Dans la lignée des Contra et autres titres à la difficulté abusive, Probotector, en cette belle année 1990 appose son sceau sur le domaine tant exploité du jeu d'action mâtiné de shoot'em up. Qu'entends-je par là ? Et bien tout simplement la description du principe séculaire d'un personnage fortement armé galopant inconsciemment l'arme au poing au sein d'un scrolling 2D horizontal repoussant des hordes toujours plus nombreuses d'ennemis, dont le meilleur représentant est le légendaire Metal Slug. Mais ici point d'hommes musculeux et trapus à la barbe naissante, seulement, si j'ose dire, des robots de combat aux compétences guerrières exceptionnelles. Envoyés pour neutraliser la tête pensante d'une invasion alien d'une envergure gigantesque sur Terre, les deux androïdes que seule la couleur différencie, vont devoir faire preuve d'un courage et d'une volonté indicibles que leur statut de machine leur permettra d'atteindre. En effet, se jeter au milieu d'êtres sans scrupules seulement équipés d'une mitraillette reste l'apanage des automates. A vous donc d'incarner l'un des deux, par défaut le blanc, afin de l'aider à supporter le lourd poids du sauvetage de l'humanité entière sur ses épaules. Chose qui ne sera pas aisée à la vue des multiples dangers qui vous attendent, tapis au creux d'une difficulté de fort beau gabarit.
Dès l'entrée en matière vous remarquez un détail qui ne trompe pas sur le degré de nervosité auquel vous allez devoir faire face, le nombre limité de vies disponibles. Au nombre de trois seulement par niveau, elles vont de paire avec le montant total de vos continues qui est également de trois. Autant vous dire que chaque décès de votre part est un handicap plus que notable sur une hypothétique conclusion heureuse à votre aventure. Si encore la progression se révélait accessible et équilibrée, soit, mais dans le cas présent, vous aurez plus tendance à ressentir des sueurs froides durant des intervalles réguliers, voire constants. Suivant une optique perverse, nos amis de chez Konami ont décidé, à l'écoute de leur grand coeur, de traumatiser les joueurs pour plusieurs générations. Effectivement, une seule balle vous réduit à néant, et vous retire par la même une vie. Quand on sait qu'il arrive parfois qu'on ne puisse plus compter à l'écran la quantité de petits pixels se déplaçant vers vous et représentant des projectiles mortels, tant ils sont nombreux, vous devez commencer à vous faire une idée du challenge que ce jeu peu représenter. Tout ça bien sûr sans omettre les dizaines de bêtes étranges et agressives vous fonçant dessus, animées de motivations plutôt haineuses. Pourquoi de ce fait a-t-il sa place dans cette rubrique oldies, mettant en lumière des jeux ayant marqué notre/votre enfance par leurs qualités ?
Tout bonnement parce que Probotector possède une ambiance passionnante. Lorgnant du côté de Robotech, tant dans le design du robot et de ses opposants que dans la mise en place de la trame scénarisitique, le soft de Konami vous place dans une atmosphère post-apocalyptique où l'humanité n'est plus apparente, et où l'espoir n'est plus qu'une lointaine notion. Seul face à une nation extraterrestre agressive, vous allez parcourir des environnements à la qualité graphique relativement faible du fait d'un manque de détails, et de la répétition flagrante de longues bandes de décors, mais disposant d'une variété notable. La tension ne se repose en aucune manière durant les stages traversés, vous laissant seul avec votre nervosité conséquente. Cherchant une porte de sortie à travers ces myriades de pièges cruels, vos mouvements d'esquives, et vos actes héroïques à la limite du miracle vous paraîtront d'autant plus magnifiques, et vous pousseront à continuer votre quête contre le mal. La jouabilité étant précise et parfaite, vous n'aurez aucun mal à titrer profit d'un gameplay éculé mais dynamique et attractif.
En effet, votre arme dispose d'une possibilité d'évolution au fur et à mesure des objets que vous ramassez sur le champ de bataille, ou après avoir abattu des sortes de capsules volant négligemment au-dessus de vous durant certaines phases d'un niveau particulier. Matérialisées par des espèces de statuettes d'aigle portant une lettre sur leur ventre, les items que vous saisirez vous offriront des possibilités différentes suivant leur type. A vous ensuite avec l'expérience de savoir lesquels laisser de côté et lesquels vous accaparer. En marge de ces phases de jeu classiques, il vous est parfois donné l'occasion d'écumer des bases ennemies dans une pseudo 3D (en fait vous vous déplacez du fond vers l'avant de l'écran avec l'aide d'un scrolling masquant la supercherie) à la réalisation étonnamment plus soignée que le reste du soft. Un changement de gameplay apportant un peu de fraîcheur dans ce qui aurait pu n'être qu'un enchaînement de niveaux au but commun. Au final, soutenu par une bande-son vraiment très correcte pour de la NES, et détenteur d'une jouabilité et d'une ambiance électrisantes, Probotector se pose comme l'un des jeux d'action majeurs de la console de Nintendo, bien que dépositaire d'une difficulté surhumaine. Une suite sur Super Nes fera honneur à ce titre plein de qualités, qui mérite que l'on s'y attarde. Un conseil, profitez en pleinement à deux joueurs, et n'oubliez pas le cheat code commun à tous les jeux Konami de l'époque Nes. Les aliens ne passeront pas.
Killy