Sans non plus être le scénario le plus complexe et le mieux réalisé de tous les temps, celui de Tales of Phantasia sait mêler simplicité, valeurs, et intérêts. Le début suit le stéréotype même des histoires de jeux de rôle, et c'est finalement au fil de l'aventure que tout le potentiel du conte est dévoilé.
Alors qu'il était parti chasser en forêt avec son meilleur ami Chester, Cless, héros principal, tombe par hasard sur un arbre qui l'interpelle. Une fée apparaît effectivement et lui demande entre deux larmes de ne pas tuer l'arbre qui est en réalité déjà bien mort. A peine remis de cette vision, nos deux chasseurs entendent les cloches d'alarme de leur village, et une fois rentrés en hâte découvrent des maisons enflammées ainsi que des cadavres jonchant le sol. Par esprit de vengeance, ils se lanceront tous deux à la poursuite de ces assassins, ce qui les mènera après quelques péripéties devant le tombeau du roi maléfique Dhaos, dont la clef serait ce pendentif que Cless a en sa possession, héritage paternel, ainsi que celui que porte une jeune fille, Mint, tout juste rencontrée. Le roi maléfique est malheureusement libéré, et, impuissant devant sa force, les héros Cless et Mint sont envoyés cent ans en arrière pour aller chercher de l'aide et changer un présent où toute magie est inutilisable, à cause de la mort du fameux arbre aux esprits.
Là, ils rencontreront Klarth, professeur de magie et invocateur, ainsi que Arche, jeune magicienne volant sur un balai. Leur aventure sera composée de nombreux pactes à effectuer avec des esprits originels, ils seront plongés dans la grande guerre qui oppose le royaume des hommes à Dhaos, aussi présent dans ce passé, et devront guérir le fameux arbre aux esprits, avant de retourner à l'époque originelle pour faire de nouveau face au tyran. Malheureusement, ce dernier s'enfuira dans le futur, et c'est ainsi que le groupe de héros qui se fera bientôt appeler « Héros du temps » l'y suivra, pour mettre un terme à cette guerre qui menace le sort de l'humanité.
Derrière cette histoire qui paraît des plus banales se cachent des éléments intéressants, concernant la discrimination envers les demi-elfes, dont fait partie Arche, concernant l'amour jaloux et éternel, entre deux elfes dont l'un veut figer l'autre en pierre, mais surtout concernant les desseins du roi maléfique Dhaos, auprès duquel le joueur est presque surpris de prendre parti. En effet, si son but est effectivement d'anéantir l'humanité, c'est avant tout pour protéger le monde ainsi que le fameux arbre mourant. Avides de pouvoir et d'armes en tout genre, les hommes ont mis au point un canon surpuissant, mais qui nécessite de puiser énormément de mana, d'où l'affaiblissement de l'arbre, source de ce même mana et protecteur de la planète. C'est pour empêcher cette catastrophe imminente qu'est la mort de l'arbre, et donc la fin de toute magie, que Dhaos livre un combat sans merci à nos héros bien naïfs. La destruction du monde à cause des activités de l'Homme, sujet mis en question depuis voilà plusieurs décennies concernant notre belle planète bleue, fait donc partie des motifs de ce roi maléfique. A la fin du jeu, nous apprenons que, si Dhaos voulait protéger l'arbre à ce point, c'était pour pouvoir porter secours à son monde d'origine, la planète Derris-Kharlan, sur laquelle la même tragédie venait tout juste de se réaliser. Ainsi, nous comprenons la phrase d'introduction du jeu :
« Si le mal existe en ce monde, il se cache dans le cœur des hommes. » Edward D. Morrison
Encore une fois, tout reste très simple : les héros ne sont ni torturés par des questions existentielles, ni ne cachent de sombres et douloureux passés. Malgré tout, la légèreté avec laquelle est raconté ce conte pourtant bien mature contribue énormément au charme de ce jeu vidéo. Et il est fort à parier que beaucoup de joueurs ont longuement hésité avant de se mesurer à Dhaos pour le combat final, ayant bien à l'esprit que finalement, les méchants sont peut-être eux-mêmes.