Telle une œuvre d'art contemporain, Hohokum, le simulateur de serpent mystique, débarque sur les consoles Sony sans crier gare. Poésie, art, philosophie, expérience unique, ou placebo pour récepteurs opiacés, beaucoup s'en donnent à cœur joie pour crier au génie, mais la réalité, soft en main, peut être tout autre. Oui, vous pouvez adorer Hohokum, tout comme vous pouvez passer à côté de son absence totale de sens...
Arborant fièrement un style graphique ultra minimaliste, plat, sans contours et très coloré, que l'on doit à l'artiste Richard Hogg, le titre nous impose une vision très abstraite de son univers. Sans tutoriel, sans indications, on contrôle notre serpent, appelé « Long Mover », lors d'une première phase extrêmement réussie dans laquelle nous activons des ronds de musique qui viennent greffer leur rythme et leurs couleurs à l'univers, nous octroyant par la même occasion un énième compagnon de vol, qui viendra embellir la scène. Passé cet émerveillement total, ce sont 17 mondes qui s'offrent à nous, des mondes pour la plupart énigmatiques de prime abord, puisque l'on ne sait trop quoi y chercher, comme lors d'un premier contact face à un tableau.
Visite d'une galerie d'art en totale liberté
Par la suite, et au fur et à mesure de notre exploration, de petites mécaniques se découvrent, comme la possibilité de dézoomer la scène, d'avancer plus vite, d'activer des éléments du tableau en passant dessus, de frétiller énergiquement grâce au pavé tactile sur PS4 et... c'est tout. Le gameplay d'Hohokum se veut tout aussi minimaliste que sa réalisation, et c'est un avantage net qui forge l'accessibilité du titre qui, en contrepartie, noie le joueur dans une liberté un peu gênante. Rien n'est indiqué dans ces tableaux, et il vous faudra percer à jour leur histoire, parfois après plusieurs essais. De toute façon tout est accessible dès le début, en passant par le hub des mondes, ou en se baladant de « porte » en « porte », bercé par une bande-son intégrant plusieurs morceaux issus du label américain indépendant Ghostly International, avec notamment Tycho et ses morceaux ô combien aériens et envoûtants.
Une illumination éphémère ?
Passé l'émerveillement de l'intro et un petit tour du propriétaire, on se retrouve littéralement perdu, cherchant à comprendre le tableau dans lequel on vient d'arriver, explorant un nouvel univers qui, on l'espère, sera encore plus surprenant que le précédent. La formule marche si vous ne cherchez rien de plus qu'un petit voyage totalement abstrait dans un milieu aussi simple qu'onirique. Autre élément essentiel, le Long Mover peut, dans certains tableaux, acheminer des personnages dans des éléments du décor afin de débloquer des séquences, ce qui ne manquera pas de vous satisfaire puisqu'en faisant avancer le tableau, vous comprenez peu à peu sa logique. Allons donc, par exemple, récupérer un des trois personnages à cet endroit pour l'amener à l'autel, près de son futur conjoint et face au prêtre. Sonnons alors la cloche juste au-dessus d'eux pour célébrer le mariage, puis allons offrir du vin aux convives en prenant les serveurs pour les faire voler près des invités. Bref, vous comprenez le principe, même si certains mondes sont moins enchanteurs que d'autres.
D'ailleurs, au final, qu'en reste-t-il ? N'avons-nous fait que diriger un personnage au gameplay simpliste dans un univers plat et suggéré, dans le seul but de réaliser un simple enchaînement d’événements nous donnant la satisfaction d'avoir « terminé » la scène ? Ou alors, nous sommes-nous embarqués dans une aventure poétique saupoudrée de musique enivrante, en quête d'aventure, de magie et d'œuvres aux multiples secrets ? Seule votre sensibilité le décidera, et si vous n'êtes pas réceptif à l'art en général et que, pour vous, gameplay et trame sont les deux mamelles du jeu vidéo, passez votre chemin...
Points forts
- Une réalisation abstraite qui laisse libre cours à l'imagination
- Une bande-son de grande qualité
- Décortiquer et faire vivre les niveaux : un concept attrayant !
Points faibles
- La pauvreté du gameplay
- Le sentiment d'être perdu, dans un univers vaste et un peu vague
- Déplaira fortement aux joueurs qui cherchent une trame et des objectifs clairs
Avec sa réalisation minimaliste, colorée, et surtout grâce à sa musique, Hohokum nous livre un voyage contemplatif et abstrait dont l'authenticité n'a d'égale que sa volonté à faire « comme les grands ». Et si l'on peut comparer la prétention du titre à celle d'une production de ThatGameCompany, la réalité du terrain est malheureusement tout autre dès que l'on dépasse la phase d'émerveillement face au jeu. Il reste au final un titre qui détend, un titre qui sait emballer par son concept, mais un titre qui pourra aussi lasser certains au bout de quelques dizaines de minutes. Vous voilà prévenu !