Travailler dans un studio de développement, ce n’est pas de tout repos. Si on le savait déjà, le récent rapport de la GDC nous le rappelle une nouvelle fois et aborde notamment les questions de harcèlement en provenance des joueurs mécontents.
2300 développeurs parlent de l’état de l’industrie du jeu vidéo
En prévision de la prochaine GDC (du 20 au 24 mars prochain à San Francisco), les organisateurs ont décidé de faire le point avec les développeurs. Il faut dire que l’industrie a énormément changé ces dernières années, notamment avec la pandémie, l’arrivée des nouvelles consoles et l’émergence de nouvelles obsessions comme le fameux métavers. Ajoutez à cela les nombreux scandales qui ont éclaté au sein de géants du monde vidéoludique et vous comprenez l’envie des organisateurs de la GDC (littéralement la conférence des développeurs de jeu) de dresser un bilan de l’état de l’industrie. Et pour cela, ce ne sont pas moins de 2 300 développeurs qui ont répondu à des questions sur leur travail et le monde du jeu vidéo en général. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que cette initiative s’est révélée particulièrement instructive.
Les PCistes seront par exemple contents d’apprendre que le PC est toujours la machine sur laquelle les interrogés veulent le plus développer leur jeu. On retrouve ensuite la PS5, la Nintendo Switch et seulement ensuite la Xbox Series. Petite anomalie notable : l’intérêt pour la Nintendo Switch ne transparaît pas sur les jeux en cours de développement ou à venir. Si 35% des sondés ont affirmé que la Nintendo Switch était la plateforme qui les intéressait le plus, ils ne sont que 18% à travailler actuellement sur un jeu à venir sur la console hybride. D’un point de vue technologique, on sent un certain scepticisme concernant le métavers. “Les gens qui essayent de le vendre ne savent même pas ce que c’est, et c’est la même chose pour les consommateurs” avance l’un des développeurs interrogés. Même constat pour les NFT. 75% des sondés disent ne pas s’y intéresser et 56% y sont même opposés. Mais dans le contexte actuel, ce sont avant tout les conditions de travail qui suscitent des réactions. Et le moins que l’on puisse dire, c'est que la situation est loin d’être rose.
Si niveau inclusion et équité il y a du mieux, travailler dans un studio de jeu vidéo n’est toujours pas de tout repos. 63% des sondés ont dit avoir travaillé plus de 46 heures par semaine au cours de l’année. Parmi eux, on retrouve tout de même plus de cent personnes qui disent avoir déjà travaillé plus de 80 heures en une seule semaine. De façon générale, on sent que les développeurs interrogés sont plus sensibles à leurs conditions de travail qu’avant. Quand ils réfléchissent à changer de compagnie, le salaire et les conditions de travail au sein de l’entreprise passent devant les potentiels projets sur lesquels ils pourraient travailler. Plus de la moitié des sondés se disent également favorables à la syndicalisation des développeurs, même s’ils avouent ne pas trop en discuter avec leurs collègues. Il faut dire que la plus grosse source de stress semble venir d'ailleurs...
New details on the severity of Bungie harassment. This is not “kids making jokes” in any capacity https://t.co/QqSFpPCmqA pic.twitter.com/yNFrc3XrNV
— Paul Tassi (@PaulTassi) August 3, 2022
Développeurs et joueurs, je t’aime moi non plus
Si vous suivez un peu l’actualité vidéoludique, vous savez que des développeurs se font régulièrement harceler sur les réseaux sociaux. Récemment, c’est le développeur d’AetherSX2, un émulateur PS2 pour Android, qui a cédé face aux nombreuses menaces de mort et décidé de stopper le développement de son programme. Sans surprise, on retrouve donc cette problématique dans le rapport de la GDC : "La toxicité contre les créateurs de jeux vidéo reste un problème" nous dit-il. 78% des sondés ont affirmé que la toxicité des joueurs et le harcèlement étaient un problème, voire même un très sérieux problème. Notez tout de même qu’ils ne sont que 40% à s’en dire victime ou témoin direct. Parmi eux, on retrouve majoritairement des femmes ou des personnes issues de la communauté LGBTQIA+. Quand on voit qu’elles sont minoritaires parmi les personnes interrogées, cela pose question.
Pour en revenir aux questions de harcèlement par les joueurs, chacun y va de sa petite solution. Pour certains, il est important de poser publiquement les limites et de compter ensuite sur sa communauté pour pointer du doigt et calmer les éléments les plus toxiques. D’autres prônent la répression (avec la possibilité de suspendre le compte d’un joueur trop véhément), la formation (des CM notamment) et la sensibilisation. Difficile de trouver la réponse parfaite, mais toujours est-il que les développeurs ne sont pas seuls face à ce fléau. Les deux tiers des sondés ont en effet affirmé que leur entreprise prenait la situation très au sérieux.
You can love or hate the game and share your thoughts about it. Unfortunately too many of the messages I've been getting are vile, hateful, & violent. Here are just a handful of them (feel it's important to expose.) Trigger Warning: transphobic, homophobic, anti-Semitic, etc. pic.twitter.com/uR9vpGgYQa
— Neil Druckmann (@Neil_Druckmann) July 5, 2020
Si vous êtes curieux au sujet des nombreux autres sujets abordés dans le rapport (accessibilité, inclusivité, développement durable...), vous pouvez y avoir accès ici.