquérir, l’achat reste envisageable, mais uniquement dans cette configuration.
Enfin, on émet toujours quelques réserves quant à l’usage réel d’un casque de réalité virtuelle basé sur un smartphone Android, pour la raison simple que le contenu vraiment convaincant met du temps à arriver. Les jeux et applications cités dans ce texte sont certes très impressionnants, mais restent avant tout faits pour des sessions courtes, et l’on se voit mal investir plusieurs centaines d’euros pour pouvoir y accéder. Reste que d’autres utilisations du Gear VR sont à relever, notamment du côté du home cinema. Une application comme Oculus Cinema, par exemple, simule un écran géant, et regarder un film dans ces conditions est une expérience immanquable. Mais encore une fois, est-on prêt à y mettre ce prix ? La question est ouverte.