Avant d'acquérir le statut qui est le sien aujourd'hui dans le milieu des beat'em all exigeants grâce aux efforts de la Team Ninja, la série Ninja Gaiden était, jusqu'à la fin des années 90, plutôt orientée action / plates-formes.

Nous ne parlerons donc pas ici de l'épisode arcade (sorti également sur Amiga, Atari ST, C64, Amstrad CPC, etc.), mais plutôt des trois chapitres de Ninja Gaiden sortis sur Famicom entre 1988 et 1991 au Japon. Ces trois jeux NES ayant été réunis quelques années plus tard dans une compilation baptisée Ninja Gaiden Trilogy sur SNES, c'est à travers celle-ci que nous aborderons le sujet qui nous intéresse, tout en gardant à l'esprit que ce portage reste extrêmement décevant et que l'objectif est surtout de vous donner envie de (re)découvrir les trois titres dans leur version d'origine sur NES.

Vous aurez donc compris pourquoi ce sont les versions NES que nous allons maintenant aborder, Ninja Gaiden Trilogy étant finalement un prétexte pour nous permettre d'évoquer les trois épisodes à la fois, même si le dernier opus n'a jamais été distribué sur NES en Europe. Tous sont heureusement disponibles en téléchargement sur console virtuelle Wii et Nintendo 3DS, il n'y a donc plus aucune raison de s'en priver.

De Ninja Ryûkenden à Shadow Warriors

On ne peut pas dire que Tecmo ait rendu les choses plus limpides en jugeant bon de renommer la série selon les régions, et cela explique la confusion qui règne sur ce sujet lorsqu'on aborde la question des noms. Développé au Japon en 1988, le premier épisode s'intitule Ninja Ryûkenden mais se voit rebaptisé Ninja Gaiden aux Etats-Unis et Shadow Warriors en Europe. C'est d'ailleurs seulement en 1991 que l'on découvre ce titre dans notre pays, avec une jaquette bien pourrie sur laquelle Ryu Hayabusa a cru bon de retirer son masque. Cela ne semble cependant pas concerner toutes les versions européennes puisqu'on pouvait heureusement trouver aussi des versions EU avec le visuel de Ryu encagoulé (donc identique à la jaquette US), ce qui était d'ailleurs mon cas à l'époque, et je ne vous cache pas avoir craqué pour ce jeu inconnu uniquement pour sa jaquette bien classe...

A l'instar d'une série comme Shenmue, le point de départ de Ninja Gaiden est une soif de vengeance nourrie par le héros à l'écart du meurtrier de son père. Membre d'un clan ninja, c'est par l'intermédiaire d'une bien triste missive que Ryû Hayabusa (ryû = dragon, hayabusa = faucon) apprend le décès de celui-ci, jurant alors de se venger et de découvrir lui-même l'identité et les motivations de son assassin.

Mais pour le joueur, l'histoire commence dès l'introduction mettant en scène le duel entre le père de Ryû et son mystérieux adversaire. Et on peut véritablement parler de mise en scène puisque Ninja Gaiden est l'un des premiers titres d'action à mettre autant l'accent sur la narration à travers des cut-scenes mémorables que l'on a toujours un énorme plaisir à revoir encore aujourd'hui. Chaque niveau est ainsi précédé et suivi d'une cinématique totalement immersive, malgré les moyens dérisoires de l'époque, qui, alliées à des musiques de haut vol, servent complètement le background du jeu.

Tout au long du jeu on se délecte de ces mini-films qui font rapidement évoluer l'histoire vers des enjeux beaucoup plus complexes, allant bien au-delà de la simple vengeance de Ryû pour menacer l'ensemble de la planète. De fil en aiguille, et à condition d'être un minimum anglophone, on en apprend davantage sur les motivations des différents acteurs du scénario, et on a finalement plus hâte de boucler le prochain niveau pour connaître la suite de l'histoire plutôt que pour découvrir quel sera le prochain boss.

En parlant de boss justement, Ninja Gaiden se montre plutôt progressif puisque l'extrême facilité des premiers combats tranche radicalement avec les affrontements que l'on doit livrer en milieu et en fin de partie contre des boss de plus en plus coriaces. Si les trois premiers sont une plaisanterie, les suivants risquent fort de vous donner du fil à retordre, surtout si vous n'arrivez pas avec les bons power-up. Car le gameplay de la série repose essentiellement sur la gestion des points ninja qui permettent de recourir aux pouvoirs secondaires. Le shuriken et l'attaque tourbillonnante comptent ainsi parmi les bonus les plus utiles du jeu, d'où l'intérêt de les conserver pour les moments délicats histoire de ne pas se retrouver complètement démuni. Car armé de son seul katana, Ryû aura du mal à venir à bout des ennemis qui l'attaquent à distance ou qui l'attendent sur des corniches où il n'y a pas la place pour deux.

De l'extérieur, pourtant, le jeu paraît presque facile avec ses ennemis qui meurent en un coup, mais la rapidité du soft et les aléas du scrolling qui font repopper les monstres dès qu'on a le malheur de faire un pas en arrière rendent la progression nettement plus délicate que prévu. Surtout que la plate-forme n'est pas en reste avec des séquences bien tendues où l'on peut facilement se retrouver accroché contre un mur sans parvenir à remonter. Malgré tout, le rythme très nerveux du jeu le rend vraiment fun à jouer et donne toujours envie d'y retourner malgré sa difficulté indéniable.

Ninja Gaiden II : The Dark Sword of Chaos

Dès 1990, avant même que le premier volet n'ait eu le temps d'arriver jusqu'à nous, Tecmo sort une suite sur NES intitulée Ninja Ryûkenden II : Ankoku no Jashinken (Ninja Gaiden II : The Dark Sword of Chaos aux US). Elle sera éditée en Europe en 1994 sous le titre Shadow Warriors II : Ninja Gaiden II, histoire d'expliquer un petit peu le cafouillage dans les noms. Je ne ferai pas de commentaires sur le visuel de la jaquette européenne, je pense que la photo parle d'elle-même...

Un an après la défaite de Jaquio, le démon Ashtar prend la relève, projetant d'ouvrir un portail des ténèbres pour dominer le monde. Ryu Hayabusa est alors contraint, par un nouveau groupe d'individus, de contrer les plans d'Ashtar s'il veut revoir sa compagne.

Les routines de gameplay restent globalement les mêmes que dans le premier volet, on y retrouve des bonus identiques et toujours les mêmes avantages et inconvénients dans le système de jeu. La principale nouveauté est que Ryû peut désormais invoquer un clone de lui-même pour multiplier sa force de frappe, ce qui s'avère particulièrement utile contre les boss. L'aspect plate-forme est quant à lui grandement simplifié par le fait que le ninja peut maintenant escalader les parois.

Ninja Gaiden III : The Ancient Ship of Doom

Inédit en Europe jusqu'à ce qu'on puisse le découvrir en version dématérialisée sur la console virtuelle, Ninja Gaiden III : The Ancient Ship of Doom (Ninja Ryûkenden III : Yomi no Hakobune en V.O.) est sorti sur NES en 1991. Il vient clore la trilogie en nous racontant ce qui s'est passé entre le premier et le deuxième volet de la série. L'introduction laisse planer l'incertitude sur le sort d'Irene Lew, compagne de Ryû et agent de la CIA, alors que celle-ci est portée disparue en mission. Accusé de l'avoir tué, notre ninja reprend son katana pour tenter de lever le voile de mystère qui entoure cette sombre affaire.

Le gameplay n'évolue que très peu, donnant simplement plus d'agilité à Ryu qui peut à présent s'accrocher au plafond. Son périple le conduira cette fois jusque dans le désert pour pénétrer au coeur d'une forteresse où il rencontrera des individus mêlés à un odieux complot.

Loin d'être éteinte, la franchise aura su ensuite évoluer avec son temps pour trouver sa place dans une catégorie qui lui sied plutôt pas mal, celle du beat'em all exigeant, son héros faisant même des incursions régulières dans la série Dead or Alive pour notre plus grand bonheur.

> Accéder à la rubrique Retrogaming