Depuis la nuit des temps (ou plutôt depuis l’arrivée des smartphones), on assiste à un combat aussi inutile que laborieux entre les fanatiques d’Apple et les assoiffés de liberté que sont les utilisateurs d’Android. Bien que la bataille semble être un remake de David contre Goliath, à cause du trop-plein de constructeurs rassemblés sous la bannière du système d’exploitation de Google, certains points de ce match sont tout de même intéressants pour les consommateurs. Avec la popularité de l’App Store et du Play Store, l’arrivée d’appareils toujours plus puissants et l’avènement des services de streaming, nos petites machines de poches deviennent de véritables consoles à part entière.
Mais, alors, quel OS a le meilleur profil pour les joueurs ? Est-ce que, réellement, l’un des systèmes d’exploitation réussit à se démarquer dans un milieu aussi complexe ? C’est ce que nous allons essayer de comprendre dans ce dossier, qui aiguillera au mieux les joueurs à la recherche de divertissement, même en déplacement.
Historique
Portant l’étiquette d’enfant pauvre depuis sa naissance, le jeu vidéo sur mobile a eu le droit à son lot de difficultés, de critiques et de changements. Pour retracer l’historique de ce dernier, il faut retourner en 1994 et se diriger vers un certain Hagenuk MT-2000, un téléphone portable qui n’en a que le nom, mais qui, néanmoins, est le premier appareil à embarquer un jeu. C’est d’ailleurs Tetris qui sera le premier acteur vidéoludique au sein d’un “mobile”... Le constructeur allemand ne le sait pas encore, mais en étant le premier à offrir un jeu dans de son téléphone, il ouvre les portes d’un futur marché faramineux qui commence, doucement mais sûrement, à prendre son envol en 1997. Car oui, c’est bien trois années plus tard qu’un certain Nokia sort une merveille du nom de 6110, avec l’un des plus gros cartons mobiles préinstallés en son sein : Snake. Pour les plus jeunes d’entre vous, on parle d’un serpent pixellisé qui a pour but de manger des pommes apparaissant de façon hasardeuse sur l’écran. Si cela peut sembler facile, il faut savoir qu’il est interdit de rentrer dans un “mur” ou de se mordre la queue, sous peine de devoir recommencer la partie. Chaque pomme mangée fait gagner des points, mais agrandit le serpent, rendant son corps de plus en plus gênant pour le bon déroulement de son repas, le but étant de faire un meilleur score que ses amis. Ainsi naquit le premier jeu qui rendra fous les joueurs et qui apportera un argument commercial en plus pour l’achat d’un téléphone portable. Une popularité rendue possible par la commercialisation du Nokia 3310, le téléphone de référence avec un prix plus léger rendant accessible l’acquisition d’un mobile.
Outre l'arrivée notable de Space Invaders entre temps, il faudra attendre quelques années pour assister à une évolution dans le milieu, tous les constructeurs se contentant d’inclure des jeux 2D dans l’appareil acheté, sans pour autant réussir à atteindre le coup de poker provoqué par Snake. Non, ce sont bel et bien les débuts des années 2000 qui vont mettre un petit coup de pied dans la fourmilière avec l’arrivée du protocole WAP.
Pour faire simple, on parle de l’ancêtre de l’internet mobile, qui offra la possibilité d’accéder à des plateformes de téléchargements surtaxés : sonneries, fonds d’écran ou encore jeux étaient disponibles, permettant de diversifier le divertissement sous réserve d’avoir un budget alloué.
Peu après, Nokia, fort de son expérience avec le jeu de serpent, a bien compris que la combinaison entre le téléphone mobile et le jeu vidéo avait un gros potentiel. Ainsi, en 2003, le groupe commercialise une certaine N-Gage , hybride entre la téléphonie et la console de jeux portables. À sa sortie, on retrouve des licences iconiques à l'image de Tomb Raider, Sonic, Call of Duty ou encore Spider-Man... Hélas, malgré les 2 millions d’exemplaires vendus, la nouveauté est un véritable échec pour plusieurs raisons : son prix, son écran à la verticale, peu de suivi des studios, mais surtout l’obligation d’enlever la batterie pour changer de jeu… Néanmoins, Nokia va une nouvelle fois s’approcher du Graal en lançant simultanément une plateforme en ligne de jeux vidéo à destination de son téléphone-console, sans pour autant réussir à intéresser les joueurs et les développeurs. Un produit pas assez élaboré et trop en avance sur son temps ? Certainement…
C’est en 2008 que les choses s’accélèrent, un an après la présentation du premier smartphone tactile créé par Apple : l’arrivée de l’iPhone sur le marché chamboule les codes, mais est sujette à de nombreuses critiques pour sa totale fermeture à la venue d’autres applications que celles développées par la Pomme. Ainsi, cette année-là, la firme de Cupertino surprend son petit monde en introduisant un espace réservé aux développeurs externes, où ils peuvent partager leurs créations à tous les possesseurs d’un iPhone (et plus tard d’un iPod Touch). L’App Store est né, et permet à tout à chacun de tenter sa chance, que ce soit en lançant une application ou un jeu. Angry Birds, Candy Crush, Subway Surfers ou encore Fruit Ninja : nombreux sont les contes de fées ayant vu le jour au travers de la boutique, qui a révolutionné l’accès aux jeux sur nos smartphones. Depuis, d’autres ont tenté de faire pareil : Windows, Ubuntu, Blackberry ou encore Samsung, sans réellement réussir à venir titiller le géant Apple. Malgré tout, en 2008, une autre entreprise high-tech est parvenue à s’agripper aux ailes de la Pomme : Google. En effet, l’américain a alors lancé l'Android Market, renommé Play Store en 2012, et profite de la popularité de son système d’exploitation Android auprès des constructeurs pour parvenir à attirer des studios dans son filet. Le début d’une belle “guerre”...
Performance
Après ce petit historique, nous avons toutes les cartes en main pour nous pencher plus en détail sur le sujet qui nous intéresse : qui d’iOS et Android possède le meilleur terrain pour le jeu vidéo ? Depuis des années, Apple souffre d’une critique sévère auprès de la communauté des joueurs, et on comprend pourquoi : selon l’opinion publique, la Pomme a des retards au niveau du matériel utilisé dans ses appareils, et ce, que ce soit sur iPhone ou sur Mac. Dans cette affirmation, il y a du vrai, mais également du faux : la firme n’opte pas pour les dernières cartes graphiques, processeurs et autres pièces, et il faut bien comprendre pourquoi. Avec son ordinateur, Apple ne souhaite pas devenir une référence dans le jeu vidéo, bien que les dernières années soient meilleures dans ce domaine, mais il aspire à proposer un outil performant pour monsieur Tout-le-Monde, afin de pouvoir faire des tâches basiques, mais également de la retouche photo, de la création vidéo ou musicale et bien d’autres. Du côté de l’iPhone, en revanche, Apple opte pour une grande partie de technologies maison pour pouvoir subvenir aux besoins des joueurs, tout en offrant assez de puissance pour faire du smartphone un véritable outil tout-en-un. Alors oui, la Pomme ne crée pas des machines de guerre, pour la simple et bonne raison que ses systèmes d’exploitation sont développés uniquement pour des appareils maison, et donc parfaitement optimisés. Google, lui, propose Android à de nombreux fabricants, qui sont obligés de laisser parler la puissance des technologies pour pallier au fait que l’OS n’est pas optimisé spécialement pour eux.
Alors, si sur le papier, les appareils Android ont de meilleurs arguments, c’est grâce au travail maison pour pousser toujours plus loin son système d'exploitation dédié qu’Apple n’a pas besoin d’embarquer des composants technologiques dernier cri. Si l’on regarde les benchmarks, de vieux appareils sous iOS battent des modèles Android bien plus récents grâce à l’optimisation. Même son de cloche pour les smartphones dernière génération, comme l’iPhone 11 qui, à sa sortie, a surpassé la plupart de ses adversaires.
Malgré tout, les choses peuvent bouger dans les prochaines années, certains constructeurs de smartphones se concentrent sur l’élaboration de téléphones gaming, un peu comme Nokia avec son N-Gage. Des performances époustouflantes, des écrans superbes et une cible toute trouvée : les joueurs purs et durs. On pense notamment à Asus, Nubia ou encore Black Shark qui ont déjà un pied dans le marché. Reste désormais à savoir si le succès sera au rendez-vous...
Le développement
On pourrait croire que sur ce point, les deux systèmes d’exploitation se valent, et pourtant… Il faut savoir que les développeurs ont tendance à se lancer en premier sur l’App Store, pour des raisons diverses. La plus grosse n’est autre que la “simplicité” de développer un jeu pour la boutique d’Apple, notamment car il faut l’adapter principalement pour deux appareils : l’iPhone et l’iPad. Du côté d’Android, l’histoire n’est pas la même, étant donné qu’on recense plus de 18 000 appareils avec diverses tailles d’écran et particularités spécifiques. Plus problématique, n’est-ce pas ?
Mais, ce n’est pas tout, puisque les joueurs de la plateforme iOS ont tendance à installer plus rapidement les nouvelles mises à jour du système d’exploitation, tandis que sur Android, le pourcentage est bien plus divisé avec une réticence plus grande pour le passage à une version ultérieure.
Pour finir, il faut savoir que les joueurs ayant un appareil Apple ont tendance à plus dépenser que leurs homologues , malgré un nombre plus important de possesseurs de smartphones Android. Car oui, si développer et donner naissance à un jeu est une belle chose, il faut tout de même que les développeurs tentent de gagner de l’argent pour renflouer un tel travail…
La qualité
Là encore, les différences sont notables et les “pour et contre” ne pourront qu’être définies par vous-même et vos préférences. D’un côté, on a Apple et ses règles qui demandent beaucoup de patience et de contraintes pour la publication d’un jeu : une fois le développement terminé, il faut alors soumettre la création à l’équipe en charge pour qu’elle teste et évalue votre jeu. Si c’est votre première fois, il y a de fortes chances que l’équipe vous recale pour un ou plusieurs petits problèmes dont vous ne connaissiez même pas l'existence. Il faudra alors corriger vos fautes, puis envoyer une nouvelle fois la build pour être soumis à un nouveau test (le procédé simple prend entre 1 et 3 semaines). Cette étape, bien qu’elle soit un peu contraignante, permet à Apple de ne pas laisser passer des applications ou des jeux interdits (nous en parlerons plus tard), mais surtout de s’assurer de la qualité derrière le développement, en confirmant qu’il y a un réel intérêt pour les utilisateurs. De plus, la Pomme fait souvent des nettoyages plus ou moins importants, pour s’assurer que des applications ou des jeux qui n’ont plus été mis à jour depuis longtemps et qui ne sont donc plus compatibles avec les derniers appareils disparaissent pour éviter aux joueurs une mauvaise surprise. Une façon d’éliminer les encombrements inutiles et donc de faire de la place aux autres.
Du côté d’Android, le raisonnement est différent puisque les employés de Google ne vérifient pas les applications et jeux du Play Store. Ainsi, on se retrouve avec plus de jeux que sur iOS (le nombre de jeux augmente de 30% chaque année) et donc un pourcentage plus grand de mauvais jeux qui, au mieux, ont quelques pépins et au pire, plantent totalement. Encore une fois, on parle d’une question de préférences : le Play Store contient plus de jeux et plus de probabilités qu’ils ne soient pas bons, mais offre également une plus grande variété !
Les restrictions
Dans le paragraphe ci-dessus, nous parlions de la mise en place d’une barrière mise en place par Apple pour évaluer et empêcher des jeux de voir le jour, dans le cas où celui-ci ne respecte pas les règles. Plusieurs catégories n’entrent pas dans les petits papiers du géant de Cupertino, mais nous ne sommes, de plus, pas à l’abri de l’arrivée d’une nouvelle règle qui mettra fin à des milliers d’applications en quelques heures. C’est notamment le cas des jeux de casino, qui ont sérieusement pris un coup ces dernières années, avec la disparition d’une centaine d’entre eux.
Une goutte d’eau dans l’océan, mais qui a dû embêter bon nombre de joueurs et de développeurs. Le Play Store, lui, est totalement libéré de ces chaînes, laissant voguer les jeux au sein de la boutique, n’intervenant que si un bad buzz énorme survient pour l’un d’eux. Chose qui n’arrive que très rarement, et en toute logique, lorsque vous téléchargez une création du Play Store, il y a de très fortes chances que vous puissiez en profiter toute votre vie !
Le coût
Les réponses dans ce paragraphe ne sont autres que le résultat de deux points cités ci-dessus : le Google Play Store permet de profiter d’un plus grand nombre de jeux, car moins de barrières pour les utilisateurs. Qui dit plus de jeux dit plus de gratuités… Donc, si vous souhaitez jouer en faisant attention à vos dépenses, il faudra opter pour un smartphone Android, mais prudence… Vous n’êtes pas à l’abri de télécharger un véritable navet !
Du côté de l’App Store, on retrouve de nombreux jeux payants en exclusivité qui sont d’excellents crus et qui raviront les amateurs en tous genres, surtout du côté des jeux d’énigmes et d’aventures. Concernant les plus gros hits, pas de doute à se faire, ils sont en général disponibles sur les deux plateformes, même s’il peut y avoir un décalage entre les différentes sorties.
Apple Arcade vs Google Play Pass
Autre preuve que la Pomme la plus célèbre de monde veut s’investir encore plus dans le monde du jeu vidéo, ils ont lancé en septembre 2019 un nouveau service portant le nom d’Apple Arcade . Késako ? En échange d’un paiement mensuel, ils proposent un accès à un catalogue de jeux en illimité, sans publicités ni achats supplémentaires. Le gros plus, c’est qu’Apple a réussi à attirer de nombreux gros studios pour des titres disponibles en exclusivité temporaire ou définitive, la plupart étant développé pour la plateforme. On pense notamment à Oceanhorn 2, Cat Quest II ou encore Sonic Racing. Cette initiative est une belle réponse à ceux qui critiquent Apple pour leur manque d’investissement dans le gaming, jouant sur le côté bibliothèque avec des titres inédits !
Google a tenté de répondre à la Pomme, un peu tardivement, en sortant son équivalence du nom de Google Play Pass. Seul bémol, le catalogue ne contient pas d’exclusivités à l’heure actuelle, et pire encore, le service n’est pour le moment disponible qu’aux États-Unis. La stratégie de Google est simple : miser sur la quantité, plutôt que la qualité. En effet, le Play Pass contient un catalogue de 350 jeux là où Apple Arcade arrive à 150 titres, en jouant sur l’exclusif.
Concernant le tarif, il est le même pour les deux services : 5,49€ par mois avec la possibilité de partager l’accès aux membres de sa famille et donc de réduire le coût.
Les compatibilités
Avec l’arrivée d’iOS 13, Apple a fait fort dans le secteur du jeu vidéo, lançant donc le fameux service Apple Arcade, mais faisant également une annonce fracassante. En effet, la firme à la Pomme a annoncé le même jour un partenariat avec Sony et Microsoft afin de proposer une compatibilité avec les manettes Dualshock 4 et les manettes Xbox One, pour une meilleure expérience de jeu sur les iPhone et iPad. Bien sûr, auparavant, il était possible de connecter des manettes MFi (Made For iPhone) aux appareils iOS, mais il fallait être vigilant lors d’un achat : toutes les manettes Bluetooth n’étaient donc pas compatibles.
Du côté des appareils Android, c’est plus simple puisque toutes les manettes Bluetooth sont compatibles. Les pads Xbox le sont également depuis un bon bout de temps et Sony a ouvert les vannes en même temps qu’il l’a fait avec Apple.
Une façon pour Microsoft et Sony de préparer leur système de jeu en streaming sur les plateformes respectives ? Très certainement !
Le streaming
L’année 2020 semble marquer le coup d’envoi de nombreux services de streaming, même si certaines sociétés se sont déjà lancées quelques mois en arrière. Quid de ces nouvelles plateformes ? On parle d’offrir la possibilité à tout à chacun de pouvoir jouer aux derniers jeux disponibles sur le marché, quelque soit l’appareil utilisé ! Comment est-ce possible ? C’est très simple : un serveur puissant à distance s’occupe de lancer le jeu en question et vous envoie le flux vidéo/audio de ce dernier directement sur votre appareil. Bien sûr, en échange, il vous faudra posséder un certain débit Internet pour ne pas rencontrer de problèmes de latence, mais avec l’arrivée générale de la fibre, tout le monde devrait pouvoir se laisser tenter par cette merveille technologique et ainsi faire des économies.
Le gros plus, c’est que certains services ont décidé de se lancer sur mobiles et tablettes, ce qui permet de jouer à des jeux AAA n’importe où, ou presque. Ainsi, sur iOS, on retrouve notamment xCloud de Microsoft en bêta, GeForce Now de Nvidia sur Mac ou encore le français Shadow. Ça fait peu, me direz-vous, et vous avez raison : le problème vient une nouvelle fois d’Apple et de ses règles, qui refuse des applications ayant un store interne ou un design ressemblant à une boutique. Des problématiques difficilement contournables pour les acteurs du marché, qui attendent patiemment un geste de la Pomme ou un assouplissement de la politique.
Du côté d’Android, c’est plus intéressant puisqu’on retrouve les mêmes que sur iOS, mais on ajoute Blacknut (beaucoup de jeux indépendants), Stadia (uniquement les téléphones Pixel pour le moment), GeForce Now de Nvidia ou encore Vortex.
Le bilan
Comme il fallait s’y attendre, il est impossible de réellement démarquer les deux systèmes d’exploitation sur le plan gaming, les OS d’Apple et de Google ont tous deux des points forts et des points faibles. Dans cet article, nous avons essayé de mettre le tout en avant, pour que chacun puisse trouver chaussure à son pied selon ses différentes attentes. Là où Apple joue sur l’exclusivité et la sélection, Google mise sur la diversité et la tentative d’attirer le plus possible d’acteurs du jeu vidéo.
Que l’on voit son smartphone comme étant une simple possibilité de se divertir dans les transports en commun ou que l’on voit en lui le futur du jeu grâce au cloud gaming, que l’on cherche un téléphone bon marché ou un OS parfaitement taillé pour son appareil, les deux constructeurs offriront tout ce que vous recherchez, à des degrés différents.
L’augmentation de jeux compétitifs se lançant dans l’esport, l’arrivée en masse de services de streaming et la multiplication des partenariats avec des pionniers du gaming prouvent que le mobile a un rôle à jouer dans les années qui arrivent. Nous ne sommes qu’aux prémices de ce marché de niche, qui risque de faire parler de lui pendant encore longtemps !