Même si le mot “eSport” n’est pas le premier qui vient à l’esprit lorsque l’on pense à Sony, la firme a déjà plus d’un pied dans le milieu. Une position encore un peu plus affirmée récemment, avec le rachat de l’Evolution Championship Series, aka l’EVO. Une nouvelle qui peut surprendre. Explications.
“L'annonce d'aujourd'hui symbolise une étape excitante dans notre voyage pour favoriser la croissance de la communauté des jeux de combat et de l'eSport” écrivait tout récemment Sony Interactive Entertainment, maison mère de PlayStation, sur son blog officiel. Cette fameuse annonce, c’est le rachat de l’EVO, plus gros tournoi dédié au versus fighting au monde. L’opération - dont on ne connaît pour l’instant pas le montant - a été réalisée en collaboration avec RTS, filiale de la société Endeavor qui représente notamment des joueurs et personnalités du milieu par le biais de la Global eSports Management. Concernant Sony, la nouvelle pourrait surprendre : la firme s’est forgée une image de grosse machine à triple-A solo ces dernières années, et semble finalement assez loin de la compétition par écran interposé. Et pourtant.
Suite logique
“PlayStation a toujours soutenu les événements et les tournois de jeu” explique sur le plateau de JV le Journal notre cher Ken Bogard, qui commente la baston vidéoludique depuis des années. “Ils organisent des compétitions depuis leur plateforme communautaire (...) et ils ont plusieurs fois été partenaires de l’EVO”. Le site PushSquare note aussi l’implication de Sony dans des rendez-vous eSport dédiés à Call of Duty, Fifa ou encore la Capcom Cup, en tant que sponsor. Et il suffit de se rendre sur la chaîne YouTube officielle de PlayStation pour s'apercevoir que la marque anime régulièrement des tournois compétitifs.
“Sony voit clairement le rachat de l’EVO comme une opportunité pour consolider son statut de plateforme de jeux de combat” analyse quant à lui PushSquare. Des titres qui ont d’ailleurs généré 1,1 milliard d’heures de gameplay sur les plateformes PlayStation en 2020, comme l'annonce la firme japonaise. On associe de plus facilement ces machines au versus fighting, en particulier grâce à la PS2 et son offre impressionnante en la matière, à l’époque. Une image toujours à l’ordre du jour : Street Fighter V et Guilty Gear : Strive, deux titres récents et majeurs pour le genre, sont des exclusivités console sur les machines de Sony.
Street Fighter V - Dan donne le coup d'envoi de la saison 5
EVO Pro-Sony ?
Deux jeux d’ailleurs d’ores et déjà au programme de l’édition 2021 de l’EVO, qui se déroulera entièrement en ligne, en août prochain. À leurs côtés pour l'instant, Tekken 7 et Mortal Kombat 11. Mais pour les internautes, un autre grand nom de la discipline manque déjà à l’appel, disponible en exclusivité chez un concurrent de PlayStation : Super Smash Bros, en particulier Ultimate, le dernier épisode en date (Melee est aussi disputé à l’EVO mais une récente affaire réduit les chances de le voir dans un événement online). Sur Twitter, beaucoup citent le nom de la licence de Nintendo. “Est-ce que (ce rachat, ndlr) veut dire que Smash ne sera plus présent ?” peut-on par exemple lire. Les fans de versus fighting craignent que le tournoi soit réservé aux jeux Sony.
Mark Julio, chargé du développement business de l’EVO, affirme cependant que l’événement restera ouvert “à toutes les plateformes”. Même Nintendo se veut rassurant, et explique chez IGN ne pas écarter la célèbre compétition pour les futurs rendez-vous Smash. De son côté, Sony annonce vouloir “préserver l’authenticité” du tournoi (deux de ses fondateurs resteront dans les parages en tant que conseillers) tout en le faisant évoluer :
Notre équipe est concentrée sur une mission : préserver l'authenticité de l'EVO pour la communauté des jeux de combat et trouver des moyens créatifs, aux côtés de nos fans, pour faire croître le tournoi et rendre ses événements et ses émissions plus amusants, attrayants et accessibles que jamais. L'EVO restera ce qu'il a toujours été : une compétition au format ouvert qui donne aux fans de jeux de combat de différents pays une chance de se connecter, de tester leurs compétences et de forger de nouvelles amitiés - Sony Interactive Entertainment, sur son blog officiel
"Continue ?"
Une évolution qui pourrait aussi passer, selon Ken, par l’internationalisation de l’EVO, comme amorcée en 2018 par les débuts de l’édition japonaise. “Le Japon, c’était la première étape. Ils voulaient s’installer en Amérique Latine, en Europe” nous explique le commentateur. Un plan très ambitieux, inimaginable il y a encore un an. Déjà à cause du Covid-19, qui a remodelé le tournoi en une version numérique, à distance. Mais surtout dans le cadre des accusations de harcèlement sexuel sur mineurs à l’égard de l'organisateur principal de l'EVO, Joey Cullar. Les principaux partenaires (Bandai Namco, Capcom, NetherRealm) annoncent alors se désister, avant que ce soit l’édition 2020 dans son ensemble qui soit finalement annulée.
“Nous voulons réaffirmer que les harcèlements ou les abus, qu’importe leur nature, n’ont aucune place à l’EVO ou dans nos futurs événements” entament ainsi Tony et Tom Cannon, deux fondateurs historiques du rendez-vous dédié au versus fighting, dans un communiqué. “Afin de vous garantir la confiance que vous avez tous placée dans (notre tournoi, ndlr), nous avons réalisé que nous avions besoin d’un partenaire stratégique et expérimenté qui respecte l’esprit de la communauté des jeux de combat”. Ce partenaire, c’est bien évidemment Sony et RTS. Il semblerait donc que ce rachat a été décisif pour éviter une mort par KO.