C’est certain, en 2022, Sony a décidé d’aligner la monnaie. Après le rachat de Bungie et de Haven il y a peu, la société japonaise lâche un milliard pour soutenir l’activité d’Epic Games, papa de Fortnite et du moteur Unreal Engine. Une sacrée somme certes, mais qui traduit quelles intentions ? Voici notre avis.
Pour reprendre le nom d’un célèbre film, en le modifiant légèrement : “Billion Dollar Baby”. Un milliard de dollars, c’est la très grosse somme que Sony vient d’investir chez Epic Games, société derrière le célèbre battle royale Fortnite et le moteur Unreal Engine. La firme ferme ainsi une levée de fonds de deux milliards de dollars avec pour but “de construire le métavers et de soutenir sa croissance continue”, à laquelle Kirkbi (LEGO) a aussi participé à hauteur d’un milliard. “En tant qu'entreprise de divertissement créatif, nous sommes ravis d'investir dans Epic pour approfondir notre relation dans le domaine du métavers” explique dans un communiqué Kenichiro Yoshida, PDG de Sony Group - l’entité globale, pas seulement celle dédiée à PlayStation. “Nous sommes également convaincus que l'expertise d'Epic Games (...) accélérera nos divers efforts tels que le développement de nouvelles expériences numériques pour les fans de sport et nos initiatives de projets virtuels”.
Direction metavers
“Métavers”, "expériences numériques pour les fans de sport” ? Sony serait-il tombé sur la tête ? Il faut bien garder à l'esprit qu'on parle ici de Sony en général, pas uniquement de sa division “Interactive Entertainment” consacrée à la marque PlayStation. Depuis quelques mois, la firme japonaise répond de plus en plus présente sur le terrain des expériences numériques interactives (sans doute des suites de la crise sanitaire). Début 2022, elle signait par exemple un étonnant partenariat avec le célèbre club de Manchester City. Son objectif : créer un espace en ligne où les fans peuvent interagir avec l’équipe au sein d’un “métavers”, modélisation du stade de foot d’Etihad.
Par le passé, Sony parlait déjà de développer des concerts digitaux grâce à la réalité virtuelle, dans le cadre du projet “Lindbergh”. Et qui est-ce qui s’y connaît bien en la matière ? Eh oui, Epic Games, avec ses événements musicaux désormais incontournables dans Fortnite (Travis Scott, Aya Nakamura, etc). Avant même de parler de rachat, l’investissement de Sony concrétise d’abord un échange de bons procédés entre la société japonaise et Epic Games. “Alors que nous réimaginons l'avenir du divertissement, nous avons besoin de partenaires qui partagent notre vision. Nous avons trouvé cela (...) avec Sony” commente TIm Sweeney, PDG d’Epic. Le papa de PlayStation lui avait déjà donné 250 millions de dollars en 2020, puis un second 200 millions l'année suivante. Résultat, les deux entreprises s'épaulent, comme pour la présentation de l'Unreal Engine 5 sur PS5, en 2020.
Main dans la main
À plus petite échelle, cette entente encore plus concrète profitera donc aussi à PlayStation. Pas forcément pour un métavers, terme que l’on retrouve peu - voire pas du tout - dans la bouche de la branche jeu vidéo de Sony. Mais plutôt pour leur manière d’aborder les futurs jeux PS4 et PS5 axés multijoueur. Une “ligne éditoriale” que l’on n’associe pas forcément à l’entreprise, mais qui prend pourtant forme récemment, surtout avec le rachat du studio Haven dirigé par Jade Raymond. L’équipe travaille sur “un triple-A systémique, évolutif (...) qui divertira et engagera les joueurs pendant des années”, indique le PlayStation Blog. Une future exclusivité aux allures de véritable jeu service, genre pour lequel Jim Ryan, PDG de Sony Interactive Entertainment, relève l’importance dans une récente interview. L’homme rassure néanmoins : "Nous continuerons à créer des jeux solo narratifs”.
De nouveau, pas compliqué de faire le parallèle entre Epic et ce projet. Fortnite, véritable poule aux œufs d’or de la société, est un exemple quasi-inégalé en termes d’engagement et de suivi depuis cinq ans. Cela étant dit, peut-on imaginer un rachat d’Epic Games par Sony ? Ce dénouement paraît peu probable. La firme américaine est valorisée à plus de 30 milliards de dollars alors que Sony Group en a récolté 82,5 milliards sur toute l'année 2020. À ce jour, le PDG Tim Sweeney détient plus de 50% des parts. En tant que majoritaire, c’est lui qui a le dernier mot. On trouve ensuite le chinois Tencent (40% aux dernières nouvelles) alors que Sony se situe toujours - de toute évidence - aux alentours de 2%. La vision et le leadership de Tim Sweeney sont très appuyés. Peu d’entreprises ont osé défier le monopole de Google et d'Apple sur leur propre terrain, allant même jusqu’au procès face à la marque à la pomme. Mais dans un monde où Activision-Blizzard a été racheté par Microsoft, après tout, tout est possible.