Pour beaucoup de joueurs, le survival-horror est né dans la forêt de Raccoon City en 1996 (Resident Evil), dans les boyaux du manoir Derceto en 1992 (Alone in the Dark), voire dans le manoir du peintre Mamiya (Sweet Home). Pourtant, les fondations du genre horrifique dans le monde du jeu vidéo ont émergé dès 1981. Avec Haunted House, James Andreasen a tenté de nous dresser les cheveux sur la tête par l’intermédiaire d’une dizaine de couleurs et de blocs grossiers. Ouvrez grand les yeux, grattez une allumette, nous remontons aux origines de la terreur pixellisée en pénétrant dans la maison hantée la plus célèbre de l’Atari 2600.
Sommaire
- Avant Raccoon City, il y avait Spirit Bay
- Haunted House, l’angoisse vintage
- L'empreinte d’un monstre du passé
Avant Raccoon City, il y avait Spirit Bay
Bien que cela puisse prêter à sourire à la vue des captures d’écran disponibles dans cet article, Haunted House dispose d’une histoire, décrite dans le manuel d’utilisation du titre. À cette époque, il n’y avait pas de scènes cinématiques pour introduire le joueur dans l’univers, et les textes explicatifs ingame étaient encore rares. Mais revenons à nos moutons, ou plutôt, à nos fantômes. Dans la petite bourgade de Spirit Bay, une vieille maison en ruine est la source des rumeurs les plus folles.
Il se dit en effet que les morceaux d’une urne magique ayant appartenu à la première famille de la ville seraient cachés dans les couloirs de la demeure. Un objet d’une valeur inestimable que les chasseurs de trésors aimeraient récupérer, mais il y a un hic. Il se dit également que la bâtisse serait hantée par des esprits maléfiques. Certains témoins jurent qu'ils ont entendu des sons inquiétants, tandis que d’autres prétendent avoir vu des ombres courir à travers le manoir. Le personnage incarné par le joueur décide de prendre son courage à deux mains et de pénétrer à l’intérieur de la maison. Ce que ses allumettes vont révéler est bien pire que ce que les bruits de couloir laissaient sous-entendre : des tarentules belliqueuses, des chauve-souris vampire assoiffées de sang et même le fantôme agressif de l'ancien propriétaire peuplent les lieux.
Haunted House, l’angoisse vintage
Le titre développé par James Andreasen pour l’Atari 2600 prend la forme d’un jeu d’arcade en vue de dessus. De gros blocs homogènes représentent les murs de la bâtisse, tandis que deux énormes yeux écarquillés symbolisent le héros. L’objectif est de réunir les trois morceaux de l’urne et de les rapporter à l’entrée principale du manoir sans utiliser la totalité des 9 vies fournies. Les objets à trouver, qui se révèlent uniquement quand le joueur s’en approche avec une allumette allumée, sont dispersés de manière aléatoire dans les 24 pièces du manoir, pièces qui sont reliées par des couloirs et des escaliers.
Il serait aisé d’accomplir la mission s’il n’y avait pas des portes fermées à clé (à ouvrir une fois en possession du passe-partout) et si les créatures démoniaques ne rôdaient pas dans chaque recoin. Heureusement, un sceptre à récupérer, caché dans la maison, permet de repousser les adversaires. Cependant, le protagoniste principal ne pouvant ramasser qu’un objet à la fois, il n’est pas possible de récupérer les morceaux de l’urne si le sceptre est déjà équipé. Quand une force obscure pénètre dans une pièce, la flamme du joueur s’éteint. Il doit donc rallumer une allumette pour revoir les murs de la bâtisse et tenter de sortir de ce labyrinthe en un seul morceau.
L'empreinte d’un monstre du passé
Les mécaniques de Haunted House, bien que rudimentaires, ont instauré un style de jeu basé sur l’angoisse qui a laissé des traces. À l’instar des survival-horror des années 1990, nous retrouvons un lieu inquiétant labyrinthique plongé dans l’obscurité, une faible puissance d’attaque, peu de santé, un inventaire extrêmement limité qui oblige à faire des choix, et des jumpscares causés par l’apparition d’ennemis (déclenchant parfois des éclairs). Le soft dispose de neuf modes de jeu faisant varier les règles, et donc le niveau de difficulté.
Oui, il y a bien un jeu Haunted House sorti en 1972 sur la Magnavox Odyssey, et oui, il s’agit d’un jeu se déroulant dans un manoir hanté. Pourquoi nous ne le considérons pas comme étant le premier jeu d’horreur de l’histoire ? Tout simplement car il s’agit d’un jeu multijoueur finalement très proche d’un jeu de société. Un joueur dirige un détective et explore les pièces d’une maison (en overlay) jusqu’à tomber sur le fantôme préalablement caché par le deuxième joueur.
Bien sûr, les graphismes de Haunted House empêchent la création de James Andreasen d'effrayer véritablement qui que ce soit. Le manoir hanté ressemble plus à un amas de gros pixels qu’à une bâtisse lugubre, les créatures sont des petits sprites animés sommairement (sur deux images), et les sons peinent à instaurer une ambiance inquiétante. Pour sa défense, le soft tient sur une cartouche de seulement 4 Ko. À ce niveau-là, ce ne sont plus des concessions qu’il faut faire, mais du figuratif.
Le premier homme qui s'est retrouvé perdu seul dans les ténèbres dans un jeu de survie n'est donc pas Edward Carnby mais bel et bien le héros aux yeux écarquillés de Haunted House. Le soft connaîtra un reboot assez confidentiel en 2010 – 30 ans après l'original ! – sur PC, Wii et Xbox 360. Si vous avez le cœur bein accroché (et l'esprit ouvert), le titre original de l’Atari 2600 peut être testé directement sur navigateur par ici.