Au Japon, cette exclusivité Nintendo Switch s'est vendue à plus de 4 millions d'exemplaires, soit plus que Super Mario Odyssey et The Legend of Zelda : Breath of the Wild là-bas. Pourtant, ce titre est totalement inconnu chez nous. Comment expliquer un tel carton ? On vous raconte l'histoire de ce jeu typiquement japonais.
Lancé le 19 novembre 2020 au Japon, Momotaro Dentetsu : Showa, Heisei, Reiwa mo Teiban! a été un succès immédiat dans l'archipel. 750 000 unités écoulées dès le mois de décembre, 2 millions en janvier 2021, 3 millions en juin 2021... jusqu'à dépasser les 4 millions d'exemplaires en juillet 2023. Pour son éditeur, Konami, cela représente la plus grosse vente d'un jeu dans le territoire nippon, toutes plateformes confondues. Oui, plus que des épisodes issus de licences cultes comme Silent Hill, Metal Gear Solid, Castlevania, PES ou encore Yu-Gi-Oh!.
Mais comment expliquer un tel carton alors qu'il ne s'agit... que d'un jeu de plateau, mais en jeu vidéo ? En réalité, Momotaro Dentetsu est représentatif de ce genre de titres qui rencontre un énorme succès au Japon, mais qui n'ont que peu de chance de rencontrer une même réception dans le monde entier.
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Licence culte au Japon, inconnue en Occident
Momotaro Dentetsu : Showa, Heisei, Reiwa mo Teiban!, que l'on peut traduire en anglais par "Momotarō Electric Railway: a classic of the Showa, Heisei and even Reiwa era!", est donc le dernier épisode d'une longue série de jeux vidéo de plateau, le 23ème pour être précis. Au départ, le tout premier opus, Momotaro Densetsu, est sorti en 1988 sur Famicom, la NES japonaise, et il s'agit d'un spin-off d'une série du même nom, aussi développée par Hudson Soft que l'on connaît pour les Bomberman. Et le plus drôle dans tout ça, c'est que la formule n'a pas tant évolué que ça depuis ses débuts.
Globalement, le principe reste le même : chaque joueur avance en train, bateau ou en avion après avoir lancé un dé avec pour but d'amasser le plus de richesses avant la fin de la partie pour gagner. Le plateau est découpé en cases qui représentent le réseau ferroviaire japonais. Pour s'enrichir, il faut tomber sur certaines cases qui donnent de l'argent, acquérir des commerces ou des propriétés, faire des transactions et traiter avec les autres entrepreneurs. Pour se faciliter la vie ou gêner celles de ses adversaires, des cartes peuvent être utilisées, tandis que des esprits peuvent aussi faire leurs apparitions. Si on veut résumer les choses simplement, cela a de quoi rappeler le Monopoly pour nous autres Occidentaux, mais avec de nombreuses spécificités qui rendent le tout beaucoup plus fun à jouer.
Famicom, Super Famicom, Game Gear, Game Boy, PlayStation, PlayStation 2, Wii, Nintendo DS, Xbox 360, PSP, Nintendo 3DS... La majeure partie des consoles importantes de ces dernières décennies ont eu droit à leur version de Momotaro Densetsu. Malgré tout ça, la licence n'a jamais quitté le Japon et a failli ne plus être active de nos jours. En 2012, Konami absorbe Hudson Soft et acquiert donc les droits de la franchise. Mais en 2015, Akira Sakuma, son créateur, déclare que la série est officiellement et quitte Konami. Pourtant, avec l'aide de Nintendo, Konami décide de développer de nouveaux jeux. Si un épisode inédit sort en 2016 sur 3DS et rencontre un certain succès, la saga est de nouveau mise en pause dans la foulée... jusqu'en 2020.
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Un jeu équilibré d'une accessibilité implacable
Momotaro Dentetsu : Showa, Heisei, Reiwa mo Teiban! sort donc en 2020 en exclusivité sur Nintendo Switch avec le succès que lui connaît. Pour remettre les choses en perspectives, il faut se rendre compte que le titre s'est plus vendu dans l'archipel que les jeux les plus connus de la console comme The Legend of Zelda : Breath of the Wild ou Super Mario Odyssey. Mais comment expliquer un tel carton aussi incompréhensible pour un simple jeu de plateau ?
Tout d'abord, la grande force de Momotaro Dentetsu est qu'il s'adresse à n'importe qui car il s'agit plus d'un jeu de plateau qu'un jeu vidéo. Pas besoin de savoir utiliser une manette pour en profiter, tout le monde est au même niveau, ce qui n'est pas sans rappeler le succès de la Wii. C'est d'autant plus vrai que l'expérience est particulièrement équilibrée puisque le jeu fait toujours en sorte que personne ne soit trop devant ou trop derrière pour éviter que la partie n'ait plus d'intérêt. Et puis, les sessions sont aussi agréables car on peut en choisir la durée, ce qui empêche les parties interminables où les gens décident d'arrêter d'eux-mêmes. Rien que par ces deux points, Momotaro Densetsu parvient à corriger deux défauts majeurs du Monopoly pour être beaucoup plus sympathique.
Au-delà de son aspect purement ludique très réussi, Momotaro Dentetsu brille aussi par son enrobage typiquement japonais qui explique son carton dans l'archipel. Tout d'abord, le Japon dans son ensemble y est célébré car le plateau regorge de détails régionaux à travers les stations représentés par des cases, ce qui témoigne d'une vraie affection pour ces lieux. Ensuite, le titre met en scène des personnages dans un style kawai (mignon) et chibi (style enfantin, version plus jeune) qui transpire la bonne humeur, ce qui le rend accessible à toute la famille.
Ce côté enthousiaste se ressent jusque dans les bulles de texte qui sont joyeuses et chaleureuses, ce qui confère une bonne ambiance globale au titre. Il faut dire qu'au moment de son lancement, c'est bien ce dont les gens avaient besoin. Et oui, Momotaro Dentetsu : Showa, Heisei, Reiwa mo Teiban! est sorti fin 2020, soit en pleine période de confinement ce qui a aidé les ventes du jeu, exactement comme pour Animal Crossing : New Horizons. Et puisque le titre propose également de jouer en ligne, toutes les conditions étaient réunies pour faire de ce jeu de plateau l'expérience idéale en famille, même à distance.
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Face à un tel succès, Momotaro Densetsu sur Nintendo Switch a donné des idées à d'autres éditeurs japonais. Ainsi, c'est pour cette raison que Bandai Namco a récemment annoncé Demon Slayer: Kimetsu no Yaiba – Mezase! Saikyou Taishi!, un jeu de plateau dans l'univers de Demon Slayer. Et si vous aussi vous avez été surpris par cette annonce, maintenant vous connaissez la motivation de l'existence de ce titre.
Pour autant, Konami ne va se laisser faire non plus puisque le 16 novembre dernier est sorti Momotaro Dentetsu World : Chikyû wa Kibô de Mawatteru !, toujours en exclusivité sur Nintendo Switch. À l'heure où sont écrit ses lignes, cette suite est bien partie pour être un nouveau carton puisqu'il s'est déjà évcoulé à plus de 300 000 exemplaires une semaine après sa sortie, encore plus que Super Mario RPG dans l'archipel. Reste à savoir s'il fera mieux que The Legend of Zelda : Tears of the Kingdom et Super Mario Bros. Wonder au Japon !