Lorsqu’elle a découvert que sa soupe avait viré au bleu dans son réfrigérateur, la microbiologiste américaine Elinne Becket a décidé de mener l’enquête pour comprendre comment ce repas anodin avait pu en arriver là. Et l’aventure est allée très loin.
Tout au long de notre vie, nous nous posons des questions aussi existentielles qu’anodines sur les petites découvertes du quotidien. Elinne Becket a beau être microbiologiste, cela ne l’empêche pas de faire comme tout le monde, et de s’interroger sur des situations parfois improbables.
La preuve, avec cette histoire qui a débuté le 1er mars dernier et qu’elle a commencé à raconter sur Twitter : « Il y avait une soupe de bœuf oubliée dans notre frigo. On vient de la nettoyer, et elle était BLEUE ? Quel type de contamination la rendrait bleue ? Un bleu lumineux ! Même avec toutes mes années en microbiologie, je ne comprends pas. »
Face aux centaines d’interactions générées par sa publication, la scientifique a décidé de prélever un échantillon de cette soupe bleue pour lancer quelques tests en laboratoire. Et l’aventure a démarré !
Une soupe étrange qui a traversé les États-Unis
Elinne Becket a commencé elle-même les cultures de son échantillon, mais elle en a aussi envoyé une partie à Sebastian Cocioba, un biologiste amateur de l’État de New York. Les cultures ont été réalisées dans différentes conditions et à différentes températures, comprises entre 4°C et 37°C.
En fonction des études des cultures, différents résultats ont émergé. La présence de bactéries seudomonas fluorescens et P. aeruginosa ont notamment été détectées : il s’agit de bactéries qui sécrètent des pyoverdines, un type de pigment verdâtre. La seconde des bactéries sécrète également un autre pigment, la pyocyanine, au ton plutôt bleuté. Les deux termes, « fluorescens » et « aeruginosa », font allusion à l’apparence que génèrent ces bactéries, l’une fluorescente et l’autre vert bleuté.
Rapidement, la bactérie P. aeruginosa a été mise de côté, car la couleur bleue n’apparaissait pas dans les cultures de Sebastian Cocioba. Mais l’enquête a continué pendant un mois !
Un séquençage génétique pour une simple soupe
Après un mois de recherche, les scientifiques ont obtenu les résultats du séquençage de l’ARN ribosomique 16S. Le matériel génétique correspondait à 75% à des bactéries du genre Pseudomonas, et plus précisément à un mélange de plusieurs espèces de cette catégorie. Ils ont également trouvé des traces d’Enterobacter et de Lactobacillus.
Mais ce n’est pas la seule découverte qui a été faite. En effet, Elinne Becket a reçu d’autres résultats, mettant cette fois-ci en évidence la bactérie Serratia quinivorans, capable de sécréter un pigment bleu, l’indigoidine. De toute évidence, la microbiologiste tenait enfin les responsables de la couleur bleue de sa soupe.
Au-delà de ce mystère résolu, cette petite aventure met en avant le fait qu’il est possible de passionner les foules pour la science avec un point de départ surprenant. L’histoire de la soupe d’Elinne Becket a captivé des centaines de tweetos pendant plus d’un mois, et il y a fort à parier que beaucoup se poseront des questions lorsque leurs aliments périmés afficheront une drôle de couleur à l’avenir…