Les adolescents sont de plus en plus connectés. C'est normal, les temps changent et les plateformes en lignes prennent de plus en plus de place dans le monde. Jeux vidéo en ligne, réseaux sociaux... tout le monde se bat pour un peu de temps de cerveau disponible. Cette tendance suscite une inquiétude croissante parmi les parents et les professionnels de la santé mentale. Une nouvelle étude, publiée dans le journal PLOS Mental Health, apporte des preuves concrètes des effets néfastes de cette addiction sur les jeunes cerveaux.
Des perturbations dans les fonctions cérébrales essentielles
L'étude qui nous intéresse aujourd'hui est ce qu'on appelle une méta-analyse, il n'existe rien de plus solide dans le champs académique. En clair, il s'agit d'une sorte de compilation de plusieurs autres publications scientifiques afin de dresser un bilan, un état de l'art, et, si possible, un consensus scientifique. Ainsi, 12 études de neuroimagerie réalisées entre 2013 et 2022 sur plusieurs centaines d'adolescents âgés de 10 à 19 ans ont été passées à la loupe. En recoupant les infos, les chercheurs américains arrivent à une conclusion claire : l'addiction à Internet perturbe de manière significative la signalisation entre les régions du cerveau responsables du contrôle de l'attention, de la mémoire de travail et d'autres fonctions exécutives cruciales.
Selon Max Chang, premier auteur de l'étude et gestionnaire de cas à la Peninsula Family Service de San Francisco, l'addiction à Internet est caractérisée par 3 choses :
- Une préoccupation persistante, une envie frénétique et irrésistible de se connecter
- Des symptômes de sevrage similaires à ceux d'autres drogues lorsqu'on coupe Internet
- Le sacrifice de relations personnelles pour passer plus de temps en ligne.
Comme pour toutes les addictions, ces comportements entraînent une détresse significative et une altération de la vie quotidienne des individus concernés. Ce constat va dans le sens des déclarations de l'OMS qui reconnait officiellement depuis 2019 un "trouble du jeu vidéo". On peut s'attendre, à terme, que ce trouble soit étendu à une forme d'addiction au web de façon générale.
Les participants à l'étude, diagnostiqués cliniquement comme étant dépendants d'Internet, ont montré des signes de perturbation notable dans les régions de leur cerveau lorsqu'ils engageaient des activités nécessitant une attention soutenue, des tâches de planification, ou des prises de décision rapide. Les chercheurs ont également relevé des difficultés à contrôler certaines pulsions émotionnelles. Tous ces éléments mis bout-à-bout peuvent gravement affecter le quotidien des ados.
Cependant, il convient de noter que cette étude présente certaines limites. Dr. David Ellis, scientifique comportemental à l'Institut pour la Sécurité Digitale et le Comportement de l'Université de Bath, souligne que l'étude n'établit pas de relation causale entre l'addiction à Internet et les perturbations cérébrales observées. Comme on dit souvent : corrélation n'est pas forcément causalité. Enfin, notons que les critères qui définissent l'addiction à Internet ne sont pas universellement acceptées, ce qui pourrait influencer l'interprétation des résultats.
Les perspectives de traitement et de prévention
Face à ces résultats préoccupants, la question de savoir comment traiter et prévenir l'addiction à Internet chez les adolescents devient cruciale. D'après le docteur Smita Das, psychiatre spécialisée en addiction et professeur associé à la Stanford Medicine, l'addiction à Internet peut vraiment être comparée à l'addiction aux substances. Ainsi, nous avons déjà des pistes pour luter contre cette nouvelle préoccupation sanitaire.
Pourquoi un tel constat ? Tout simplement parce que motifs de connectivité fonctionnelle dans les cerveaux des adolescents dépendants d'Internet ressemblent à ceux observés chez les personnes souffrant d'autres addictions plus "classiques", comme l'indique Dr. Caglar Yildirim, professeur associé à l'Université Northeastern à Boston. Pour le dire simplement, on observe des changements cérébraux similaires dans les deux cas.
Pour les parents inquiets, il est essentiel de surveiller certains comportements chez leurs adolescents, tels que le retrait des relations sociales. Encourager les adolescents à s'engager dans des activités hors ligne est important. Comme pour toutes les addictions, il vaut mieux prévenir que guérir. S'il est déjà trop tard, sachez que certaines méthodes psy éprouvées scientifiquement comme les thérapies cognitivo-comportementales, la pleine conscience et l'entretien motivationnel, peuvent être efficaces pour traiter l'addiction à Internet.
Dans les cas sévères, un psychiatre peut même recommander des médicaments pour traiter certains types d'addictions technologiques. Il est également crucial de prêter attention à d'autres troubles de santé mentale sous-jacents qui pourraient nécessiter un traitement parallèle. On observe souvent des cas de comorbidités.
Source : CNN