Les « araignées de Mars » observées depuis plus de 20 ans par des scientifiques de la NASA ont enfin dévoilé certains de leurs secrets. Des avancées qui s’avèrent prometteuses pour la suite des explorations de la planète rouge.
Saviez-vous qu’il y a des araignées sur Mars ? On ne parle pas ici de l’insecte qui terrifie bien des personnes, mais d’étranges formations observées depuis plus de 20 ans à la surface de la planète. Au début, ce sont des photographies qui ont dévoilé le mystérieux phénomène, capté par des orbiteurs dès 2003. Des images satellites ont, depuis, capté maintes fois ces déformations du sol, qui peuvent mesurer plus de 1000 mètres de large pour les plus grandes.
Mais jusque-là, personne ne connaissait vraiment l’origine de ces formations géologiques. La NASA l’expliquait d’ailleurs elle-même : « personne ne sait vraiment comment ces caractéristiques géologiques ont été créées ». Mais une étude très récente, publiée le 11 septembre 2024, donne de nouvelles informations sur ce phénomène.
Les araignées de Mars recréées sur Terre
Dans un article publié dans The Planetary Science Journal , on apprend que des scientifiques de la NASA sont parvenus à recréer, sur Terre, ces araignées noires et un peu terrifiantes qui parsèment la surface de Mars. Pour cela, ils ont créé une chambre spéciale au sein du laboratoire, afin d’imiter le plus précisément possible le sol et les conditions de la planète rouge.
En parvenant à recréer fidèlement une araignée martienne sur Terre, les scientifiques sont parvenus à comprendre leur origine. Il s’agit en réalité de formations générées par la sublimation du dioxyde de carbone (CO2) présent à la surface de la planète, c’est-à-dire la phase où il passe de l’état solide à l’état gazeux sans passer par l’état liquide.
Une explosion de joie face à cette découverte
Lauren McKeown, géomorphologue planétaire au Jet Propulsion Laboratory (JPL) de la NASA en Californie, est la principale auteure de l’étude. Elle explique avoir travaillé cinq ans pour recréer les araignées martiennes, et au moment d’obtenir enfin le résultat désiré, elle a sauté de joie. « C’était un vendredi soir, et le responsable du laboratoire a fait irruption après m’avoir entendue crier », explique-t-elle dans un communiqué. « Il pensait qu’il y avait eu un accident. »
C’est Lauren McKeown qui, en 2021, a été la première à expliquer comment se forment ces araignées, via un processus connu sous le nom de modèle de Kieffer : pendant le printemps martien, la lumière du soleil traverse des plaques de glace de CO2 à la surface, ce qui réchauffe le sol situé en dessous. Cela provoque la sublimation de la glace en gaz, créant, au passage, une accumulation de pression à l’intérieur des plaques de glace. Lorsque la pression devient trop forte, la glace se fissure et le gaz s’échappe. Lorsque le gaz s’infiltre hors de la glace, il emporte avec lui un flux de poussière et de sable sombres de la surface, laissant des cicatrices en forme d’araignée qui apparaissent lorsque la glace fond complètement pendant l’été martien.
Ce qu’a révélé la reproduction du phénomène sur Terre, c’est une étape qui était inconnue jusque-là : la formation de glace dans le sol le fait se fissurer en même temps que le reste, ce qui peut expliquer la forme des « pattes d’araignées », qui sont en zigzag. « C’est ce genre de détail qui montre que la nature peut être bien plus désordonnée que l’image qu’on en montre dans les livres », résume Serina Diniega, co-auteure de l’étude.
Cette nouvelle découverte ne met pas les expériences autour de ce phénomène à l’arrêt, bien au contraire : désormais, les chercheurs espèrent comprendre pourquoi les araignées de Mars se forment à certains endroits, et pas à d’autres, et pourquoi leur nombre ne semble plus évoluer à l’heure actuelle.