Les mathématiques semblent à première vue quelque chose de très rationnel, qui peut se passer de tout ressenti, de toute subjectivité.
Mais selon moi la subjectivité est en fait cachée dans la définition même des mathématiques : Les objets que les mathématiques se donnent (les entiers, les réels, les fonctions) sont certes féconds de théorèmes mais ils n'en restent pas moins arbitraires et adoptés subjectivement.
Plus intéressant, j'ai l'impression qu'il y a une ambivalence, 2 conceptions possibles des mathématiques :
- Soit les mathématiques sont considérées comme un système fermé, par exemple des axiomes fixés une fois pour toute et leurs conséquences. Et il y a là quelque chose qui est de l'ordre de la foi, une foi que tout ce qui serait au delà de ces axiomes est en fait déjà inclus dedans.
- Soit comme un système ouvert, par exemple un ensemble de théories, potentiellement incomplètes, et toutes leurs généralisations possibles. Et il y a quelque chose qui est de l'ordre de la foi, une foi que la régression infinie qui en découle a du sens, ou qu'on peut lui en donner, et qu'elle est plus qu'une fuite en avant.
Il me semble que l'intérêt qui est porté pour l'indécidabilité (les théorèmes de Gödel) vient essentiellement d'un glissement dans la subjectivité des mathématiciens. Je pense que des mathématiciens comme Pascal, Euler, Gauss, auraient été capables de théoriser la décidabilité, mais juste ils ne l'ont pas fait car dans leur subjectivité cette partie des mathématiques n'aurait pas vraiment eu de sens, ils auraient vu ça comme une histoire de shadoks, un détournement de leur science.
Hilbert l'a plus ou moins admis en affirmant : « Nul ne doit nous exclure du Paradis que Cantor a créé. ». Il y a quelque chose qui est de l'ordre du subjectif, l'un trouvera que les mathématiques de Cantor sont un Paradis, l'autre un Enfer.