français, eux, considèrent souvent la robotique comme "un objet de veille plus qu'un sujet d'actualité". Les rares pure players qui ont émergé s'appellent Aldebaran Robotics ou Robopolis.
Aussi en France, Erdyn note principalement des atouts dans la maîtrise des logiciels utilisés dans la robotique, dans la navigation, ou la robotique humanoïde, mais constate une faiblesse dans la capacité à produire industriellement les robots. "Pour la filière française, le robot domestique ne semble pas être une voie de développement industriel à court terme", estime donc le cabinet, qui explique avec force détails pourquoi l'Allemagne, le Japon, les Etats-Unis, la Corée du Sud ou dans une moindre mesure l'Italie sont mieux pourvus, avec chacun leurs forces et leurs faiblesses. En revanche, "les positions sont à prendre sur des marchés à plus long terme comme le compagnon, qui pourrait voir de premiers produits à horizon de cinq à dix ans". Le robot Nao, produit par Aldebaran, fait office de belle promesse.
Mais au delà des aspects purement industriels et économiques, le rapport du cabinet Erdyn s'intéresse aussi à l'environnement sociétal dans lequel doit nécessairement évoluer la robotique.
Il dresse ainsi une liste de facteurs sociétaux qui favorisent l'essor de la robotique personnelle. Certains sont osés ("l'augmentation du niveau d'emploi des femmes" qui est "marginalement compensé par un investissement des hommes dans les tâches ménagères", ce qui favorise les "solutions de substitution" à bobonne), voire cyniques ("l'augmentation du niveau d'éducation du public diminue les ressources humaines moins qualifiées. On manque ainsi actuellement de personnes pouvant réaliser des tâches courantes").
Par ailleurs, le rapport se penche sur les questions éthiques et juridiques posées par la robotique. Par exemple :
La robotique humanoïde ou à forme animale est-elle acceptable ? Cette question pose un problème éthique important. Considérant la robotique humanoïde, mais la question se pose aussi avec les robots en forme d'animaux, une position couramment exposée pose comme postulat que le robot humanoïde sera plus facilement accepté par les personnes, notamment les personnes âgées ou en état d'altération des facultés mentales. La raison, vérifiée notamment dans le cas du robot thérapeutique Paro au Japon, de cette acceptabilité améliorée, est imputée à la dimension affective que prend la " relation " avec le robot. Cette dimension pose cependant un problème éthique important, qui semble aujourd'hui peu traité par la communauté de la robotique, mais qui est présente à l'esprit des prescripteurs potentiels et des acteurs de l'offre de service liée. Certains observateurs pointent en effet du doigt les potentiels leurres affectifs que représentent ces objets. Les différences d'approche de ces questions éthiques selon les zones géographiques ne sont pas mises en évidence aujourd'hui. Autre question éthique liée à l'humanoïde : l'imprévisibilité potentielle des réactions des robots au regard de leur aspect humain
Evidemment, se pose aussi la question de l'emploi. Le rapport raconte par exemple que dans les années 1980, la RATP avait été à la pointe en commandant à une PME française une vingtaine de robots ménagers. Mais l'exploitation a été arrêtée quelques années plus tard notamment à cause des "difficultés d'acceptation par le personnel" (rappelons qu'à ce sujet, Numerama a trouvé que l'embauche par Foxconn d'une armée d'un million de robots pour remplacer ses ouvriers était sur le long terme une excellente nouvelle sur le plan social) :
La question de l'emploi. Cette question (...) est de facto très liée à des questions d'acceptabilité sociale : le robot, en reproduisant des gestes humains, est-il intrinsèquement destructeur d'emplois ? La réponse est évidemment négative : aucun lien systématique ne saurait être fait entre l'usage d'un outil et les impacts en termes d'emploi. Cependant cette question peut être un réel frein à l'acceptabilité des robots dans des environnements professionnels, privés, ou dans les espaces publics.
Sur le plan juridique, comme nous l'avions vu dans une grande enquête consacrée aux futures voitures automatisées, c'est surtout la question de la responsabilité civile voire pénale en cas de problème qui pose des difficultés. Hors automobile, la question est très importante pour les robots dédiés à des tâches de sécurité (surveillants de prison, vigiles, drones de protection des frontières, etc.) :
Même si cela va dépendre d'un pays à l'autre, il y a peu de chance pour que la réglementation autorise des robots à intervenir de façon physique pour éviter une infraction par exemple, ce qui limite les avantages à employer ces derniers. À noter qu'aujourd'hui, les robots de surveillance sont soumis aux mêmes contraintes réglementaires que les systèmes de vidéosurveillance. On peut aussi citer l'inexistence de cadre réglementaire pour les drones à usage civil en France. Du fait de leur utilisation dans un cadre strictement privé, les contraintes réglementaires devraient être moins fortes pour les robots de surveillance domestique.
Un vaste sujet, pour un domaine promis à devenir la vraie révolution sociétale après l'invention de l'informatique au 20ème siècle.
http://www.numerama.com/magazine/22968-l-avenir-de-la-robotique-en-france-et-dans-le-monde.html
Aujourd'hui, la question est moins de savoir si la robotique de service va changer le monde, mais plutôt de savoir quand et comment elle va le faire. De nombreux professionnels se sont déjà engagés sur cette route, semée de nombreux défis techniques, sociétaux et règlementaires. C'est pourquoi nous avons donné la parole à des acteurs rhônalpins afin d'apprécier leurs visions de la robotique. Nous vous livrons ici quelques morceaux choisis de nos entretiens.
• R comme Robolution
Anticipant les transformations induites par les robots, Bruno Bonnell, auteur du live « Viva la Robolution », prévoit une « robolution » dans les 20 prochaines années. « A l’avènement des machines industrielles, mues par la vapeur puis l’électricité, au milieu du 19e siècle, on a utilisé le terme de révolution industrielle. Avec le recul de l’histoire, on a constaté que ça avait tellement transformé la société, qu’il s’agissait d’une révolution industrielle totale. Ici, j’anticipe sur cette révolution apportée par la robotique : cette intelligence accordée aux machines va effectivement transformer tout notre corps social ».
Mais certains acteurs restent prudents. Nicolas Beroud, responsable technologies-clés et territoires à l'Agence d'Etudes et de Promotion de l'Isère (AEPI), reconnaît davantage la montée en puissance de l'électronique et de l'intelligence qu'une robolution. « On pourra parler de rupture lorsque la robotique aura un impact important sur l’environnement de la vie quotidienne et les modes de vie. Plus largement, je pense que l’on assiste surtout à de l’intégration de plus en plus poussée d’électronique dans notre environnement, des capteurs, de l’intelligence embarquée, etc. L’évolution des ventes du robot aspirateur d’IRobot est un signe important mais l’idée de robolution est sans doute excessive. Il y a d’autres évolutions sur le plan technologique et industriel qui sont davantage porteuses de changement que la robotique ».
Jean-Christophe Simon, Directeur général de l'innovation du Groupe SEB, parle d'un tournant. A l'avenir de nous dire si les années 2010 sont celles d'une robolution ! « Nous n’en sommes plus à nous demander « est-ce que l’on a les technologies ? » parce que les technologies sont effectivement disponibles. On ne se demande pas « est-ce que le consommateur sera effrayé ou pas ? » parce que le consommateur est prêt à utiliser des produits robotisés. (…) Par ailleurs, sur le plan économique, il existe désormais des entreprises positionnées sur ce champ de la robotique de service et qui ont un modèle économique viable. Après, tout ne va pas se jouer en un an. Nous sommes dans une période de cinq ou dix ans par rapport à laquelle on pourra dire qu’il y a eu un avant et un après. »
Pour Stéphane Hugon, sociologue au Centre d'études sur l'actuel et le quotidien de l'Université René Descartes-Sorbonne Paris V, nous sommes actuellement dans une période favorable à l'émergence du marché de la robotique de service en raison d'une évolution de notre perception des objets en général, et des robots en particulier, de la moindre influence de notre éducation judéo-chrétienne et notre évolution de notre rapport à la nature.
• I comme Intelligence
Gérard Bailly, directeur de recherche CNRS au laboratoire Grenoble Images Parole Signal Automatique (GIPSA), souligne combien il est important d'allier l'intelligence embarquée et la mécanique pour produire des robots capables de s'adapter à l'homme et l'environnement. « Si la France veut trouver sa place sur ce marché, il faudra jouer sur les deux tableaux : la maîtrise de l’intelligence embarquée et la maîtrise de la mécanique du robot. Il faut être en capacité de gagner le double pari de l’intelligence et de la solidité. (…) Pour moi, le principal défi de la robotique est là : faire en sorte que les robots puissent vivre dans un environnement humain, et non l’inverse ! C’est là un point fondamental. Un robot en contact avec l’homme ne peut pas se contenter d’être efficace dans la fonction qui lui est assignée, il doit aussi être capable de s’insérer dans l’univers des relations sociales, d’en percevoir les codes et la complexité, d’intégrer la culture sous-jacente et de décrypter la diversité des émotions. La communication verbale, visuelle et gestuelle du robot doit traduire cette immersion dans le monde humain ».
• U comme Usages
Jean-Christophe Simon, Directeur général de l'innovation du Groupe SEB, préconise une approche croisée reposant à la fois sur les usages en cours des consommateurs et les usages permis par les robots. « Il s’agit de s’interroger à la fois sur les nouveaux usages qui émanent des consommateurs et