La mission Euclid de l’ESA a quitté la Terre le 1er juillet dernier. Ce lancement n’est que le début d’un ambitieux projet qui cherche à percer les mystères de la matière noire et de l’énergie noire, qui constituent 95% de notre univers.
Le samedi 1er juillet dernier, la base de Cap Canaveral située en Floride a vu décoller une fusée Falcon9 de SpaceX dotée, à son bord, d’une ambitieuse mission européenne. Euclid est, en effet, un télescope spatial mis sur pied par l’ESA, dont l’objectif est de découvrir la nature de la matière noire et l’énergie noire, deux composants de notre univers qui conservent, pour l’heure, tous leurs secrets.
À l’origine, la mission Euclid aurait dû décoller début 2023 depuis une fusée Soyouz, mais l’initiative a été fortement retardée en raison de la guerre entre l’Ukraine et la Russie. Mais si le décollage accuse quelques mois de retard, les ambitions, elles, sont les mêmes.
Quel est l’objectif de la mission Euclid ?
Le télescope spatial Euclid est actuellement en route vers le point de Lagrange L2 du système Terre-Soleil, situé à 1,5 million de kilomètres de la Terre. C’est là que se trouvent également le télescope James Webb, ainsi que le satellite Gaia. Lorsqu’il aura atteint son orbite, Euclid aura alors pour objectif de scanner environ un tiers du ciel pendant six ans, pour réaliser une carte de l’univers en trois dimensions.
Pour arriver à ses fins, Euclid possède deux instruments de choix : un télescope de 1,2 mètre de diamètre dans le visible, et un spectromètre dans l’infrarouge. « Euclid observera des milliards de galaxies jusqu’à 10 milliards d’années-lumière afin de créer la carte 3D la plus grande et la plus précise de l’Univers, et dont la troisième dimension représentera le temps lui-même », explique l’ESA. « Cette carte détaillée de la forme, de la position et du mouvement des galaxies révélera comment la matière se distribue sur d’immenses distances et comment l’expansion de l’Univers a évolué au cours de l’histoire cosmique, ce qui permettra aux astronomes de déduire les propriétés de l’énergie noire et de la matière noire. »
#ESAEuclid will observe more than a third of the sky during its mission. The areas that Euclid will observe are marked with grey in this Gif. pic.twitter.com/fF4cgRCJpe
— ESA's Euclid mission (@ESA_Euclid) June 22, 2023
Dans l’espace, la matière forme une « toile cosmique » dont l’étendue reste un mystère à l’heure actuelle. Euclid devrait permet permettre d’en cerner l’étendue comme jamais cela a été fait auparavant. Mais ce n’est pas tout : le télescope spatial devrait aussi permettre de comprendre comment cette toile a évolué au fil du temps, sous l’influence de la matière noire et de l’énergie noire. Pour cela, il va observer jusqu’à 10 milliards d’années-lumière en arrière. Un voyage dans le temps inédit : pour rappel, le Big Bang est survenu il y a 13,7 milliards d’années.
Qu’est-ce que la matière noire et l’énergie noire ?
Ces termes semblent sortis d’un univers de science-fiction, et pourtant, il s’agit de composantes concrètes de l’univers. Seulement, on ne sait pas grand-chose à leur sujet. La matière noire est une « mystérieuse substance cosmique invisible qui ne rayonne pas, n’absorbe pas et ne réfléchit pas la lumière », explique le New York Times. Cela explique en grande partie pourquoi les scientifiques ne parviennent pas à la détecter. Cependant, son existence est avérée, en raison de son influence gravitationnelle sur le mouvement des galaxies. L’énergie noire, quant à elle, est « une force encore plus énigmatique qui pousse les galaxies à s’éloigner, au point que notre univers se dilate à un rythme accéléré ».
En résumé, on ne sait quasiment rien de ces deux composantes de l’univers, si ce n’est qu’elles existent. La mission d’Euclid devrait permettre d’en apprendre beaucoup sur la matière noire et l’énergie noire : les données récoltées par le télescope devraient représenter « une mine d’or pour tous les domaines de l’astronomie pendant plusieurs décennies », estime Yannick Mellier, responsable du consortium Euclid et astronome à l’Institut d’Astrophysique de Paris, interrogé par The Guardian. Un consortium a déjà été formé pour analyser les données récoltées par Euclid : il se compose de plus de 2000 scientifiques venus d’Europe, des États-Unis, du Canada et du Japon. On peut s’attendre à des révélations passionnantes dans les années à venir.