Alors que le jeu existe depuis une décennie, Pokéclicker a récemment fait l'objet d'une certaine hype grâce à de nombreux streamers qui ont offert une énorme visibilité à ce fan game sur navigateur. Malheureusement, cette soudaine popularité pourrait aussi entraîner la fermeture du projet, on vous explique pourquoi.
Sommaire
- Une fermeture probable pour des raisons légales ?
- Pokémon, une licence particulière "de" Nintendo
Depuis la sortie de Cookie Clicker en 2013, on peut dire que le genre des idle game ou clicker game s'est démocratisé. Pourtant, il s'agit d'un type d'expérience assez particulier par le côté passif car, comme son nom l'indique, il suffit de cliquer pour progresser. Pire, passé un certain cap, le jeu finit même par "jouer tout seul", reléguant le joueur au simple rang de spectateur qui admire tous les éléments qu'il a accumulés fonctionner sans lui , comme une machine bien huilée. Forcément, avec un principe aussi basique mais addictif, la formule a été déclinée à toutes les sauces et la licence Pokémon n'a fait pas exception à la règle comme le prouve le fameux Pokéclicker dont il est question aujourd'hui.
Retrouvez ici nos astuces et notre guide complet sur Pokéclicker
Une fermeture probable pour des raisons légales ?
Vous vous en doutez sûrement, mais il est toujours bon de le rappeler : Pokéclicker est bien évidemment un projet de fans qui s'est fait sans que les détenteurs de la franchise Pokémon n'aient été consultés. Forcément, cela peut poser problème d'un point de vue juridique au niveau de la propriété intellectuelle, puisqu'à tout moment, il est possible que les ayants droit attaquent en justice les créateurs du projet. Et face aux avocats de la licence la plus rentable de tous les temps, pas sûr que les développeurs de ce fan-game aient vraiment les moyens d'aller au tribunal, rien que d'un point de vue financier.
Malheureusement, cette hypothèse a de quoi être crédible puisque ce scénario s'est déjà produit avec un fan game de la licence Metroid : AM2R : Another Metroid 2 Remake. Remake de Metroid II : Return of Samus publié sur Game Boy en 1992, le projet a rapidement été bloqué par Nintendo qui a fait valoir ses droits en 2016, juste après sa sortie. Une décision sûrement motivée par le lancement l'année suivante de Metroid : Samus Returns sur 3DS qui était lui aussi une remise au goût du jour du deuxième opus des aventures de Samus Aran. À l'époque, Reggie Fils-Aimé, alors président de Nintendo of America, avait justifié ce choix par ces propos :
Je pense que l'on doit être clairs au sujet de la ligne à ne pas franchir, et de notre point de vue, cette limite est quand un hommage devient quelque chose qui monétise notre licence. Nous autorisons les hommages de bien des manières. Et étant moi-même un fan avant d'être à la direction, je comprends l'attirance que vous pouvez avoir pour nos franchises. Mais quand il s'agit de monétiser, vendre, profiter, quand cela franchit la ligne, nous devons faire valoir nos droits.
(...) Nous discutons avec des entités qui étaient des fans et sont devenus des partenaires de travail. Ces conversations arrivent tout le temps, mais encore une fois, quand quelque chose devient un produit commercial... et c'était le cas d'AM2R - il n'avait pas de prix, mais c'était un produit commercial.
Cependant, ces justifications sont loin d'être suffisantes puisque AM2R était un jeu distribué gratuitement, comme le souligne l'ancien président de Nintendo of America (il n'avait pas de prix), alors difficile de comprendre en quoi il s'agit d'un produit commercial. Compte tenu de cette justification floue, il y a donc une probabilité que Pokéclicker soit lui aussi bloqué par Nintendo, surtout que le projet partage une trajectoire commune avec AM2R. En effet, à cause de l'engouement entourant de ces deux projets, ces derniers ont gagné tellement de visibilité qu'ils ont fini par être repérés par Nintendo qui peut décider à tout moment de les faire annuler grâce à des leviers juridiques. Un paradoxe malheureusement ironique qui pourrait falloir à ce genre de fan game d'être supprimé. Cependant, contrairement à la licence Metroid, Pokémon est une franchise qui n'appartient pas exclusivement à Nintendo, ce qui pourrait changer la donne.
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Pokémon, une licence particulière "de" Nintendo
Puisque tous les jeux de la franchise sont sortis sur les consoles du constructeur japonais, le grand public a tendance à associer naturellement Pokémon à Nintendo, en pensant qu'il s'agit d'une d'une de ses nombreuses licences à l'image de The Legend of Zelda, Mario ou Animal Crossing. En réalité, les choses sont bien plus compliquées pour Pokémon puisque c'est The Pokémon Company, fondée en 1998, qui gère la marque dans le but de la développer. Or, le capital de cette société est réparti équitablement entre trois acteurs différents : Nintendo, Game Freaks, le studio à l'origine des jeux vidéo, et Creatures Inc. qui s'occupe du jeu de cartes et de la modélisation des Pokémons.
Ainsi, Nintendo ne peut pas prendre des décisions unilatérales concernant la franchise Pokémon, et ça se voit compte tenu du nombre de fan game qui pullulent sur la toile. Pokemon Insurgence, Pokemon Shodown, PokeMMO... il existe des tonnes de ROM hack ou de version MMO facilement accessibles sur le net. Si on pourrait croire que les ayants droits sont assez laxistes, il ne faut pas oublier que certains projets ont tout de même été arrêtés, à l'image de Pokémon Uranium, l'un des ROM hack les plus populaires de la quatrième génération. Plus récemment même, on se souvient aussi du FPS développé par un fan dans lequel il fallait tirer sur des Pokémons, ce qui n'a pas du tout plu à Nintendo qui a fait supprimer tous les posts relatifs au jeu. Dans ce cas-là, on peut comprendre les raisons qui ont poussé le constructeur à prendre cette décision compte tenu du caractère violent du projet, en totale opposition avec l'image enfantine de Pokémon.
Face à ces différents traitements de fan game, difficile de savoir ce qui peut advenir pour Pokéclicker. Mais d'un autre côté, il est possible que le titre s'attire les foudres des ayant droits de Pokémon car ce dernier pourrait faire de l'ombre à l'application phare de la licence sur mobiles, Pokémon GO. La comparaison n'est pas si surprenante que ça puisque les deux jeux se focalisent sur le côté collection de la formule Pokémon plutôt que sur les combats. Si Pokéclicker est bien évidemment à des années-lumière de la popularité de Pokémon GO, il est possible que même cette légère concurrence entre ces deux expériences, dans le fond très différentes, déplaise à The Pokémon Company, au point de pousser l'entreprise à prendre des mesures.
Par le passé, Nintendo n'a toujours pas été tendre avec les fangames autour de ses licences comme le prouve l'affaire d'AM2R. Cependant, Pokémon est une franchise particulière pour le constructeur japonais puisqu'il n'en est pas le seul ayant droit. C'est peut-être pour cette raison que les ROM Hacks et autres projets amateurs autour de Pokémon se sont multipliés depuis des années, sans avoir peur d'être inquiétés. Malgré tout, certains titres appréciés des fans ont quand même dû être arrêtés pour des motifs juridiques, ce qui veut dire que The Pokémon Company ne laisse pas n'importe qui faire n'importe quoi avec ses créatures. Alors, pour ce qui est de Pokécliker, une seule chose est sûre : profitez de jeu tant qu'il est disponible, car personne ne sait ce que réserve l'avenir !
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