La présentation de Bard, l’intelligence artificielle de Google, a été réalisée la semaine dernière par l’entreprise, et elle ne s’est pas déroulée comme prévu. Depuis ce fiasco, les langues se délient au sein des effectifs du géant américain, et ce n’est pas à son avantage.
La course à l’intelligence artificielle a fait une victime la semaine dernière : il s’agit de Google. La firme américaine a profité d’une conférence de presse se tenant à Paris pour présenter Bard, une IA destinée à concurrencer ChatGPT. Il faut dire que l’intelligence artificielle d’OpenAI a le vent en poupe ces derniers temps, notamment depuis que Microsoft a annoncé avoir investi des milliards dans cette technologie, qui va faire son arrivée au sein de son moteur de recherche Bing.
Visiblement très pressé de concurrencer ChatGPT, Google a donc fait le choix de présenter Bard le 6 février dernier. Dans un tweet publié le même jour, l’entreprise pose une question somme toute très simple à son IA : « Quelles nouvelles découvertes du télescope spatial James Webb peuvent être comprises par un enfant de 9 ans ? ». Bard donne alors quelques réponses et parmi elles s’est glissé une belle erreur : « JWST a pris la toute première photo d’une planète en dehors de notre propre système solaire ». Une affirmation totalement fausse puisque le premier cliché du genre a été réalisé en 2004 par le Very Large Telescope basé au Chili.
Bard is an experimental conversational AI service, powered by LaMDA. Built using our large language models and drawing on information from the web, it’s a launchpad for curiosity and can help simplify complex topics → https://t.co/fSp531xKy3 pic.twitter.com/JecHXVmt8l
— Google (@Google) February 6, 2023
Google : une chute de 100 milliards de dollars en bourse
Cette bourde a immédiatement été punie d’une dégringolade de Google en bourse, dont la valorisation a perdu 100 milliards de dollars en l’espace de quelques heures. Une punition financière qui s’est accompagnée d’une décrédibilisation de l’intelligence artificielle auprès des internautes, qui n’ont pas compris comment l’entreprise avait pu laisser passer une telle erreur dans sa communication. Le scientifique Grady Booch a notamment qualifié de « Désinformation à grande échelle » le travail réalisé par Google. Et il est loin d’être le seul à penser cela.
Misinformation at scale; bullshit as a service.
— Grady Booch (@Grady_Booch) February 8, 2023
(The European Very Large Telescope- not the JWST - took the first optical photograph of an exoplanet in 2004.) https://t.co/J4mJMPORQe
Forcément, le timing a son importance : la firme américaine a clairement voulu court-circuiter les annonces de Microsoft qui, de son côté, a présenté l’intégration de ChatGPT au sein de Bing le 7 février, soit le lendemain du tweet de Google et la veille de sa conférence de presse parisienne. Mais à vouloir aller trop vite, Google s’est visiblement planté.
Les employés de Google dénoncent une présentation « baclée »
Dans les bureaux de la firme de Mountain View, les points de vue semblent très mitigés à l’égard de Bard. Certains employés n’ont pas hésité à interpeller directement Sundar Pichai par email, rapporte le média CNBC.
Cher Sundar, le lancement de Bard et les licenciements ont été précipités, bâclés et sont court-termistes. Nous vous demandons de revenir à une vision sur le long terme. La mise sur le marché précipitée de Bard dans la panique a validé la peur du marché à notre égard.
Selon des témoignages qui émergent depuis la semaine dernière, certains salariés impliqués dans le développement de l’IA n’étaient même pas au courant qu’elle devait être dévoilée aussi rapidement. Il s’avère que Bard se base sur LaMDA (pour Language Model for Dialogue Applications), un modèle de langage qui est développé depuis un moment déjà au sein des locaux de l’entreprise. Ces dernières semaines, le travail sur LaDMA s’est grandement accéléré pour en faire une priorité.
Des ingénieurs et développeurs de Google ont donc été contraints de laisser de côté leurs projets pour venir grossir les rangs de l’équipe dédiée à LaDMA, quitte à les mettre en péril. « À court terme, cela prend le pas sur d’autres projets », a déploré l’un d’eux.
Après le licenciement massif de 12 000 employés de Google en janvier dernier, il semble évident que les choix stratégiques opérés par la direction passent très mal. « Virer 12 000 personnes fait augmenter l’action de 3 %, présenter une IA pas finie la fait chuter de 8 % », résume un employé sous couvert d’anonymat à travers un même posté sur le forum Memegen. L’heure n’est plus à la fête chez Alphabet.