BHL : (avec un ton condescendant)
Il est évident, Socrate, que l'utilité d'un homme peut être jugée par le revenu qu'il génère. Voyez-vous, moi, je crée de la richesse, des emplois, et j'accumule des biens. Cela prouve que je suis plus utile à la société qu'un simple caissier, par exemple, qui ne fait que passer des marchandises d'un côté à l'autre de son comptoir. Mon métier contribue davantage au bien-être collectif que le sien.
Socrate : (avec calme et curiosité)
Voyons, mon ami, si je comprends bien, tu affirmes que la mesure de l'utilité d'un homme dans la société est proportionnelle au revenu qu'il tire de son activité, n'est-ce pas ?
BHL :
Précisément ! Plus je gagne, plus je suis utile, car cela montre que je fournis quelque chose de précieux à la société.
Socrate :
Et cet argument repose sur l'idée que ce qui est utile à la société est ce qui est valorisé en argent. Est-ce bien cela ?
BHL :
Exactement, l'argent est la preuve ultime de la valeur d'une contribution.
Socrate :
Réfléchissons ensemble, si tu le veux bien. Suppose que je rencontre deux hommes : l’un est un médecin, qui guérit les malades et sauve des vies, mais il ne gagne qu’un revenu modeste ; l’autre est un joueur professionnel, qui gagne des sommes considérables en divertissant les foules. Selon ton raisonnement, qui de ces deux hommes est plus utile à la société ?
BHL :
Évidemment, le joueur ! Puisqu’il gagne plus d’argent, cela montre qu’il est plus en demande, donc plus utile.
Socrate :
C'est une perspective intéressante. Mais permettons-nous d’examiner une autre question. Si, par malheur, la ville était frappée par une épidémie et que nous devions choisir entre la présence d'un médecin pour soigner les malades ou celle d'un joueur pour divertir la population, lequel des deux te semblerait plus précieux pour la survie de la cité ?
BHL : (avec hésitation)
Eh bien, dans ce cas précis, le médecin serait plus utile, bien entendu.
Socrate :
Ah, il semble donc que l’utilité d’un homme ne soit pas toujours déterminée par son revenu, mais peut-être par les besoins immédiats ou essentiels de la communauté, n'est-ce pas ?
BHL :
Cela pourrait être vrai dans certains cas, mais ces situations sont exceptionnelles. Dans la plupart des cas, c'est l'argent qui révèle la valeur réelle des contributions.
Socrate :
Je vois. Mais dis-moi, pense-tu que tous ceux qui accumulent de grandes richesses le font parce qu'ils apportent nécessairement quelque chose de bon ou de juste à la société ?
BHL :
Évidemment ! Ceux qui réussissent dans le commerce le font parce qu'ils offrent des biens et des services que les gens veulent.
Socrate :
Prenons l'exemple d'un usurier qui prête de l'argent à des taux exorbitants à ceux qui n'ont pas d'autre choix que de s'endetter pour survivre. Cet homme, grâce à ses prêts, amasse une grande fortune. Selon ton raisonnement, cet usurier est donc très utile à la société, n'est-ce pas ?
BHL : (avec agacement)
Il exploite la faiblesse des autres. C'est un cas particulier.
Socrate :
Mais s'il gagne plus que le caissier dont tu parlais tout à l'heure, alors n’est-il pas, selon ta logique, plus utile que lui ? Ou bien faudrait-il admettre qu'il existe une distinction entre l’utilité réelle d’un métier et la richesse qu’il génère ?
BHL :
Je vois où tu veux en venir, Socrate, mais la société valorise certaines compétences et certaines actions plus que d’autres. C’est pourquoi certains gagnent plus. Cela prouve leur importance.
Socrate :
Alors, l’argent est-il toujours le bon juge de ce qui est important ou juste ? Ou pourrait-il parfois masquer des injustices ou des déséquilibres dans la société ? Peut-être que l’argent seul ne peut pas nous révéler toute la valeur d’une action ou d’un individu, car il ne tient pas compte du bien-être véritable de la communauté. Ne penses-tu pas que la valeur d’un travail devrait être mesurée non seulement par l'argent qu'il rapporte, mais aussi par son utilité pour le bonheur, la santé et la justice au sein de la cité ?
BHL : (gêné)
Mais sans l’argent, comment jugerions-nous la valeur des choses ?
Socrate :
L’argent est un outil pratique, je l’admets, mais il est aveugle à la justice et à la vertu. Nous ne pourrions pas juger la bonté d'un homme ou d'une action uniquement par la richesse qu'ils rapportent. Un caissier, par exemple, en facilitant la vie quotidienne de nombreuses personnes, peut accomplir un travail humble mais indispensable. Peut-être devrions-nous juger la valeur des métiers non par leur revenu, mais par leur contribution à l'harmonie et au bien commun de la cité. Qu’en penses-tu ?
BHL : (après un silence)
Tu poses de nombreuses questions, Socrate, et je dois admettre que je ne suis pas certain d’avoir toutes les réponses.
Socrate :
C’est le début de la sagesse, mon ami : reconnaître que nous ne savons pas tout. Ensemble, nous pouvons continuer à explorer ces questions pour mieux comprendre ce qui rend vraiment une vie, ou une profession, bonne et utile.