On peut se poser la question de ce qui se passe en ce moment chez les plateformes de streaming. Entre des films qui sont déclarés "nuls" par les responsable et l'inflation galopante qui touche la plupart des plateformes de SVOD, on peut se poser question de savoir pourquoi les abonnés continuent de rester.
Quand on prend du recul, on peut se demander ce qui se passe dans la tête des consommateurs de plateformes de SVOD. Augmentation des prix, retour de la publicité, contenu avec de moins en moins de têtes d'affiche, on pourrait se dire que l'âge d'or de Netflix, Prime Video et consorts est terminé et que désormais, le temps durs sont à venir.
Mais pourquoi rester abonné alors que l'offre devient de moins en moins attractive ? C'est une question ardue qui demande une bonne pointe de réflexion. Pour tenter d'y répondre, on peut déjà commencer à prendre un peu de hauteur afin de comprendre exactement ce qui se passe dans le domaine de la SVOD et comment ce secteur si attractif est devenu un milieu extrêmement concurrentiel où désormais chaque % de part de marché doit être arrachée avec toute la argne possible.
Plateformes de streaming : un marché de plus en plus concurrentiel
Le marché mondial de la SVOD connaît une croissance sans précédent, atteignant plus de 1,5 milliard d'abonnements en 2023, contre environ 1,3 milliard l'année précédente. Netflix, malgré son statut de pionnier et de leader, voit ses parts de marché progressivement diminuer.
En 2023, la plateforme détenait environ 26 % des parts du marché mondial, contre 31 % en 2020. Cette baisse s'explique notamment par l'arrivée de nouveaux acteurs comme Disney+, qui a franchi le cap des 160 millions d’abonnés en seulement trois ans, et des plateformes comme Peacock (NBC), qui se positionnent comme des challengers sérieux.
En effet, selon des données récentes, Peacock aurait récupéré une partie des abonnés de Netflix en proposant une offre à la fois plus accessible et mieux ciblée.
Les utilisateurs ont désormais l'embarras du choix entre une multitude de plateformes, ce qui fragmente l’audience et rend la fidélisation plus difficile. Selon une étude de Deloitte, environ 44 % des abonnés à un service de SVOD dans le monde envisagent de se désabonner au moins une fois au cours des prochains mois.
Ce "zapping" entre les services pousse les plateformes à constamment renouveler leurs offres et à proposer des contenus exclusifs pour attirer les abonnés.
Cependant, le marché ne se résume pas à une simple bataille de contenus. En 2023, les augmentations tarifaires ont également impacté l'engagement des abonnés. Netflix, par exemple, a augmenté ses prix à plusieurs reprises, son forfait standard passant de 11,99 € à 13,49 € en France. Cette hausse, couplée à la suppression des partages de comptes non autorisés, a permis à Netflix de maintenir ses revenus malgré une croissance plus modérée des abonnements.
La nouvelle stratégie Netflix : plus de films, moins de stars
Face à ces défis, Netflix a entrepris une réorientation stratégique ambitieuse. La plateforme vise à sortir 50 films par an, un chiffre qui a doublé en l’espace de quelques années. Ce volume, bien que colossal, s'accompagne d’une approche plus sélective en matière de casting et de coûts de production.
L'idée est de produire des films de qualité, mais sans nécessairement s'appuyer sur des stars hollywoodiennes au cachet élevé. Ce choix permet de réduire significativement les coûts de production, tout en misant sur des réalisateurs et scénaristes moins connus pour compenser le manque de têtes d'affiche.
Cette approche s'inspire des principes du "lean management", bien connus dans l'industrie automobile ou technologique. Il s'agit de faire plus avec moins, en optimisant les ressources, en éliminant les gaspillages et en concentrant les efforts sur les aspects les plus créatifs et engageants des films.
Par ailleurs, cette stratégie a également un impact sur la perception du catalogue par les abonnés. Selon une étude réalisée par Ampere Analysis, les contenus sans stars n’ont pas affecté la satisfaction des utilisateurs, et 78 % des abonnés affirment que la qualité des séries et des films proposés reste leur critère principal d'abonnement, bien avant la présence de stars. Netflix semble donc réussir ce pari risqué en se focalisant sur la diversité et l’originalité des contenus.
Vers un déclin de la SVOD chez les jeunes générations ?
Malgré cette nouvelle stratégie, le paysage des consommateurs de SVOD est en pleine mutation. Une étude récente de Kantar Worldpanel montre que la moyenne d’âge des abonnés Netflix a progressé, passant de 35 à 39 ans en moyenne en 2023.
Cela suggère que les jeunes adultes, traditionnellement consommateurs de séries à binge-watcher, se détournent peu à peu des plateformes de streaming pour privilégier d'autres formes de divertissement, comme les jeux vidéo ou les réseaux sociaux.
Cette tendance rappelle celle observée pour la télévision linéaire, dont l’audience est de plus en plus vieillissante. Aujourd'hui, l'âge moyen des téléspectateurs de la télévision en France est de 56 ans. Un phénomène similaire pourrait se produire avec les plateformes de SVOD si celles-ci ne parviennent pas à capter l’attention des plus jeunes.
La concurrence des plateformes gratuites, comme YouTube ou TikTok, où les contenus sont plus interactifs et mieux adaptés à une consommation fragmentée, pourrait renforcer cette fuite des jeunes utilisateurs.
En revanche, les abonnés plus âgés, qui apprécient les formats plus classiques et linéaires, continuent de représenter un public stable pour les plateformes. Un sondage Harris Interactive de 2023 révèle que 65 % des abonnés âgés de plus de 50 ans utilisent la SVOD comme leur principal moyen de divertissement. Ce segment de la population, moins enclin à changer ses habitudes, pourrait devenir la cible principale des plateformes dans les années à venir.
Le marché des plateformes de streaming est à un tournant. Alors que les géants comme Netflix tentent de s’adapter en proposant davantage de contenus tout en contrôlant les coûts, le comportement des consommateurs évolue. Les jeunes générations pourraient progressivement se détourner de ces services, au profit de formats plus immersifs et interactifs.
À l’inverse, les consommateurs plus âgés, habitués à un usage linéaire des contenus audiovisuels, continueront probablement à soutenir ce modèle de consommation. L’enjeu pour les plateformes sera de jongler entre ces deux dynamiques, tout en anticipant les tendances de demain pour éviter le même déclin que celui de la télévision traditionnelle.
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