Le classement des sites web les plus visités du monde est actualisé très régulièrement et cela fait quelques années qu'il ne bouge pas beaucoup. Pourtant, le classement du mois de mai 2024 a fait parler de lui sur X (ex Twitter)... pourquoi ? Parce que le monde est en train de se rendre compte que l'internet français est porté par "2 sites de gros clébards".
Les États-Unis, rois de l'internet mondial
Le web a beau être un espace immense, la plupart des gens naviguent en boucle sur les mêmes sites. Cette hyper-centralisation d'internet avantage l'empire américain, plus que dominant. Sur les 10 sites Web les plus visités du monde, 8 sont américains et l'Oncle Sam rafle les 5 premières places. Le géant Alphabet, qui possède Google et YouTube, engrange à lui seul plus de 120 milliards de visites mensuelles. C'est très loin devant son rival et compatriote Meta (Facebook, Instagram, WhatsApp...) qui arrive deuxième avec 27 milliards de consultations.
Cette domination américaine ne s'est pas faite par magie. Elle s'explique par plusieurs facteurs historiques, économiques et culturels. Les États-Unis ont joué un rôle pionnier dans l'invention d'Internet et le développement des technologies clés (protocoles, serveurs, etc.). Dès les années 1960, le département américain de la Défense finance le développement d'ARPANET, le réseau précurseur d'Internet. Dans les années 1980, la National Science Foundation (NSF) prend le relais et contribue à la création du World Wide Web. Les universités et centres de recherche américains restent à la pointe de l'innovation dans le domaine d'Internet, alimentant un cercle vertueux d'invention et d'entrepreneuriat.
Sur cette base solide, les États-Unis ont vu naître les plus grandes entreprises technologiques du monde, qui ont su tirer parti d'Internet pour devenir des géants mondiaux. Google, Amazon, Meta (Facebook), Apple et Microsoft dominent leurs marchés respectifs et captent une part colossale des revenus publicitaires en ligne. Ces entreprises ont des moyens financiers colossaux leur permettant d'innover en permanence et de racheter des concurrents potentiels.
La présence de la Chine, de la France et du reste du monde sur la toile
Les autres pays se font écraser. En additionnant le nombre de visites mensuelles des 11 sites américains présents dans le top 20 publié par Statista, on compte 162,9 milliards de clics. Le deuxième pays le plus puissant du monde, c'est la Chine. L'Empire du Milieu ne possède pourtant que 2 sites dans le top 20 mondial : Baidu, le "Google chinois" et TikTok. En additionnant le nombre de visites mensuelles de Baidu et celles de TikTok, cela ne fait que 7,4 milliards de clics, soit pile 22 fois moins que le total américain.
Cocorico ! Belle surprise pour notre petit pays ! Même si la France est nettement moins forte économiquement et moins peuplée que la Chine ou les États-Unis, sachez que 2 sites Web français se hissent dans le top 20 mondial. Ils portent la France et font de nous le 3è pays le plus puissant sur internet. Problème : nos deux sites star ne sont pas des réseaux sociaux ou des moteurs de recherche mais... des sites de fesses. Notre réputation de pays de gros lourds ne risque pas de s'arranger : ce tweet est à 214 000 vues en moins de 5 jours.
2 sites français dans le top, 2 sites de gros clebard, elle est là la French tech pic.twitter.com/2lqZMte5dy
— Élio (@betteraskelio) June 28, 2024
Les conséquences de la domination américaine sur l'internet mondial
Voilà ce à quoi nous en sommes réduits. Pour faire face à la superpuissance américaine, il n'y a presque rien. Dans ce top 20, les seuls sites qui n'appartiennent pas à une entreprise américaine sont :
- 3 sites X.
- 2 moteurs de recherche utilisés par des pays qui bannissent Google.
- 1 seul réseau social... TikTok.
C'est ridicule. La prédominance des plateformes et des services américains risque de conduire à un internet uniforme, dominé par la culture et les valeurs américaines. Cela peut se traduire par une marginalisation des cultures locales et une perte de diversité dans les contenus et les points de vue disponibles en ligne.
La collecte massive de données par les entreprises américaines soulève aussi des questions de souveraineté et de contrôle d'internet. Les gouvernements des autres pays s'inquiètent de la dépendance de leurs citoyens vis-à-vis des plateformes américaines et de la possibilité que ces données soient utilisées à des fins politiques ou économiques. Il est de bon ton de s'inquiéter de la gestion des données des entreprises chinoises, la question se pose étrangement moins lorsqu'il s'agit de l'Oncle Sam.
Cette domination est aussi un frein à l'innovation. Les startups locales peuvent avoir du mal à faire concurrence aux géants américains, et les gouvernements perdent des recettes fiscales importantes. Et puis, dès qu'une pépite arrive à faire parler d'elle, comme le réseau social français BeReal par exemple, elle finit par se faire racheter.
Enfin, la concentration du pouvoir entre les mains de quelques entreprises américaines peut avoir un impact négatif sur l'accès à l'information et la liberté d'expression. Ces entreprises ont le pouvoir de censurer des contenus, de manipuler les algorithmes de recommandation et de diffuser de la désinformation. On le voit très clairement dans la gestion de Twitch, YouTube ou X par exemple. Un nouvel internet est il possible ? Difficile de l'imaginer.