Afin de fêter les 11 années d’existence de sa série fétiche, Mojang a publié le 16 mai 2020 sur son site officiel l’annonce de son “rebranding”, à savoir un changement à la fois de nom et d’identité visuelle de son logo. Mojang devient Mojang Studios. Un petit vent de fraîcheur venu agiter les arbres cubiques qui ne semble pas être là par hasard. Quand un jeu dépasse les 200 millions d’exemplaires vendus et fait vivre des centaines d’employés, rien n’est anodin en matière de communication. Vous pensiez avoir fait le tour de Minecraft ? Mauvaise pioche ! Microsoft pourrait bien bâtir brique après brique un véritable empire lié à son jeu bac à sable.
Une popularité toujours grandissante façonnée par différents studios
Lorsque Microsoft a acheté la société suédoise Mojang en 2014 pour la rondelette somme de 2,5 milliards de dollars, nombreux sont les observateurs à ne pas avoir compris l’intérêt d’un tel investissement. À leur décharge, 50 millions de Minecraft furent vendus entre 2009 et 2014, un chiffre qui laissait penser que le titre avait déjà atteint son zénith en termes de popularité. Les départs des fondateurs de la compagnie à la finalisation de l’accord avec la firme de Redmond, dont celui de Markus Persson, n’inspiraient pas forcément de confiance quant à la suite des événements. “Mettre deux milliards sur un jeu qu’on peut avoir sans l’acheter, je ne suis pas sûr de l’intérêt” jugeait Ed Barton, analyste chez Ovum, dans des propos repris par Les Echos. Pourtant de 2015 à 2020, il s’est vendu plus de 150 millions d’exemplaires supplémentaires du soft aux petits cubes. Soit trois fois plus que ce qui a été fait auparavant sur une période comparable de cinq années. À l’origine de l’intégration réussie de Minecraft dans le portfolio de Microsoft, nous retrouvons Matt Booty. En guise de récompense, il se verra confier les rênes de Microsoft Game Studios, une place qui fut précédemment occupée par Phil Spencer.
Durant ces cinq dernières années, la popularité du jeu de Mojang n’a donc cessé de croître. Une notoriété défiant les pronostics due au travail de plusieurs studios reliés à la maison-mère. Contrairement à ce qu’il serait possible de croire avec ce rebranding, les différentes infrastructures qui produisent sur Minecraft partout dans le monde n’ont pas été ouvertes cette année. Néanmoins, l’absence de détails aussi bien sur le site officiel du groupe que sur LinkedIn a tendance à minimiser l’impact de ces sociétés dans le développement de la franchise. Nous avons donc directement contacté Mojang afin d’en savoir plus sur ces petites mains qui travaillent dans l’ombre de l’entité suédoise. Mojang Redmond, à l'instar de Mojang Stockholm, développe les jeux principaux (Minecraft , Minecraft Earth , Minecraft : Dungeons ) et s'occupe des initiatives éducatives, des partenariats, et du marketing global. À Tokyo et à Londres, les équipes se sont spécialisées dans l'expansion de la franchise. Les employés tokyoïtes s'occupent tout particulièrement de faciliter l'intégration de Minecraft dans le portfolio des machines de Sony et de Nintendo. Enfin, Mojang Studios dispose de bureaux partenaires en Inde, en Chine, en Australie, en Pologne, en Slovaquie et au Canada. Le fait de rappeler l'existence de ces entités via le nouveau nom de Mojang est une reconnaissance pour ces équipes dont l'existence n'est que trop rarement évoquée.
Le meilleur est-il encore à venir ?
Avec ses nombreux spin-off et divers essais dans différents genres, nous pourrions penser que Mojang a fait le tour de sa licence. Du haut de ses onze années d’existence, la franchise a pu s’essayer au hack’n slash, à la réalité virtuelle comme augmentée, à l’expérience narrative (Minecraft : Story Mode ), et même au party game en local par l’intermédiaire du mode Battle Mini Game. Les jeux ne se sont pas seulement infiltrés dans les chambres des enfants, ils ont aussi fait un saut dans les salles de classe. À l’image du gâteau faite dans le communiqué officiel du groupe annonçant le nouveau nom, la compagnie suédoise veut plus de parts. “Nous entrons dans les années 2020 en tant qu'entreprise multi-titres et multi-sites. Après Minecraft Earth et Minecraft Dungeons (...) nous jouons avec des idées pour de nouveaux jeux”. Là encore, ce n’est pas la première fois que Mojang développe des concepts en parallèle de sa série principale, puisque son jeu de cartes Caller's Bane , anciennement Scrolls, est sorti en 2014. Le groupe avait même édité Cobalt en 2016, side-scroller conçu par Oxeye Game Studio, studio possédant à sa tête le développeur principal de Minecraft, Jens Bergensten. Nul doute que Mojang devrait insister dans cette voie et multiplier les propositions, d’autant plus que la vidéo publiée à l’occasion de la fête d’anniversaire annonce deux projets secrets à l’étude. La vraie question est de savoir si toutes les futures productions resteront forcément attachées à la franchise mettant les Creepers à l’honneur. La réponse tend vers l'affirmative. “Nous travaillons actuellement sur plusieurs nouveaux jeux (...), tous dans la franchise Minecraft” pouvons-nous lire dans les offres d’emploi de la société.
La vidéo d’annonce diffusée pour les 11 ans ainsi que les offres d’emploi donnent quelques indices sur le futur de Mojang. Si deux nouveaux jeux sont actuellement en développement, la société souhaite également s’éloigner des limites de la 3D interactive en préparant un film et un spectacle “épique” (pour une MineCon ?). De son côté, le jeu de plateau attitré est arrivé l’année dernière chez Ravensburger, sous le nom de Minecraft : Builders & Biomes. L’avenir de Minecraft semble déjà tout tracé avec toujours plus d’add-ons au programme et une mise à niveau graphique grâce aux apports du ray-tracing. Nous avons vu arriver le 23 juin dernier la première mise à jour majeure du titre de l’année 2020, avec l'extension Way of the Nether ajoutant de nouveaux biomes (Soul Sand Valley, Crimson Forest et Warped Forest), de nouvelles créatures (les Hoglins et les Piglins) ou encore un nouveau matériau (la Netherite). Quant à la possibilité d’un Minecraft 2, l’idée semble abandonnée depuis longtemps par les cadres de la société. “On essaye de garder cette communauté unie, c'est la raison pour laquelle nos mises à jour sont gratuites. On ne veut pas demander aux joueurs de passer de Minecraft 1 à Minecraft 2” déclarait Helen Chiang, responsable de la franchise, en 2018.
Mojang change peut-être (légèrement) de nom, mais ses studios sur lesquels l’entreprise s’appuie vont continuer à développer Minecraft que ce soit par l’intermédiaire de jeux vidéo ou via d’autres procédés plus ou moins liés aux écrans. Il pourrait être intéressant de voir si la franchise aurait de quoi s’aventurer vers l’incubateur d’idées, comme a tenté de l’être Project Spark à la fin de sa vie. L’ancien directeur de la Team Dakota, Saxs Persson, a d’ailleurs rejoint les équipes de Mojang quand les mondes du créateur de jeux ont subitement été déconnectés des serveurs, en 2016. Soutenir les mods, c’est une bonne chose, mais proposer des outils accessibles à tous pour créer ses propres expériences ludiques sans devoir programmer en java en est une autre.