Pour rappel :
- Arabe = Péninsule arabique, une partie du Levant
- Berbères = Maghrébin; Algérie, Maroc et Tunisie actuels
Les troupes arabo-berberes, aux ordre de l'émir de Cordoue, dirigeant de l'Espagne musulmane, sont installés dans les environs du Golfe de Saint Tropez depuis près de 50 ans.
Ils mènent depuis qu'ils sont arrivés, des massacres, des pillages et toute sorte d'infamies tel que le viol et la mise en esclavage de femmes et d'enfants français dans toute la région du Dauphinée, de Provence, du Piémont, de Suisse, de Savoie remontant même jusqu'au Jura.
Ces femmes et ces enfants seront ensuite revendus dans tout le monde musulman; dans la péninsule ibérique, au nord de l'Afrique jusqu'au Levant et la péninsule arabique, pour l'esclavage sexuelle, ou faire des enfants mâles des eunuques pour servir dans les palais.
Hugues, comte de Provence, décide d'en "finir" avec ces barbares.
Nous allons voir par la suite pourquoi j'ai mis le mot "finir" entre guillemets
- 942 -
"Les Sarrazins ne mirent plus de bornes à leurs cruautés, et firent de la plus grande partie d’un pays naguère florissant une affreuse solitude.
Les villes les plus importantes furent renversées, les châteaux détruits, les églises et les couvens réduits en cendres.
Le séjour de l’homme, est-il dit dans une vieille charte, était devenu le repaire des bêtes féroces.
En effet, on lit dans les chroniques du tems, que les loups s’étaient tellement multipliés, qu’on ne pouvait plus voyager en sûreté.
Sur ces entrefaites, Hugues, devenu comte de Provence, et que l’exemple du roi Louis n’avait pas éclairé, s’était rendu en Italie pour y disputer la couronne du royaume de Lombardie.
Les cris de ses sujets l’ayant enfin rappelé de ce côté des Alpes, il annonça l’intention de chasser entièrement les Sarrazins.
Il s’agissait de s’emparer d’abord du château Fraxinet, à l’aide duquel les Sarrazins se maintenaient en relation avec l’Espagne et l’Afrique, et d’où ils dirigeaient leurs expéditions dans l’intérieur des terres. Comme il fallait que ce château fût attaqué par mer et par terre, Hugues envoya demander une flotte à l’empereur de Constantinople, son beau-frère; il demandait aussi du feu grégeois, l’arme alors la plus efficace pour combattre les flottes sarrazines.
En 942, la flotte grecque jeta l’ancre dans le golfe de Saint-Tropès; en même tems Hugues accourut avec une armée.
Les Sarrazins furent attaqués avec la plus grande vigueur; leurs navires et tous leurs ouvrages du côté de la mer furent détruits par les Grecs.
De son côté, Hugues força l’entrée du château, et obligea les barbares à se retirer sur les hauteurs voisines.
C’en était fait de la puissance des Sarrazins en France; mais tout-à-coup Hugues apprit que Béranger, son rival à la couronne d’Italie, qui s’était enfui en Allemagne, se disposait à venir lui disputer le trône.
Alors, ne songeant plus aux maux qui pesaient sur ses malheureux sujets, il renvoya la flotte grecque, et maintint les Sarrazins dans toutes les positions qu’ils occupaient, à la seule condition que, s’établissant au haut du grand Saint-Bernard et sur les principaux sommets des Alpes, ils fermeraient le passage de l’Italie à son rival.
C’est à ce sujet que Liutprand interrompt son récit pour adresser cette apostrophe à Hugues:
«Voilà une étrange manière de défendre tes états! Hérode, pour n’être pas privé d’un royaume terrestre, ne craignit pas de faire tuer un grand nombre d’innocens; toi, au contraire, pour arriver au même but, tu laisses échapper des hommes criminels et dignes de mort.
Sans doute tu ignores quelle fut la colère du seigneur contre le roi d’Israël, Achab, qui avait épargné la vie du roi de Syrie, Benadab; le seigneur lui dit: Puisque tu as laissé vivre un homme que j’avais condamné à perdre la vie, ton ame paiera pour son ame et ton peuple pour son peuple.»
Liutprand se tournant ensuite vers la montagne du Grand-Saint-Bernard, lui adresse ces vers:
«Tu laisses périr les hommes les plus pieux, et tu offres un abri aux scélérats appelés du nom de Maures.
Misérable! tu ne rougis pas de prêter ton ombre à des gens qui répandent le sang humain et qui vivent de brigandage! Que dirai-je? puisses-tu être consumée par la foudre, ou brisée en mille pièces et plongée dans le chaos éternel»"
Jacques Reinaud Toussaint, Les invasions des Sarrazins en France