Après la magnificence d'un Secret Of Mana enchanteur et purement onirique, les RPGistes forcenés, en état de dépendance avérée, observaient les farouches nuages d'un avenir compromis. En effet de nombreux titres estampillés Squaresoft, annoncés au japon et aux Etats-Unis semblaient destinés à ne jamais toucher le sol européen, triste destin aux vues des nombreuses qualités de ces softs. Désespérés et hagards, nous (je suis fan de RPG depuis longtemps), nous sommes donc résignés et contentés de feuilleter les pages "Japon" des magazines, des rêves épiques en toile de fond. Pourtant, un peu moins d'un an après la sortie de Seiken Densetsu 2 (Secret Of mana chez nous) paraissait dans l'ombre un certain Secret Of Evermore (1995), fausse suite développée par la branche américaine de Squaresoft. Reprenant une approche sensiblement identique du gameplay, incluant la montée en niveau des armes, la collaboration entre équipiers, ainsi qu'une interface à base de barres de puissance en bas de l'écran, visualisant la "charge de vos équipements offensifs, le titre se détache surtout par son ambiance et son principe. Vous mettant dans la peau d'un jeune garçon féru de cinéma d'action et d'horreur typique des années 90, ressemblant dans le style vestimentaire à un Michael J.Fox adepte de paradoxes temporels dans Retour vers le futur, le jeu vous place dans une situation fort problématique. Poursuivant votre chien dans une des cavalcades dont il a le secret, vous découvrez dans une maison abandonnée une espèce de machine aux atours peu rassurants. Il n'en faut pas plus pour que vous et votre compagnon, soyez téléportés dans une faille temporelle, aboutissant indirectement dans un univers préhistorique. Une grande et longue quête commence alors, dans l'espoir de retrouver le chemin de Pontoise (et oui en France). Fort heureusement vous trouverez sur place des personnes ayant subi le même sort que vous, mais d'une manière moins involontaire. Faciles à reconnaître de par leurs habitudes et leurs vêtements complètement anachroniques, leur aide vous sera précieuse. Vous traverserez en effet différentes époques, de la préhistoire au moyen-âge, en passant par l'antiquité, jusqu'à parvenir dans un lointain futur. Chaque période possède ses difficultés et ses règles à respecter déstabilisant grandement notre valeureux héros.
Accompagné de son chien (qu'il vous est possible de nommer), il devra découvrir qui se place aux commandes de ces dérèglements temporels. Basé sur un principe similaire à celui de SoM, le système de progression s'appuie sur la complémentarité du jeune homme et de son animal. Ce dernier changeant d'aspect suivant l'époque (d'un caniche à un lévrier, voire un grille-pain à roulettes ?!), il est important de savoir profiter de ses compétences. Vous pouvez bien entendu incarner celui-ci afin de sortir votre maître de situations délicates. Vous aurez recours pour cela au système de combat et de gestion reposant sur des anneaux s'affichant autour des personnages. Plusieurs icônes sont disponibles, représentant les l'équipement, l'alchimie, les réglages de combat, etc, se trouvent par conséquent disposées en cercle, et il suffit de les faire défiler et de choisir celle désirée. Une idée ingénieuse fonctionnant à la perfection depuis son invention dans SoM. Mais la plus grande originalité vient sans nul doute de l'utilisation de la magie. Sans aucun rapport avec les esprits ou les forces de la nature, vos sorts dépendront de vos connaissance en alchimie. Différentes formules peuvent en effet vous être enseignées par des amis ou bien découvertes dans des coffres. Une fois ces dernières en votre possession, il vous incombera de respecter les dosages dans le but de pouvoir vous servir d'attaques ou de protections intéressantes. Un exemple, la magie feu vous demandera un nombre précis de cire et d'argile (il me semble). Si par malheur il venait à vous manquer un élément, vous ne pourriez plus bénéficier de cet atout magique. Par ailleurs, et logiquement, les matières dont vous avez besoin se trouvent dans la nature à l'état brut, et sont rapidement repérées par votre chien qui renifle fortement près de l'une d'elles dès qu'il passe à proximité. L'environnement, d'habitude inexistant dans un RPG, interactivement parlant, devient donc une des composantes essentielles de votre épopée et surtout de votre survie. Une approche véritablement intéressante et bien pensée.
Bénéficiant d'un chara-design peu attrayant, mais toutefois pas rédhibitoire, Secret Of Evermore affiche cependant une qualité graphique vraiment imposante, jouant sur les effets de profondeurs et sur les teintes d'une façon magnifique. Les décors ne se ressemblent que peu, et l'on ne subit en aucun cas une lassitude visuelle. En partie grâce au changement d'époques. Mais une des particularités de ce soft est de proposer une bande-sonore immersive et de grande valeur. Composée par Jeremy Soule, seul compositeur américain chez Square, ayant également depuis officié sur de très grands titres comme Morrowind ou encore Dungeon Siege, il donne une dimension spéciale à l'aventure. Décrié par certains comme étant je cite : "une daube infâme", Secret Of Evermore reste pourtant pour moi comme un classique du genre, certes à des lieux d'un SoM ou d'un Zelda, mais apportant suffisamment d'éléments nouveaux et de plaisir pour contenter n'importe quel fan de RPG soucieux de vivre une quête à travers les âges au sein d'un univers musical prenant.
Killy