Comment le caractériser ? Je ne parle pas du Bruit et de la Fureur puisque c'est une exception, mais plutôt de Sanctuaire ou Lumière d'août, ou encore Sartoris.
J'ai l'impression qu'il a un style lent, tranquille, qui s'attarde sur des gestes, distord le temps, et aussi omet volontairement des trucs... enfantin aussi, comme dans Tandis que J'agonise.
On dit qu'il a un grand vocabulaire et c'est sûrement vrai quand ça se rapporte aux choses de la ferme aux plantes ect mais pour le reste ma foi ! je le trouve assez sobre le Faulkner.
Ne parlons pas de ces bouquins pas connus, ils sont pour la plupart bigrement pénibles à lire, comme La Ville ou encore Descends ! Moïse. Ses nouvelles je les trouve bien tapées aussi !
Il est assez inégal Faulkner. Il excelle je trouve pour les personnages, tous, les noirs comme les enfants. Mais son style la plupart du temps est pas trop marqué, il reste bien classique non ? en dehors des monologues intérieurs ect...
Mais il est d'une finesse dans ce style classique c'est certain ! Prenez l'incipit de Sanctuaire. Cet incipit il m'a toujours marqué.
"Caché derrière l'écan des broussailles qui entouraient la source, Popeye regardait l'homme boire. Un vague sentier venant de la route aboutissait à la source. Popeye avait vu l'homme, un grand sec, tête nue, en pantalon de flanelle fatigué, sa veste de tweed sur le bras, déboucher du sentier et s'agenouiller pour boire à la source. La source jaillissait... "
C'est absolument classique niveau style sauf cette deuxième phrase hypnotisante. Y répète la source, y'a quelque chose avec l'eau, puis Popeye qu'est caché, ce prénom qui arrive deux fois comme ça... On comprend des trucs mystérieux... l'avait pas à répéter quatre fois ni source ni deux fois Popeye ; la source on s'en branle un peu, mais elle est là quand-même, et Popeye il l'a vu DEUX fois en plus de ça... Faulkner il se répète l'enfoiré et c'est un malin c'est comme ça qu'il hypnotise, dès le début, glisse ça dans ses phrases qui ont l'air de rien, mais qui cachent la fatalité des choses... La fatalité telle qu'elle est comprise par les enfants... Popeye qui observe la source de la vie à laquelle il n'a pas accès... On sait pourquoi qu'il en a pas accès le con, il bande pas. Faulkner il instille du mystère dans ses petites phrases, c'est bien joué.
Puis à la fin il renvoit la source dos à dos. Dans la première fois le mot revient SIX fois ! C'est du fait exprès. Y'a un jeu de miroir et d'angles. Tout ce répète avec un peu de changement tout de même. Ça se transforme sans qu'on s'en rende compte. À la fin il nous a eu.
Première page*
Se* répète
Bourbonneux
Je dirais à la fois virtuose et abrupt. Sa grande qualité c'est de te donner l'impression d'y être, d'être avec eux exactement à cet endroit, à ce moment-là.
Au revers de la médaille, il malmène son lecteur avec des obsessions qui confinent au maniaque, une opacité voulue, une ambiance lourde et assombrie à gros coups de pinceaux.
Je sais pas trop quel était son projet: un regard d'esthète caressant des personnages simples et ravagés ? Un réalisme caustique ? Explorer des traits psycho-pathologiques / généalogiques ? Des comédies tragiques noires comme la suie ? Moralisme ?
J'en ai lu trois, je dirais que j'en ai aimé un et demi. Je lirai peut-être Light in August un de ces jours.
Moi de ce que j'ai lu de lui j'appelle ça du stream of conciousness (absalon, as i lay dying).
Son projet était de peindre l'amerique de la civil war, la société qui se déliquetait juste avant aussi car fondée sur la faute blanche de l’esclavagisme couplée au génocide des natifs.
C'est ce que j'ai compris en tout cas, je trouve qu'Absalon concentre cette puissante raison d'être du projet.
Dans ces nouvelles je l'ai trouvé moins fixé à son projet, même si elles sont excellentes vraiment à ne pas rater.