Contrairement à ce que l’on pourrait croire, les intelligences artificielles ne sont pas totalement autonomes : elles nécessitent des interventions humaines pour apprendre. Un emploi souvent très pénible, mais aussi très mal rémunéré.
Les intelligences artificielles comme ChatGPT, Dall-E, Copilot, Gemini ou Claude 3 nous donnent souvent l’impression de se débrouiller seules : on peut imaginer qu’il s’agit de programmes stockés sur des serveurs, qui n’ont pas vraiment besoin d’interventions humaines pour fonctionner. Cependant, cette idée s’avère complètement fausse : les IA n’étant pas (encore ?) conscientes, elles ont besoin que des êtres humains les guident vers ce qui est bien et ce qui est mal.
Telle est la mission de milliers d’employés des entreprises qui misent sur l’IA depuis quelque temps. Ces derniers se retrouvent à lire des prompts souvent sombres et morbides à longueur de journée, dans le but de les analyser et de préciser à l’IA en quoi ces textes sont problématiques, pour éviter qu’elle y réponde de manière affirmative par la suite.
Un travail payé à peine 150 euros par mois
Interrogé par France TV Info, Mophat Okinyi, un Kenyan, a travaillé dans l’ombre d’OpenAI (ChatGPT) dans une entreprise de traitement de données pendant plusieurs années. Il était payé l’équivalent de 150 euros par mois pour relire, tous les jours, « des descriptions graphiques de viol, d’inceste, de nécrophilie… ». Depuis, cet homme a changé d’emploi, mais il avoue être toujours hanté parce qu’il a pu lire sur son écran lors de cette mission.
Tout comme les équipes de modération des réseaux sociaux comme Facebook, Instagram ou X, les employés en charge de ces tâches sont généralement localisés dans les pays pauvres comme le Venezuela, les Philippines, Madagascar, le Pakistan… En septembre 2023, une enquête de World Bank estimait que le nombre de travailleurs en ligne de ce genre se situe entre 154 et 435 millions de personnes : la fourchette est gigantesque, tout simplement parce que les entreprises qui exploitent ces travailleurs ne s’en vantent pas et ne communiquent pas sur le sujet.
L’étude explore par ailleurs la dualité de ce type d’emploi qui, d’un côté, soutient l’inclusion en permettant aux jeunes, aux femmes et aux travailleurs peu qualifiés de travailler, tout en apportant peu, voire pas de protection sociale aux personnes concernées.
Des travailleurs de l’ombre totalement indispensables
Ces travailleurs, généralement peu qualifiés et très mal payés, sont pourtant totalement indispensables au fonctionnement de très nombreuses plateformes en ligne. Dans le domaine des intelligences artificielles, ils jouent un rôle crucial, car sans eux, de très nombreux systèmes ne seraient pas suffisamment entraînés et ne fonctionneraient pas. Si l’on parle de ChatGPT et consorts, c’est aussi le cas des IA utilisées par Tesla au sein de ses véhicules, ou encore des algorithmes de reconnaissance d’image de Google, par exemple.
En définitive, à chaque fois que vous utilisez une fonctionnalité numérique qui vous facilite le quotidien, il y a probablement des humains sous-payés derrière. De quoi faire un peu réfléchir.