Les frontières ne sauraient arrêter le langage. Qu'elles soient façonnées au fil des siècles sur un territoire donné, massifiées grâce au développement économique d'un pays ou imposées par la colonisation, les langues croissent à un rythme qui leur est propre, difficile à concevoir sans graphique concret. Nous en avons trouvé un particulièrement parlant !
Les cartes du monde vous mentent
Le planisphère que tout le monde a en tête est lui-même assez mensonger, notamment en ce qui concerne la taille des pays. Spoiler : la terre est ronde. Forcément, lorsque l'on met une sphère à plat, il faut tricher sur certaines tailles si l'on souhaite conserver les bonnes formes. Il est possible de faire le choix inverse et de privilégier le réalisme de la taille au réalisme de la forme. Pour ce faire, une carte qui étire certains territoires au niveau de l'equateur existe. On appelle ce monde plat représenté dans ses réelles dimensions Projection de Peters.
La Projection de Peters n'est qu'un exemple de carte alternative au planisphère classique : il existe des travaux de géographes sur énormément d’autres sujets. Certaines cartes ajustent la taille des pays en fonction des inégalités économiques ou démographiques par exemple.
Difficile de faire la même chose avec le language.
Le problème avec les langues, c’est que les locuteurs sont éparpillés à travers le monde entier. Une carte des langues qui ne représente que des pays ne pourra jamais être satisfaisante. Pour résoudre le problème de l'éclatement des locuteurs, il faut trouver d’autres représentations schématiques, loin des cartes du monde. Sans ça, impossible de bien faire comprendre les choses.
Le graphique génial pour représenter la véritable taille des groupes de locuteurs des langues parlées à travers le monde
Attention, le graphique dont nous parlons aujourd’hui ne montre pas le nombre de locuteurs de chaque langue, mais le nombre de locuteurs natifs de chaque langue. Ce petit adjectif fait toute la différence. Si l’on prend en compte le nombre de locuteurs secondaires, les chiffres changent du tout au tout. Prenons un exemple concret : vu le nombre de personnes qui apprennent l’anglais à l’école, la langue de Shakespeare est largement plus parlée que le chinois grâce à ses locuteurs secondaires. Mais bon, c’est de la triche, non ?
L’instrument idéal pour comparer les tailles de communautés linguistiques natives n'existe pas. Face à cette barrière, le South China Morning Post (SMCP) a créé sa propre représentation... en cercle. Bien qu'imparfait, ce graphique a été repris par VisualCapitalist pour sa simplicité, son côté intuitif. Il existe d’autres représentations plus précises sur le sujet des communauté linguistiques natives, mais elles sont souvent très techniques. Pour le grand public, nous préférons le schéma le plus parlant.
Pour voir ce graphique en résolution maximale, rendez-vous juste ici ! Les couleurs ne sont pas arbitraire, il s'agit des groupes linguistiques auxquels chaque langue appartient. Le français est dans le groupe des langues indo-européennes par exemple.
Puisque seuls les locuteurs natifs sont pris en compte, le poids démographique joue énormément. Il sufit de poser les yeux sur le graphique ci-dessus pour s'apercevoir que les différents dialectes parlés en Chine écrasent le monde. La taille de la portion “chinois” du graphique est plus importante que celles de l’espagnol, de l’anglais, de l’arabe et du français cumulés. C’est dire.
Quant à l’Inde (1,4 milliard d’habitants), il faut noter qu’il s’agit d’un pays très éclaté linguistiquement. Le tamil et ses près de 70 millions de locuteurs est principalement parlé an sein des frontières indiennes. De même pour le télougou ou le marathi. Si toutes ces langues étaient groupées sous la même bannière, la partie "Indien" du graphique serait énorme. Si les linguistes n'ont pas fait ce choix, c'est parce que les langues parlées en Inde sont bien plus distinctes les unes des autres que les dialectes chinois regroupés.
La place du français, si petite, vous interpelle sûrement. C’est assez normal : l’écrasante majorité des locuteurs natifs de la langue de Molière se trouvent dans l’hexagone alors que la langue française est avant tout présente sur le continent africain. D’ailleurs, vu la croissance démographique de l’Afrique subsaharienne, il est possible que le français devienne la langue la plus parlée au monde à l’horizon 2050.