Nous vous en parlions pas plus tard que ce matin: Netflix plonge de plain-pied dans le jeu vidéo avec l'acquisition de Night School Studio , derrière lequel se cache notamment le jeu narratif Oxenfree ainsi que ça suite, encore en cours développement. Ce n'est pas franchement une surprise, le géant de la VOD ayant depuis longtemps fait de l'oeil au jeu vidéo, comme d'autres mastodontes de l'industrie mainstream avant lui.
Une drague du jeu vidéo pas si nouvelle que cela
Si vous n'aviez pas suivi l'actualité business de Netflix ces derniers mois, sachez que la plate-forme avait, dès juillet dernier, affirmé son désir de pénétrer le marché du jeu vidéo. Ayant recruté des personnalités issues d'Electronic Arts ou de la division Oculus de Facebook pour participer à l'exposition plus massive du jeu vidéo sur sa plate-forme, Netflix a déjà commencé à tâter le terrain en proposant 3 jeux en version test, directement accessible depuis l'application et sans surcoût pour l'utilisateur. « Shooting Hoops », « Teeter Up » et « Card Blast » sont donc les trois titres qui sont d'ores et déjà disponibles pour les souscripteurs de Netflix en Pologne, Italie et Espagne, et rejoignent les jeux Stranger Things déjà accessibles. L'initiative devrait se répandre progressivement à travers les autres pays éligibles au service.
Mais le fait de faire l'acquisition d'un studio de développement, certes avec une aura indé et donc un peu « de niche » en dépit de ses réussites sur Oxenfree et Afterparty, montre tout de même une volonté d'expertiser le segment jeu vidéo de Netflix. Pour l'heure, Nigth School Studio se félicite de l'arrivée de Netflix à sa tête, déclarant que l'entreprise n'entendait pas envahir l'espace créatif des développeurs et que cette acquisition n'aurait pas d'influence sur le développement d'Oxenfree II : Lost Signals.
C'est bien sûr un honneur surréaliste d'être le premier studio de jeu vidéo à rejoindre Netflix ! Non seulement nous pouvons continuer à faire ce que nous faisons, mais nous obtenons aussi un fauteuil au premier rang sur la plus grosse plate-forme de divertissement du monde. L'équipe de Netflix a témoigné du plus grand soin dans la protection de la culture de notre studio et de notre vision créative. Nous continuerons Oxenfree II. Nous préparerons de nouveaux mondes de jeu.
Pour l'heure, donc, Night School semble préserver une certaine indépendance dans ses choix de développement et les chantiers en cours ne seront pas affectés par cette récente acquisition. Cependant, Netflix a des arguments à faire valoir et dispose d'une très grande multitude de franchises parfaitement adaptables au format jeu vidéo. Le rachat d'un studio axé sur la narration et réputé pour la qualité de son écriture comme de ses univers est un terreau très fertile au portage de sagas de renom à même de toucher un très large public. Netflix s'était d'ailleurs rapproché de Telltale en vue d'adapter Strangers Things avec la formule que l'on connaissait du studio à l'époque il était encore debout. Ce projet, certes avorté, était toutefois une indication claire sur les ambitions de l'entreprise.
Effectivement, il y a fort à parier que Night School Studio, et sans doute les acquisitions qui suivront celle-ci, s'attelle prochainement au portage vidéoludique d'une série Netflix, pour peu que cette dernière soit déjà populaire en VOD. Auquel cas les connexions seront plutôt intéressantes. Si l'on imaginait un titre Strangers Things développé par Night School, il ne serait pas forcément complexe pour Netflix d'intégrer directement l'histoire du jeu à celle de la série. Dans cette hypothèse, à l'issue de la saison, la plate-forme pourrait aisément proposer à ses spectateurs de prolonger l'expérience en lançant d'une pression de touche le jeu associé à sa franchise. Le trio jeu vidéo – cinéma – série se rapproche plus que jamais aujourd'hui et être le leader sur le segment de la SVOD avec des franchises fortes met potentiellement Netflix en position de force sur ce marché très spécifique de l'adaptation de franchise qui prend tout de même beaucoup d'ampleur.
Attention terrain glissant
Toutefois, le terrain du jeu vidéo est glissant. Netflix n'est certainement pas le premier géant à draguer le jeu vidéo, marché ô combien porteur, mais tout aussi difficile à maîtriser. Amazon ou Google en ont notamment fait les frais : il ne suffit pas d'avoir une trésorerie illimitée pour s'imposer sur un secteur où l'expertise est déjà bien en place depuis des décennies et la concurrence aussi limitée que féroce. Une erreur, un premier lancement raté et c'est toute une mécanique qui est chamboulée, avec les coûts que cela implique. Netflix semble en tout les cas poser les premiers jalons d'une politique un peu plus douce que d'autres concurrents. Pas d'énormes AAA à l'horizon, même si la plate forme a réaffirmé son désir de « continuer à travailler avec des développeurs du monde entier et de recruter les plus grands talents du secteur pour élaborer une collection de jeux exclusifs destinés aux joueurs de tous les types et de tous les niveaux ».
Pour l'heure, en revanche, c'est donc sur des jeux sans aucun doute plus « accessibles » et budgétairement moins ambitieux que Netflix va tenter de développer, pour progressivement bâtir des ponts entre ses licences et le jeu vidéo. Reste à savoir si cette politique suffira à booster les abonnements à la plate-forme, les deux publics pouvant être tantôt les mêmes, tantôt très différents. Car jouer directement depuis sa télévision à un jeu narratif ne devrait poser de problèmes à presque personne, mais si l'ambition est d'arriver à la production de jeux plus gourmands via le Cloud, les problématiques ne seront plus les mêmes. Mais Netflix n'en est pas là et semble assez prudent en tâtant le terrain. Il faudra sans doute attendre désormais quelques mois pour voir les premiers fruits de cette acquisition arriver à maturité.
Netflix affirme donc sa position sur le secteur du jeu vidéo et tentera sans aucun doute de faire le lien entre séries et adaptations vidéoludiques pour former un tout cohérent. Pour l'heure, l'entreprise ne semble pas jouer les ogresses, et commence avec le rachat d'un studio dont les talents se prêteront bien au portage d'une licence Netflix vers le jeu vidéo. Reste à savoir dans quelle mesure l'initiative va croître et si cela se répercutera finalement sur les coûts de l'abonnement pour l'utilisateur, même si une augmentation des tarifs ne semble pas à l'ordre du jour.