Confrontés à l'envolée de la demande en combustible et aux perturbations de l'approvisionnement causées par le conflit en Europe de l’Est, les États-Unis relancent l'exploitation de ses anciennes mines d'uranium.
L'uranium est devenu une ressource stratégique à part entière selon les experts
Bien que les États-Unis aient perdu leur position de leader mondial dans la production d'uranium, ils demeurent en tête en termes de consommation, avec plus de 90 réacteurs nucléaires en fonctionnement. Leur demande en combustible est donc massive, dépassant les 18 000 tonnes pour l'année 2024, ce qui représente plus d'un quart de la demande mondiale.
Cependant, la production nationale ne couvre actuellement que 10 % de ces besoins, créant ainsi une dépendance significative aux importations et posant un défi majeur en termes de sécurité énergétique. Dans ce contexte, la réactivation des anciennes mines d'uranium apparaît comme une solution indispensable pour réduire cette dépendance et assurer un approvisionnement stable en combustible nucléaire.
L'Association des producteurs d'uranium naturel des États-Unis estime que pour relancer de manière significative la production nationale d'uranium d'ici la prochaine décennie, il faudrait ouvrir 8 à 10 nouvelles mines majeures. En plus de développer de nouveaux sites, cette association encourage également la réouverture des mines qui ont été mises en sommeil depuis l'accident de Fukushima en 2011.
Contrairement à quelques années auparavant, le prix de l'uranium n'est plus un obstacle majeur à l'exploitation minière. En effet, après une augmentation progressive, il a dépassé les 100 dollars la livre en janvier 2024, ce qui crée un environnement propice à la relance d'activités autrefois jugées non rentables.
Même si le coût de l'exploitation minière est généralement plus élevé aux États-Unis qu'ailleurs dans le monde, les prix actuels demeurent incitatifs pour les producteurs. Un expert estime que cela resterait vrai même en cas de nouvelle baisse des cours, car l'uranium est maintenant considéré comme une ressource stratégique à part entière. Ainsi, la rentabilité économique n'est plus le principal enjeu comme auparavant. La relance de l'exploitation minière d'uranium aux États-Unis est désormais motivée par d'autres facteurs tels que la sécurité énergétique, la création d'emplois et la réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Cependant, il est crucial de souligner que cette relance ne doit pas se faire au détriment de l'environnement ou des communautés locales. Des mesures strictes doivent être mises en place pour garantir une exploitation minière responsable et durable.
Les États-Unis veulent en finir avec la dépendance énergétique vis-à-vis de la Russie
Cinq entreprises productrices d'uranium ont déjà pris des mesures concrètes pour relancer l'exploitation minière aux États-Unis, annonçant la réouverture de mines au Texas, au Wyoming, en Arizona et en Utah. Parmi ces entreprises figurent Uranium Energy Corp, Ur-Energy et Energy Fuels.
Cependant, ces cinq acteurs sont considérés comme des acteurs mineurs dans l'industrie, et leur production cumulée ne devrait représenter qu'une part relativement faible de la production nationale totale d'uranium. Néanmoins, ces initiatives constituent un premier pas important vers la relance de l'industrie minière d'uranium aux États-Unis, et pourraient encourager d'autres entreprises à investir dans ce secteur et à lancer de nouveaux projets d'exploitation.
La réouverture des anciennes mines d'uranium, même si elle ne concerne que des volumes limités, s'inscrit dans une stratégie visant à renforcer la sécurité des approvisionnements en combustible nucléaire, position défendue par le secteur de l'uranium aux États-Unis. L'objectif principal est de réduire la dépendance du pays à l'égard de l'uranium russe, qui représente une part importante des importations d'uranium aux États-Unis. De plus, le contexte géopolitique actuel en Europe de l’Est incite à diversifier les sources d'approvisionnement et à limiter les risques liés à une dépendance excessive à un seul pays.
Un autre objectif est de faire face à une éventuelle baisse des approvisionnements en provenance du Kazakhstan, qui fournit actuellement environ un quart du combustible nucléaire utilisé aux États-Unis. La situation politique et économique au Kazakhstan est donc un facteur important à prendre en compte.
Le défi est colossal. En 2022, la Russie, le Kazakhstan et l'Ouzbékistan ont représenté près de la moitié des importations d'uranium aux États-Unis. Bien que la relance de l'industrie minière nationale ne puisse pas combler entièrement cette dépendance, elle peut contribuer de manière significative à sa réduction.
Source : RFI