Samedi dernier, le marché des cryptomonnaies a été secoué par un effondrement soudain de certaines d'entre elles. Cette chute a suscité des interrogations et des inquiétudes chez de nombreux investisseurs. Voici les raisons qui peuvent expliquer en partie cette baisse significative.
Les États-Unis s'attaquent au secteur crypto
L'une des principales raisons de cet effondrement est probablement la série d'accusations portées par la Securities and Exchange Commission (SEC) contre deux colosses de la crypto.
Ce phénomène n'est malheureusement pas nouveau. Depuis des années, le gendarme financier voit d'un mauvais œil le développement des cryptos et de ses acteurs sur le sol américain. La semaine dernière, le régulateur a passé la seconde en assignant en justice deux géants des cryptomonnaies, répondant au nom de Coinbase et Binance US.
Ces deux entreprises sont des exchanges de cryptomonnaies. En d'autres termes, ce sont des crypto-bourses sur lesquelles les utilisateurs peuvent se procurer des monnaies virtuelles en échange de monnaie traditionnelle (euro, dollar...).
Dans ses dépôts de plainte, la SEC a accusé ces acteurs influents de proposer une vingtaine de cryptomonnaies considérées comme des "titres financiers non enregistrés", entre autres.
Mais qu'est-ce qu'un "security" et pourquoi cela pose-t-il problème ?
Concrètement, le régulateur estime que ces cryptos sont des valeurs mobilières (securities), et proposer ce type d'actif aux États-Unis sans enregistrement est illégal.
Un "security" est un terme utilisé pour désigner un titre financier négociable, tel qu'une action ou une obligation, qui donne des droits à son propriétaire.Ces valeurs mobilières sont soumises à des réglementations strictes afin de protéger les investisseurs. Elles nécessitent donc un enregistrement auprès des autorités compétentes.
Or, dans le cas de cette affaire, la SEC a récemment qualifié 68 cryptomonnaies comme des "securities", dont certaines sont disponibles sur Binance US et Coinbase - ce qui a conduit inexorablement aux poursuites des plateformes. Parmi les cryptos concernées, on retrouve :
- Binance coin (BNB)
- Solana (SOL)
- Cardano (ADA)
- Decentraland (MANA)
- Chiliz (CHZ)
- Cosmos (ATOM)
- Axie Infinity (AXS)
- Polygon (MATIC)
- Algorand (ALGO)
- Et tant d'autres...
List of Cryptocurrencies Considered as Securities by SEC
— CryptoRank.io (@CryptoRank_io) June 8, 2023
The number of tokens labeled as securities by the US SEC has risen to around 55 (excluding 13 tokenized stocks), following the inclusion of additional ones in the Binance and Coinbase lawsuit.
👉 https://t.co/kxGcSxi3Gm pic.twitter.com/kA5pzHavOY
Lorsque la SEC qualifie ces cryptomonnaies de "securities", elle considère que celles-ci remplissent les critères spécifiques pour être réglementées en tant que valeurs mobilières. De ce fait, les émetteurs de ces cryptomonnaies doivent se conformer aux lois prévues à cet effet, tels que l'enregistrement auprès de la SEC et la divulgation d'informations financières.
Étant donné que ces allégations concernent plus de 100 milliards de dollars, la réaction du marché crypto ne s'est pas faite attendre. En une semaine, plusieurs des cryptos concernées par cette histoire ont chuté significativement.
Les plateformes subissent aussi la situation. Binance US a perdu près de 80% de part de marché depuis le blocage des dépôts et retraits selon l'organisme d’analyse Kaiko.
L'écosystème crypto contre-attaque
Ainsi, la bataille entre le monde de la crypto et la SEC est devenue un véritable bras de fer. Les audiences judiciaires sont suivies de près car elles pourraient avoir une incidence sur le marché des cryptos, comme cela a été le cas samedi dernier.
D'ailleurs, certains acteurs cryptos prennent les devants. C'est le cas de Binance US qui s'est entouré d'un ancien codirecteur de la SEC en la personne de George Canellos.
Solana, 10e cryptomonnaie au classement, se défend quant à elle d'être un "security".
The Solana Foundation disagrees with the characterization of SOL as a security. We welcome the continued engagement of policymakers as constructive partners on regulation to achieve legal clarity on these issues for the thousands of entrepreneurs across the U.S. building in the…
— Solana Foundation (@SolanaFndn) June 10, 2023
"La Fondation Solana n'est pas d'accord avec la caractérisation du SOL comme un security. Nous saluons l'engagement continu des décideurs politiques en tant que partenaires constructifs sur la réglementation afin d'obtenir une clarté juridique sur ces questions pour les milliers d'entrepreneurs à travers les États-Unis qui travaillent dans le secteur des actifs numériques."
Ce n'est que le début de cette affaire de grande envergure. Cependant, ce n'est pas la première fois que des interrogations similaires planent sur le secteur.
La première crypto à avoir été visée par la SEC est le XRP. En 2020, le régulateur accusait déjà Ripple, l'émetteur du XRP, d'avoir vendu cette crypto comme un titre non enregistré. Le procès de cette affaire dure depuis bientôt 3 ans et semble être le point de départ des récentes procédures à l'encontre de l'ensemble de l'écosystème des cryptomonnaies.