La peur est subjective et les phobies sont on ne peut plus éclectiques. Par conséquent, il n'est pas aisé de définir ce qu'est la peur. En revanche, s'il y a une chose dont nous sommes sûrs, c'est que cette émotion est intense et indubitable. Voilà ce que la série Silent Hill a su reproduire : ce sentiment de confusion que l'on ressent en essayant de déterminer l'anatomie d'une créature aperçue au détour d'un couloir ou encore en découvrant des révélations scénaristiques qui amènent plus de questions que de réponses. En jouant à Silent Hill, le joueur connaît donc la peur, une peur qui lui donne une boule au ventre et qui le ferait presque douter de sa capacité à continuer le jeu.
Si la plupart des survival-horror jouent la peur sur un critère en particulier (la surprise, le confinement, l'obscurité...), Silent Hill réussit à mêler diverses mécaniques pour pouvoir recréer cette émotion dans sa plus pure expression. Ainsi, on retrouve dans tous les épisodes les éléments nécessaires à une appréhension permanente chez le joueur, à savoir : une mise en contexte (la ville de Silent Hill qui fait office d'Enfer récurrent) des environnements clos, sombres et glauques, des scripts surprenants, un bestiaire dérangeant et une ambiance sonore ciselée avec précision. Tout est réuni pour mettre le joueur mal à l'aise.
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Paradoxalement, l'envie d'avancer est toujours présente dans un Silent Hill. Car l'on sait que des décors spectaculaires nous attendent, parce que l'on veut tirer notre personnage de ce pétrin, et surtout pour les cinématiques. Tout en restant cohérentes, les cinématiques ont la particularité d'être terriblement reposantes et en totale opposition aux phases de jeu. Grâce aux voix douces des protagonistes et aux fabuleuses compositions d'Akira Yamaoka, le joueur trouve un moment de répit dans ces scènes vidéo. C'est un paradoxe qui participe à l'ambiguïté légendaire de la série et qui fait partie des nombreux symboles figurés par ses développeurs.
Nous avons donc un concept basé sur l'affrontement entre le plaisir et la souffrance, entre l'attraction et la répulsion. Un concept qui fait preuve d'une étonnante originalité et d'une grande ingéniosité. Mais il ne serait rien sans une mise en forme. La Team Silent lui a donc insufflé une vie par le biais de la ville de Silent Hill. A travers les épisodes, on assiste ainsi à une descente récurrente vers les enfers d'un personnage qui n'a pourtant comme seul péché qu'un amour envers un être perdu. On peut sans hésitation affirmer qu'au moins les trois premiers épisodes ont réussi à faire honneur au concept, comme nous allons le constater.