Depuis plusieurs années, les orques, aussi appelées « baleines tueuses », se sont mises à attaquer les bateaux qui circulent sur les côtes européennes et africaines. Des scientifiques ont étudié le comportement de ces créatures marines pour comprendre son origine.
Depuis 2020, le nombre de navires en tout genre qui indiquent avoir été attaqués par des épaulards, ou orques, ne cesse d’augmenter. À la fin du mois de mai, un groupe d’orques est venu percuter le voilier « Mustique » alors qu’il naviguait dans le détroit de Gibraltar. Si l’équipage s’en est sorti indemne, le bateau, lui, a eu sa coque percée et son gouvernail cassé. Les quatre personnes à bord n’ont pas eu d’autre choix que de contacter les autorités espagnoles pour un sauvetage dans les règles.
D’autres situations similaires ont été constatées dans la même période. Quelques semaines plus tôt, c’est un autre voilier, l’Alborán Champagne, qui avait connu un sort similaire au large de Barbate, une ville d’Espagne. Et cette fois-ci, le bateau a fini par couler, malgré une tentative de sauvetage. Ce ne sont que deux histoires sur près de 200 attaques recensées depuis 2020 dans cette région.
Des attaques qui se multiplient en Espagne et au Portugal
La médiatisation de ces cas attire l’attention du grand public, mais de leur côté, les scientifiques planchent sur la question depuis longtemps. Qu’est-ce qui motive ces orques à attaquer des bateaux, qui plus est dans la même zone ? Selon les experts, l’augmentation des interactions douloureuses entre les épaulards et les bateaux serait liée au cycle suivi par les orques ibériques, une espèce en voie de disparition.
Selon l’association Orca Ibérica, seuls 35 spécimens ont été recensés cette année. Ces mammifères marins élisent domicile dans le détroit de Gilbraltar au printemps et en été pour s’y nourrir de thon rouge, avant de repartir dans des eaux plus profondes au large du Portugal. Voilà qui explique pourquoi les orques se trouvent ici. Ce qui reste à déterminer, c’est la raison des attaques.
Deux théories qui expliquent les attaques des orques
Selon Alfredo López, docteur en biologie et membre de GT Orca Atlántica, il existe deux théories qui pourraient expliquer l’attitude des épaulards à l’égard des embarcations humaines.
La première serait que ces mammifères, qui appartiennent à la catégorie des dauphins malgré leur surnom de « baleines tueuses », seraient « incroyablement curieux et joueurs » et que leurs attaques seraient donc apparentées à un jeu. Il s’avère que 15 spécimens ont été identifiés comme étant impliqués dans les incidents enregistrés : deux adultes et 13 jeunes orques. Les jeunes spécimens pourraient être à l’origine des attaques.
L’autre théorie est plus sombre : c’est celle de la vengeance. Au moins l’un des spécimens adultes aurait vécu une expérience traumatisante lors d’un précédent contact avec un navire : il s’agirait d’une orque nommée White Gladis. Une étude publiée en 2022 évoquait alors soit une collision avec un bateau, soit une capture par un navire de pêche illégal. De quoi marquer au fer rouge la mémoire de l’épaulard, qui associerait désormais les embarcations avec des menaces à éradiquer.
Dans cette seconde théorie s’en trouve finalement une autre : si White Gladis agit par vengeance envers les hommes, il serait possible qu’elle « apprenne » à ses congénères comment attaquer les bateaux. « Nous n’interprétons pas que les orques enseignent aux jeunes, bien que le comportement se soit propagé aux jeunes verticalement, simplement par imitation, et plus tard horizontalement entre eux, car ils le considèrent comme quelque chose d’important dans leur vie », explique Alfredo López.
Des mesures pour protéger les bateaux
Dans ce contexte, le ministère de la Transition écologique et du Défi démographique d'Espagne a annoncé, le 30 mai dernier, qu’il travaillait sur le « marquage par satellite de six épaulards pour minimiser les interactions avec les bateaux ». Les scientifiques donnent quant à eux des conseils aux équipages susceptibles de rencontrer des épaulards sur leur chemin : réduire la vitesse du navire, baisser les voiles pour un voilier, ne pas crier ou encore ne rien jeter sur les orques.