Et si le solaire était plus important que l’hydrogène

L'hydrogène, souvent présenté comme le carburant du futur, suscite un engouement certain dans le secteur automobile. L’exemple récent de la Machina d’Hopium en est la parfaite illustration. Pourtant, une entreprise audacieuse, Aptera Motors, choisit une voie encore plus radicale : le solaire. Alors que le financement par obligations convertibles peine à décoller, l’entreprise envisage un retour au financement participatif pour propulser son ambitieux projet de voiture électrique 100% solaire. Une stratégie risquée, mais qui témoigne d'une vision disruptive dans un paysage automobile en pleine mutation.

Mais au fait, c’est quoi Aptera Motors ? Il s’agit d’une startup basée en Californie. Elle n’est d'ailleurs pas un nouveau venu dans le monde des véhicules innovants. Après une première tentative avortée il y a plus d'une décennie, l'entreprise refait surface en 2019 avec un concept de véhicule pour le moins singulier : un véhicule électrique à trois roues, à l'aérodynamisme optimisé, dont la carrosserie est recouverte de panneaux solaires. L’objectif ? Offrir une autonomie significative grâce à l’énergie solaire, réduisant ainsi, voire supprimant, le besoin de recharges régulières.

Un pari technologique osé qui a séduit un public d’investisseurs particuliers. Grâce au crowdfunding, Aptera a réussi à lever plus de 135 millions de dollars auprès de plus de 17 000 contributeurs, un record pour ce type de financement dans le secteur automobile. Un succès qui témoigne de l'enthousiasme suscité par l’idée d’un véhicule solaire viable, mais aussi de la confiance accordée à l'équipe dirigeante d’Aptera.

Comment produire une telle voiture ?

Cependant, le chemin vers la production de masse est semé d’embûches. Si Aptera a récemment franchi une étape importante en présentant son premier prototype de pré-production , la société fait face à un nouveau défi de taille : le financement de la production à grande échelle. L’entreprise a estimé avoir besoin de 60 millions de dollars supplémentaires pour finaliser le développement et lancer la production en petite série fin 2025.

Pour ce faire, Aptera a mis de côté le financement participatif et s’est tournée vers des investisseurs institutionnels, en partenariat avec le groupe financier US Capital Global. L’objectif était de lever les fonds nécessaires via la vente d’obligations convertibles. Malheureusement, cette stratégie n’a pas rencontré le succès escompté. Selon les documents déposés auprès de la SEC (Securities and Exchange Commission), seuls 400 000 dollars ont été levés à ce jour, soit une fraction infime de l’objectif initial.

Ce manque d'intérêt de la part des grands investisseurs s’explique probablement par la nature risquée et trop innovante du projet Aptera. Le véhicule, avec son design atypique et sa technologie encore peu éprouvée à grande échelle, représente un pari audacieux dans un marché automobile dominé par les géants de l'industrie. Les investisseurs institutionnels, souvent frileux face à l’innovation radicale, préfèrent miser sur des technologies plus matures, comme l’hydrogène, malgré les défis importants liés à sa production et à son stockage.

Les entreprises sont plus frileuses que les investisseurs individuels

Face à ces difficultés, Aptera envisage un retour au financement participatif. Chris Anthony, co-CEO de l'entreprise, a récemment évoqué cette possibilité lors d'une interview avec Sandy Munro, expert renommé de l'industrie automobile. Cette stratégie permettrait à Aptera de s’appuyer sur sa communauté de supporters fidèles, prêts à investir des sommes plus modestes que celles exigées par les investisseurs institutionnels (le minimum d’investissement pour les obligations convertibles étant fixé à 50 000 dollars).

Un retour au crowdfunding pourrait s'avérer judicieux pour Aptera, lui permettant de mobiliser rapidement des fonds et de démontrer l’intérêt du public pour son projet. Cependant, cette approche présente également des risques. Le financement participatif est par nature plus volatile et moins prévisible que les investissements institutionnels. De plus, l’échec de la levée de fonds par obligations convertibles pourrait entacher la confiance des investisseurs particuliers.

L’avenir d’Aptera reste donc incertain. L’entreprise se trouve à un carrefour crucial de son développement. Le succès de son projet repose sur sa capacité à convaincre de nouveaux investisseurs, qu’ils soient institutionnels ou particuliers, du potentiel de sa technologie solaire. Si Aptera parvient à relever ce défi, elle pourrait non seulement révolutionner le marché automobile, mais aussi démontrer la viabilité du solaire comme source d’énergie principale pour les véhicules du futur. Un pari ambitieux, qui mérite d’être suivi de près.

Vont-ils réussir là où la concurrence a échoué ?

L'échec de concurrents comme Sono Motors et Lightyear, également positionnés sur le créneau des voitures solaires, rappelle la difficulté de percer sur ce marché naissant. Les défis technologiques, financiers et réglementaires sont nombreux. Aptera devra redoubler d'efforts pour convaincre qu'elle peut réussir là où d'autres ont échoué. L’entreprise devra notamment démontrer la fiabilité et l'efficacité de sa technologie solaire dans des conditions réelles d'utilisation, ainsi que sa capacité à produire son véhicule à un coût compétitif.

L’enjeu est de taille, non seulement pour Aptera, mais aussi pour l’avenir de la mobilité durable. Si l’entreprise parvient à concrétiser son projet, elle ouvrira la voie à une nouvelle génération de véhicules plus respectueux de l’environnement, moins dépendants des infrastructures de recharge traditionnelles et potentiellement plus accessibles au grand public. Une perspective qui, à l’heure de la transition énergétique, a de quoi séduire.