Déjà sous le coup d’une plainte de l’Etat de Californie a la suite d'enquêtes menées par le Département de l'Emploi et du Logement de Californie (DFEH) et de la Commission Pour l'égalité d'Accès à l'Emploi (EEOC), Activision-Blizzard est désormais au cœur d’une nouvelle polémique liée la publication d’une longue enquête du Wall Street Journal.
Après de longs mois d'une enquête menée par trois journalistes, le Wall Street Journal (WSJ) a publié une très long article mettant en lumière de nouveaux cas supposés de harcèlement, d'agressions sexuelles, de protection des dirigeants au sein de l'entreprise, et d'actes qu'aurait commis ou ceux dont aurait été au courant Bobby Kotick, PDG d'Activision-Blizzard-King.
De nombreuses accusations relatées
Selon le Wall Street Journal, Bobby Kotick aurait notamment couvert Dan Bunting, ancien co-directeur de Treyarch, accusé de harcèlement par une salariée en 2017. Une enquête aurait été menée deux ans plus tard, mais le PDG serait intervenu afin d'empêcher le licenciement, pour promouvoir d'autres sanctions disciplinaires.
Après avoir considéré ses options à la lumière de cette enquête, la société a choisi de ne pas mettre fin au contrat de M. Bunting, mais de lui imposer des mesures disciplinaires", a déclaré Helaine Klasky, porte-parole.
Ben Kilgore, chef de la technologie chez Blizzard, aurait été de son côté licencié pour harcèlement et mensonges, tandis qu'un superviseur de chez Sledgehammer, Javier Panameno, a été accusé de deux viols par une employée qui aurait également été poussée à boire de l'alcool en grandes quantités. Cette affaire aurait été réglée à l'amiable après les menaces de poursuites, entraînant également le licenciement du superviseur sans que cela ne soit porté à la connaissance du CA.
Un autre incident, également lié à l'alcool, aurait également eu lieu lors d'une soirée, conduisant à la mutation de l'accusé (selon ses propres dires), puis à un licenciement après un désaccord professionnel. Un porte-parole d'Activision-Blizzard a indiqué que l'alcool serait bientôt interdit dans les locaux quelle que soit la situation. Pour Bobby Kotick, ces événements sont des exceptions, et ne reflètent pas l'entreprise dans globalité. Il déclare également, que, conformément à ses précédentes déclarations, il allait consacrer plus de temps à ces problèmes : "S'il y a des expériences que les gens ont sur le lieu de travail et qui les mettent mal à l'aise, nous sommes beaucoup plus aptes à pouvoir y répondre." Le PDG aurait également menacé de mort l'un de ses assistants en 2006 dans un message sur boîte vocale, un problème qui a également été réglé à l'amiable :
M. Kotick s'est rapidement excusé il y a 16 ans pour ce message vocal manifestement hyperbolique et inapproprié, et il regrette profondément l'exagération et le ton de son message.
Lors du dépôt de plainte de la DFEH, les salariés ont été encouragés à faire part de leurs expériences auprès du cabinet d'avocats mandaté par l'entreprise pour revoir ses politiques managériales et ses procédures. Selon le WSJ, ce sont plus de 500 témoignages relatant des faits de harcèlement, d'écarts de salaires injustifiés et d'intimidations qui ont été reçus par le cabinet. Dans les plus hautes sphères de l'entreprise, on évoque également le cas de Jen Oneal, brièvement co-directrice de Blizzard aux côtés de Mike Ibarra. Dans un mail, celle-ci indiquait que la direction actuelle ne permettrait pas de résoudre les problèmes des employés, tout en indiquant qu'elle avait été harcelée, utilisée, moins bien payée que son homologue masculin, et marginalisée.
Les salariés en colère organisent une grève spontanée
Après la publication de l'article, ABK Workers Alliance, le syndicat représentant les salariés d'Activision Blizzard, a décidé de faire une nouvelle fois grève, après un premier mouvement en juillet dernier.
We have instituted our own Zero Tolerance Policy. We will not be silenced until Bobby Kotick has been replaced as CEO, and continue to hold our original demand for Third-Party review by an employee-chosen source. We are staging a Walkout today. We welcome you to join us.
— ABetterABK 💙 ABK Workers Alliance (@ABetterABK) November 16, 2021
Nous avons institué notre propre politique de tolérance zéro. Nous ne serons pas réduits au silence tant que Bobby Kotick n'aura pas été remplacé en tant que PDG et continuerons à maintenir notre demande initiale d'examen par un tiers choisi par les employés. Nous organisons un arrêt de travail aujourd'hui. Nous vous invitons à nous rejoindre.
Bobby Kotick visé, Activision communique officiellement
De plus, Bobby Kotick aurait été au courant de ces différentes affaires, mais n'en aurait pas informé son conseil d'administration, indiquant également qu'il n'était au courant de rien à la DFEH. A ce sujet, un représentant d'Activision-Blizzard-King aurait répondu :
M. Kotick n'aurait pas été informé de chaque rapport de mauvaise conduite dans chaque société d'Activision Blizzard, et on ne pouvait pas raisonnablement s'attendre à ce qu'il soit tenu au courant de tous les problèmes du personnel.
Nous avons contacté Activision-Blizzard-King au sujet de l'article du Wall Street Journal, et nous avons rapidement pu obtenir une déclaration officielle, dans laquelle l'entreprise estime que le journal diffuse une vision inexacte et trompeuse de la société et de son PDG, tout en assurant que les cas d'inconduite sexuelle qui ont été portés à sa connaissance ont été gérés :
Nous sommes déçus par l'article du Wall Street Journal, qui présente une vision inexacte et trompeuse d'Activision Blizzard et de notre PDG. Les cas d'inconduite sexuelle qui ont été portés à son attention ont été traités. Le WSJ ignore les changements importants en cours pour faire de cette entreprise le lieu de travail le plus accueillant et le plus inclusif du secteur, et ne tient pas compte des efforts de milliers d'employés qui travaillent dur chaque jour pour être à la hauteur de leurs - et de nos - valeurs.
Le désir constant d'être meilleur a toujours distingué cette entreprise. C'est pourquoi, sous la direction de M. Kotick, nous avons apporté des améliorations significatives, notamment une politique de tolérance zéro pour les comportements inappropriés. Et c'est pourquoi nous allons de l'avant avec une concentration, une rapidité et des ressources inébranlables pour continuer à accroître la diversité au sein de notre entreprise et de notre secteur et pour faire en sorte que chaque employé vienne travailler en se sentant valorisé, en sécurité, respecté et inspiré. Nous ne nous arrêterons pas tant que nous n'aurons pas le meilleur lieu de travail pour notre équipe.
De son côté, Jason Schreier indique avoir obtenu une vidéo enregistrée et diffusée ce matin par Bobby Kotick aux employés. Dans cette dernière, il aurait déclaré :
Quiconque doute de ma conviction de faire (de notre entreprise) le lieu de travail le plus accueillant et le plus inclusif ne comprend pas vraiment à quel point c'est important pour moi.
Enfin, un communiqué du conseil d'administration d'Activision Blizzard a été publié à la suite de la parution de l'article du Wall Street Journal. Pour le moment, le board conserve sa confiance envers Bobby Kotick :
Le conseil d'administration reste attaché à l'objectif de faire d'Activision-Blizzard l'entreprise la plus accueillante et la plus inclusive du secteur. Sous la direction de Bobby Kotick, la société met déjà en œuvre des changements à la pointe de l'industrie, notamment une politique de tolérance zéro en matière de harcèlement, un engagement à augmenter considérablement les pourcentages de femmes et de personnes non binaires dans nos effectifs et à faire d'importants investissements internes et externes pour accélérer les opportunités pour divers talents. Le conseil demeure convaincu que Bobby Kotick a traité de manière appropriée les problèmes liés au lieu de travail qui ont été portés à son attention. Les objectifs que nous nous sommes fixés sont à la fois critiques et ambitieux. Le conseil d'administration reste confiant dans le leadership, l'engagement et la capacité de Bobby Kotick à atteindre ces objectifs.
- '''Source : Wall Street Journal /
GamesIndustry / Activision-Blizzard'''