Alors que la loi française oblige désormais les sites de vente en ligne à facturer les frais d’envoi lors de l’achat de livres, Amazon a récemment trouvé une parade pour continuer à proposer la gratuité de la livraison à ses clients. Mais la ministre de la Culture actuelle ne l’entend pas du tout de cette oreille.
Depuis octobre 2023, les plateformes de vente en ligne françaises qui proposent des livres à la vente ne peuvent plus le faire sans imposer des frais d’envoi à leurs clients. On parle d’une somme de 3 euros, ce qui n’est certes pas énorme, mais qui, pour des plateformes comme Amazon qui font de la gratuité de l’expédition un argument de vente, est forcément contraignant. Pour bénéficier de la gratuité de la commande, les clients du site doivent commander au moins 35 euros de livres.
Cette législation, adoptée il y a désormais plus d’un an, a un objectif plutôt simple : encourager les Français à se rendre dans une librairie pour acheter des livres. Il est vrai que ce type de magasins souffre de plus en plus de la concurrence d’Internet , et cela , même si les plateformes de vente en ligne ne peuvent pas appliquer plus de 5 % de réduction sur les ouvrages vendus.
La petite pirouette d’Amazon qui passe mal
Des sites comme La Fnac ou Amazon comptent parmi les premiers concernés par cette situation. Cependant, La Fnac peut jouer sur le retrait des commandes en magasin, ce qui n’est pas le cas d’Amazon, qui ne possède pas de boutiques physiques. Alors, depuis quelques semaines, le cybermarchand américain applique une pirouette qui lui permet de proposer la livraison gratuite à ses clients, y compris lorsqu’elle ne comprend pas 35 euros de livres.
L’astuce réside dans la possibilité de se faire livrer sa commande dans un casier de retrait nommé Amazon Locker. Si les casiers se trouvent dans un centre commercial ou un grand magasin qui vend des livres, alors Amazon estime que cela lui permet de ne pas appliquer les frais de livraison de 3 euros. Dans cette pratique, tous les lockers ne sont donc pas éligibles, mais Amazon indique clairement lorsque c’est le cas au moment de valider la commande.
Il est important de comprendre qu’ici, Amazon prend la liberté d’interpréter la législation à sa manière et, forcément, cette démarche passe très mal du côté des entités qui s’estiment lésées par cette démarche.
« Un contournement de la législation »
Le premier à avoir réagi n’est autre que le syndicat de la librairie française. Par la voix de son délégué général Guillaume Husson, interrogé par Le Monde, il estime qu’Amazon est « un acteur sans foi ni loi, qui s’attaque à un texte soutenu par le gouvernement et voté à l’unanimité par les parlementaires ».
Il s’avère que Rachida Dati, la ministre de la Culture, est du même avis. « Je vous le dis : c’est un contournement de la législation », a-t-elle déclaré à l’AFP dans le cadre de son déplacement au Salon du livre de Montreuil fin décembre. « J’ai demandé une réponse très claire là-dessus. »
De son côté, Amazon se défend en expliquant que : « Cette initiative facilite l’accès aux livres, en particulier dans les petites villes et zones rurales, et est conforme à la loi Darcos. Nous notons en effet , comme les autres acteurs du secteur, que la réglementation applicable prévoit que la livraison de livres peut être gratuite si le livre est retiré dans un magasin qui vend d’autres livres. » Pour l’heure, il reste donc possible d’utiliser plus de 2 500 points de retrait Amazon en France pour se faire livrer des livres sans payer de frais d’envoi.
Difficile de savoir si cette situation va durer encore longtemps, mais il est certain que pour Amazon, le timing était calibré pour donner cette possibilité à ses clients à l’approche des fêtes. En définitive, peu importe l’issue de ce conflit économico-culturel, il est facile de considérer que le géant du e-commerce a, de toute façon, réussi son coup.