Il y a quasiment deux décennies de cela, les joueurs PlayStation 2 ont eu, à la fois, une bonne et une (très) mauvaise surprise. Pour faire la promotion de son catalogue et offrir de multiples avant-goûts à la communauté des joueurs, Sony avait l'habitude de faire parvenir des CD-Rom bardés de démonstrations de jeux déjà en vente ou à paraître. Sauf qu’à quelques semaines des fêtes de Noël, Sony et PlayStation ont envoyé, sans le savoir, un cadeau… empoisonné !
La bonne vieille époque des CD dans les magazines de jeux vidéo
Aujourd’hui, plusieurs générations de joueurs pourraient vous parler, une larme au coin de l’oeil, de cette époque où l’on avait la possibilité de mettre la main sur des CD de démonstration ou autres disques promotionnels qui contenaient, comme c’était aussi le cas pour la Nintendo GameCube, une compilation de bandes-annonces. Magazines, paquets de céréales… En matière de jeux vidéo, ces reliques des années 90 font souvent l’effet d’une véritable Madeleine de Proust, remémorant les instants passés devant la console à picorer les jeux à droite à gauche ou à lister les titres que l’on aimerait acquérir dans les mois à venir pour compléter sa bibliothèque. Malgré tout, il y a des réminiscences qui ont laissé un immense goût amer dans la bouche des petits curieux de l’époque.
Comme on le disait, quelques décennies auparavant, les magazines dédiés aux jeux vidéo aimaient bien glisser quelques cadeaux entre la première de couverture et l’emballage plastique qui préservait le périodique d’une vilaine corne aux coins de ses pages. Ça, c’était le temps où les grands constructeurs produisaient leurs propres revues. Dans le cas de PlayStation, nous avions, en France, PlayStation Magazine tandis que de l’autre côté de l’Atlantique, les joueurs avaient le droit, en plus de la version américaine, à une autre petite coquetterie promotionnelle : le PlayStation Underground, une sorte de CD-ROM magazine. Au-delà de parler aux joueurs acquis à sa cause, Sony Computer Entertainment se servait de ces supports de presse pour faire la promotion de son catalogue de jeux vidéo… sans savoir que l’un d’entre eux allait jouer un très mauvais tour à ses acquéreurs.
Un CD rempli de démo PS2 qui a fait scandale à cause d’un terrible bug
Au début des années 2000, le fameux CD-ROM PlayStation Underground n’est plus édité seul et devient partie intégrante du Official U.S. PlayStation Magazine, et ce, jusqu’à la fin de la publication de la revue, quelques années plus tard en 2007. À cet instant, le CD-ROM a la vie sauve mais les joueurs auraient sûrement préféré ne pas croiser sa route en 2004, peu avant la période des vacances de fin d’année. Nous sommes vers la fin du mois de novembre et les joueurs font déjà la liste des jeux qui auront peut-être la chance de se retrouver sous le sapin. Par conséquent, quand le Holiday 2004 Demo Disc arrive dans la boîte aux lettres des membres du fan club PlayStation Underground, c’est du pain béni puisque le disque en question (édité en deux versions, Teen et Mature) regorge de titres d’ores et déjà en vente ou sur le point de sortir.
Pêle-mêle, on peut citer Ratchet & Clank 3 (sous-titré Up your Arsenal, en version originale), Jak 3, ATV Offroad Fury 3, Killzone, Metal Gear Solid 3 : Snake Eater, Area 51, Silent Hill 4 : The Room, Prince of Persia : Warrior Within, Star Wars : Battlefront, Ace Combat 5 : The Unsung War, Spyro : A Hero’s Tail, Crash : Twinsanity, Tak 2 : The Staff of Dreams, The Incredibles ou encore… Viewtiful Joe 2. Contrairement à nous autres européens, censés attendre le 1er avril 2005 pour découvrir ce titre, la version américaine était, elle, d’ores et déjà disponible pour les fêtes de fin d’année au pays de l’Oncle Sam. Sorti initialement sur la GameCube entre juin et octobre 2003 à travers le monde, le premier volet est presque arrivé un an plus tard sur la PS2 de Sony.
Ainsi, en novembre 2004, les joueurs PlayStation, aux États-Unis, n’ont que récemment découvert ce beat’em all incontournable à la patte graphique et ludique incomparable. Forcément, la tentation d'essayer la nouvelle création du réalisateur de Resident Evil 2 et du papa de Devil May Cry est particulièrement forte. Or, celles et ceux qui ont fini par sauter le pas s’en sont énormément mordus les doigts. Au mitan des années 2000, l'entièreté de la vie ainsi que tous les souvenirs d’un joueur de jeux vidéo tiennent dans un tout petit dispositif de forme rectangulaire, la célèbre carte mémoire. Eh oui, vingt ans auparavant, il n’y avait pas encore le cloud pour protéger ses dizaines et dizaines d’heures passées sur les titres de sa bibliothèque vidéoludique, et ça aurait été bien pratique…
Essayer Viewtiful Joe 2 signait la mort de toutes vos sauvegardes de jeux vidéo !
Si, au départ, les démonstrations offertes par le CD-ROM Playstation Underground réservaient de belles surprises, il y en a eu une très mauvaise dans le lot, et ce n'est autre que Viewtiful Joe 2. Et pour cause, cette version d’essai du jeu de Capcom contenait un bug qui a fait scandale puisqu’il supprimait toutes les données des cartes mémoires insérées dans la console ! Imaginez un peu la situation : les joueurs américains, entre deux parties de Grand Theft Auto : San Andreas (sorti le 26 octobre 2004, soit quelques jours auparavant), meurent d’envie de découvrir tout un tas de nouveaux titres avant de passer à la caisse, sauf que ce CD-ROM est sur le point de réduire à néant l’ensemble de leur progression, tout jeux confondus, en raison de la démo de Viewtiful Joe 2… Nul doute que l’arrivée des fêtes de Noël a dû avoir bien du mal à redonner le sourire à ces joueurs PS2 !
Encore aujourd’hui, on peut retrouver tout un tas de messages postés sur de nombreux forums dont le but était de prévenir les joueurs de l’incident qui se produisait lorsqu'on lançait cette fameuse démo de Viewtiful Joe 2. Il y a même de nombreuses vidéos sur YouTube qui ont immortalisé ce glitch à l’origine d’un immense vide dans le cœur des joueurs (et pas que). En l’occurrence, ce qu’il se passait, c’est que les cartes mémoires présentes dans la console étaient infectées par un bug, les rendant corrompues et, par conséquent, inutilisables ultérieurement. La seule manipulation qui permettait de réutiliser le dispositif consistait à formater les cartes mémoires, signant ainsi les adieux définitifs avec les multiples progressions enregistrées jusque-là pendant des mois, voire des années. Évidemment, un tel souci a fait l’objet d’un très gros scandale qui n’a pas mis longtemps avant d’arriver jusqu’aux oreilles de Sony.
De ce que l’on en sait, l’origine de cet incident proviendrait du fait que les développeurs avaient totalement oublié d’inclure un minuteur ainsi qu’un écran de fin, permettant de stopper la démonstration de Viewtiful Joe 2 après un essai de vingt minutes. De son côté, Sony et PlayStation avaient réagi, alertés par les joueurs et les articles de la presse de l’époque, en déclarant qu’il y avait bel et bien « un problème dans la démo (de Viewtiful Joe 2) qui effacera tous les fichiers sauvegardés de votre (vos) carte(s) mémoire(s) ». Au-delà de confirmer le souci, Sony et PlayStation préconisaient aux joueurs de « retirer votre (vos) carte(s) mémoire(s) de votre système de divertissement information PlayStation 2 avant d’insérer le disque de démo Holiday 2004 », le tout en présentant, bien évidemment, ses plus plates et sincères excuses à l’ensemble des joueurs qui ont souffert de ce désagrément. Quoi qu'il en soit, cet incident restera l'un des grands traumatismes des joueurs PlayStation durant les années 2000, et ils ne sont pas près de l'oublier.