Hidetaka Miyazaki est catégorique… Elden Ring a beau être un chef d'œuvre aux yeux de tous, ce n’est pas “tout à fait” son RPG idéal. Et alors, qu’est-ce qu’il a en tête ? Voici un début de réponse.
Elden Ring a beau être le jeu le mieux noté de l’histoire du studio FromSoftware (d’après Metacritic), pour son président et réalisateur Hidetaka Miyazaki, rien n’y fait, il ne tient pas encore son “RPG de fantasy idéal”. Oui oui, dans une interview accordée à PC Gamer le mois dernier, le papa des Souls affirme que son chef d’œuvre en monde ouvert se “rapproche beaucoup” de ce magnum opus mais que ce n’est pas “tout à fait ça” ! Bon, d’accord... Dans ce cas, qu’est-ce qu’il peut bien avoir en tête pour ce fameux jeu de rôle ? Nous avons épluché tout un tas d’interviews de Miyazaki pour le savoir.
Nouveau monde ouvert
Le président de FromSoftware le dit lui-même : Elden Ring se rapproche de son projet de rêve, donc il convient de prendre le dernier jeu du studio comme point de départ. Dans le fond, c’est quoi Elden Ring ? C’est avant tout un action-RPG exigeant en open world, avec une liberté telle que l’habituelle courbe de progression des Dark Souls et Bloodborne est complètement “tordue”... Ici, si vous butez contre un boss, vous n’avez qu’à explorer une autre partie de la map puis revenir plus tard, plus fort. Une approche qui a valu à Elden Ring la réputation de Souls le plus accessible de la série et qui l’a, c’est certain, porté jusqu’au rang de phénomène mondial (25 millions d’unités vendues aujourd’hui). C’est également une approche dont Miyazaki mesure l’importance, comme il l’explique chez CNET :
Nous (chez FromSoftware, ndlr) avons toujours aimé les jeux et les expériences avec une courbe de difficulté élevée. Mais je pense (...) qu'Elden Ring a réussi à jeter un filet plus large (en matière d’audience) tout en conservant cette courbe d'apprentissage élevée (...) Je pense donc que cette combinaison entre liberté et difficulté deviendra un indice important pour tout ce que nous ferons ensuite - Hidetaka Miyazaki
Cette dernière phrase est importante. Le choix du monde ouvert dans Elden Ring marque une étape majeure pour les action-RPG de FromSoftware, aussi bien en termes d’ouverture d’audience que de pur game design ! À l’image des Zelda “post-Breath of the Willd”, on verrait désormais mal les Souls revenir à une structure linéaire et Miyazaki semble s’en accommoder... Qui plus est, dans une autre interview accordée à PC Gamer, l’homme se dit “vraiment passionné” à l’idée de replonger dans les éléments “qui ne sont pas bien passés” dans le développement d’Elden Ring et de les améliorer sur un “futur titre”. De toute évidence, le prochain Souls pourrait s’appuyer sur les idées de l’Entre-Terre restées à l’état de brouillon et devenir une vision encore plus fine de cet action-RPG en open world.
(Elden Ring)
Savoir où s’améliorer
À l’avenir, la structure en monde ouvert semble donc acquise mais en ce qui concerne la difficulté et certains choix de design, les options paraissent plus ouvertes… Avant même la sortie de l’extension Shadow of the Erdtree (dont le challenge a fait les gros titres), Hidetaka Miyazaki a estimé qu’Elden Ring avait “des efforts à faire” pour aider, directement dans le jeu, les joueurs qui font appel à des guides en ligne. “Nous aimerions essayer d'intégrer davantage ces joueurs par la suite”, affirme-t-il.
Dans le même temps, le président de FromSoftware s’est dit favorable à un mode coopération sans interruption (Elden Ring a une approche au cas par cas en la matière) et quelques jours plus tard, a avoué au Guardian qu’il est “absolument nul aux jeux vidéo”, son dernier bébé inclus... Bref, l’homme a tout à fait conscience que, malgré les claires avancées d’Elden Ring en termes d’accessibilité, des progrès peuvent être faits. Depuis Demon’s Souls, les action-RPG du studio ont été très “cryptiques”.
L’émergence de nouveaux talents
Alors, pourquoi ne pas faire un jeu plus “grand public” ? Chez RollingStone, Miyazaki a exprimé son envie de créer, un jour, un “jeu de rôle japonais traditionnel”. L’extrait manque malheureusement de détails et on sait seulement que le créateur ne se voit pas reprendre une licence de FromSoftware, à l’image d’Otogi, Enchanted Arms ou King’s Field (même si ce dernier a supposément posé les bases de ce que deviendra Demon’s Souls). Il cite cependant une exception : Armored Core, un jeu d’action avec des méchas dont le dernier et sixième épisode en date - Fires of Rubicon - a d’ailleurs récupéré certains codes des Souls ! C’est avec cette licence que Miyazaki a débuté sa carrière chez FromSoft.
Si on ne peut pas nier l’implication du papa de Dark Souls dans le développement d’Armored Core 6 (et c’est bien normal, il en était le réalisateur à la base), il est important de noter que c’est finalement Masaru Yamamura, concepteur principal de Sekiro, qui a chapeauté Fires of Rubicon. Une tâche qu’il a remplie avec brio. À l’époque, nous avions qualifié le gameplay de cet opus “d’assez irréprochable”.
(Masaru Yamamura)
Tout ça pour dire qu’il n’y a pas que Miyazaki chez FromSoftware et le président le dit lui-même chez RollingStone : à l’avenir, il faut s’attendre à d’autres jeux maison réalisés par de nouveaux talents. Le big boss se dit même prêt à essuyer des échecs commerciaux pour “aider ses équipes à grandir”, à l'image de ce qu'il avait connu à ses débuts, avec Demon’s Souls. Dans le même article, il ajoute :
L'ampleur d’Elden Ring a naturellement augmenté notre vivier de talents (...) Nous voulons absolument tirer parti de cette croissance et l'appliquer à tout ce qui viendra par la suite, avec différents réalisateurs et concepteurs de jeux - Hidetaka Miyazaki
Laissez la main, mais pas trop
Cependant, ne vous attendez pas à voir Hidetaka Miyazaki s’effacer du jour au lendemain... Comme l’explique l’homme (toujours sur RollingStone), après 10 ans à la tête de FromSoftware à seulement 50 ans, environ 95% de son temps reste consacré à la création et à la direction de jeux. “En utilisant ce ratio, on peut dire que je n’ai que six mois d’expérience en tant que cadre”, blague-t-il. C’est donc certain, les lubies du créatif - fan de jeux de rôle et lecteur assidu pendant son enfance - ne vont pas disparaître comme ça. Mais elles seront peut-être remodelées par de nouveaux talents, à l’image de Masaru Yamamura. Une voie qui pourrait d’ailleurs retirer une épine du pied à Miyazaki. “Une chose (...) qui rend difficile la réalisation de mon RPG idéal, c'est que lorsque j'y joue, je sais tout ce qu’il va se passer”. Et hop, mettez un autre réalisateur aux commandes du projet et le problème sera réglé !
