D’ici peu, vous n’aurez plus le choix : avant d’afficher vos abdos sur Instagram, vous devrez vous rendre à la salle de sport. En effet, l’astuce consistant à retoucher votre bedaine sur Photoshop ne pourra bientôt plus faire illusion, grâce à un système mis en place par Adobe pour déceler les images ayant été manipulées. Un outil qui pourrait permettre de lutter contre les fake news, et contribuer à un Net plus honnête.
Une Content Authenticity Initiative pour lutter contre les fake news
La Content Authenticity Initiative (CAI) avait été lancée dès 2019, sous l’impulsion d’Adobe. Aujourd’hui, elle réunit des créateurs de contenus, des entreprises de tous horizons, et des professionnels de la presse. Ensemble, ils souhaitent démocratiser un outil permettant de retracer la provenance des images publiées en ligne.
Une initiative qui s’inscrit dans un monde où les fake news sont légion, et où les technologies de manipulation des images sont de plus en plus sophistiquées, avec des répercussions parfois graves.
Entre autres exemples récents : la diffusion d’une fausse allocution dans laquelle le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, capitulait face à la Russie, ou l’utilisation, par des arnaqueurs, d’une vidéo deep fake mettant en scène Elon Musk.
Yikes. Def not me.
— Elon Musk (@elonmusk) May 25, 2022
Un outil open source pour retracer l’historique d’une photo
Adobe et la CAI viennent de préciser les détails de leur système d’authentification et de traçabilité des photos. Il s’agit d’un kit open source, destiné aux développeurs de sites web et d’applications.
Suite à l’installation de ce plugin sur un site donné, toute image mise en ligne par son biais hérite automatiquement de différentes métadonnées — des informations précises qui viennent s’adosser au fichier, incluant par exemple la date et l’heure de la prise de vue… Mais aussi toute trace d’éventuelles modifications : nature de la retouche, logiciel utilisé, etc. Une sorte d’historique de la vie de ce fichier, et de ses hypothétiques altérations.
À terme, ces métadonnées pourraient devenir visibles publiquement, en s’affichant directement sous les photos de votre fil d’actualités ou des articles que vous consultez, pour que vous puissiez savoir en un coup d’œil si l’image que vous avez en face de vous est authentique ou non.
Le système n’est pas sans rappeler celui de la norme EXIF, employée dans la quasi-totalité des appareils photo (y compris ceux inclus dans nos smartphones), et qui intègre elle aussi un grand nombre d’informations (géolocalisation, objectif utilisé, etc.). Problème : il est très simple de trafiquer les métadonnées des fichiers EXIF, qui servent surtout à faciliter le travail des photographes, mais s’avèreraient insuffisantes pour prouver l’origine d’un cliché.
Ici, la CAI annonce que ses content credentials utilisent une empreinte cryptographique unique. Il faudrait donc bien plus d’acharnement pour les supprimer d’un fichier, et une telle tâche ne serait pas à la portée de n’importe quel photoshoppeur amateur.
Un système bientôt en place partout sur le Web ?
À terme, l’idéal serait que cet outil soit le plus répandu possible, et employé par le plus de réseaux sociaux et de sites web, pour que la simple absence de métadonnées sur une photo suffise à mettre la puce à l’oreille quant à sa véracité.
Désormais, il ne tient qu’aux acteurs du Web d’adopter et de démocratiser ce système open source. En tant qu’instigateur, Adobe inclura prochainement ces métadonnées à tous les fichiers retouchés via Photoshop ou les autres logiciels de la firme.
D’autres entreprises, dont Microsoft, Twitter, mais aussi les organismes de presse comme les agences de presse AP et AFP, la chaîne BBC ou la banque d’images Getty, font partie de la CAI, et devraient, eux aussi, intégrer et promouvoir cette technologie.
Toutefois, certains géants du Web, comme Meta, la maison-mère de Facebook et Instagram, manquent encore à l’appel. En attendant, vous pourrez donc continuer de faire croire que vous avez des abdos à vos followers.