Les séries Syndicate, X-com et Jagged Alliance ont beaucoup de points communs, que ce soit dans leur gameplay ou dans la façon dont elles ont évolué. Après avoir fait les beaux jours du PC dans les années 90, avec un mélange entre stratégie au tour par tour et RPG, ces trois licences sont entrées en hibernation pour se réveiller récemment, et opérer un changement de style plus ou moins radical. Syndicate et X-com sont devenues des FPS, ce qui n'a pas manqué d'attiser la colère de certains joueurs, tandis que Jagged Alliance opère une mutation moins marquée, en devenant un jeu de stratégie en temps réel, relativement proche d'un commando au niveau de la forme. Pour nous aider à attendre Jagged Alliance : Flashback, l'éditeur Kalypso nous sort Back in Action, un remake du cultissime Jagged Alliance 2 réalisé par une nouvelle équipe. Changement de développeur, changement de gameplay, Back in Action a tout de la nouvelle soupe vendue dans un vieux pot. Mais est-elle bonne ? La réponse tout de suite...
Remake oblige, le scénario de Back in Action ne diffère pas de Jagged Alliance 2. Enrico Chivaldori, roi légitime d'Arulco, un pays fictif vraisemblablement situé en Amérique du Sud, s'est exilé à la suite de la mort de son père et du coup d'Etat de sa femme, Deidranna. Enrico en a donc gros sur la patate et décide de vous engager pour vos talents d'expert tactique, et surtout pour vous demander de mettre sur pied une équipe de mercenaires censée liquider la reine autoproclamée, lui rendre son pays et lui éviter d'engager une procédure de divorce. Bon, ne vous attendez pas à un background développé ou à de nombreux retournements de situation, le scénario de Back in Action n'est qu'un prétexte aux combats. Ce n'est de toute manière pas un défaut. Les Jagged Alliance offrent habituellement un gameplay si riche et profond qu'on ne voudrait pas d'une trame trop évoluée, alourdissant le rythme de jeu. Soulignons tout de même l'humour et la cohérence de l'univers, deux choses très appréciables. Il n'est donc pas rare de tomber, parmi tous les objets à ramasser, sur des affiches de propagande, des lettres d'amour d'adolescents ou encore des revues cochonnes.
Le plus gros changement de ce remake de Jagged Alliance 2 est l'abandon du système de jeu au tour par tour, au profit du temps réel avec une pause active semblable à ce que l'on peut trouver dans un Dragon Age par exemple. Vous aurez ainsi le choix de pouvoir jouer en temps réel, afin d'obtenir un rythme plus rapide, idéal pour les déplacements ou les interactions avec le décor. Ou à l'inverse, de figer le temps et donner des ordres à vos mercenaires pour résoudre plus facilement les affrontements. Vous pouvez ainsi faire ramper la moitié de votre équipe, puis la faire passer en position de tir pour canarder les ennemis pendant que vos autres mercenaires les prennent à revers pour les attaquer au corps-à-corps. Les tactiques sont donc très nombreuses, faisant alterner les moments d'action pure avec d'autres, plutôt basés sur la réflexion et la préparation de l'offensive. Soulignons ainsi que le travail effectué sur la variété du level design et sur les personnages est très réussi, contribuant beaucoup au plaisir de jeu. Mais en dépit de cela, la palette de mouvements disponibles est limitée au strict minimum : il est impossible de se déplacer tout en orientant sa direction, impossible aussi de pouvoir se mettre à couvert, ou encore de lancer une grenade juste après l'ouverture d'une porte. En dix ans, les jeux vidéo ont considérablement évolué, et ne pas inclure les mouvements apparus dans cette période rend Back in Action assez lourd à jouer. Quant aux nombreux problèmes de collision empêchant vos personnages de se mouvoir correctement, ils finissent d'achever le joueur agacé.
Et pourtant, Back in Action avait beaucoup de choses à offrir. Le contenu est ainsi le même que celui de Jagged Alliance 2, ce qui est un signe de quantité et de qualité. En sus, Arulco affiche une assez grande zone de jeu avec de nombreuses villes à conquérir et des troupes ennemies se déplaçant selon leurs envies. Quant aux personnages jouables, ils sont vraiment nombreux, une quarantaine au total avec tous leurs propres affinités. Dans le lot, il faudra bien choisir car vous ne pourrez en contrôler que six simultanément. Mais en plus de conserver le même contenu, Back in Action maintient aussi intact l'aspect RPG avec des points de compétence à placer pour améliorer les différentes aptitudes. On peut ainsi décider de l'orientation de nos mercenaires, en se focalisant sur leurs points forts ou en les rendant polyvalents. Malheureusement, l'équilibrage et la difficulté du jeu sont à revoir, avec des aspects trop durs et trop contraignants à exploiter, comme l'infiltration. Au final, on préférera l'aspect action beaucoup plus rentable et accessible, oubliant bien vite les compétences liées à la furtivité pour tomber dans du rentre-dedans bien basique. Signalons alors une absence totale de challenge, faisant ainsi perdre au jeu une grande partie de son charme, dommage.
Jagged Alliance : Back in Action est un jeu correct. Déjà la richesse de son gameplay, à rapprocher de ce que faisait la série des Commandos, est assez rare de nos jours. Ensuite, sa durée de vie est assez longue : comptez au minimum une grosse quinzaine d'heures pour en voir le bout. Le problème, c'est son manque hallucinant de finitions affichées, et ce, dans tous les domaines. Les graphismes nous ramènent des années en arrière, certains éléments de gameplay (comme la possibilité de définir la direction dans lequel le personnage regarde) manquent cruellement. L'interface est peu pratique à utiliser, et surtout les nombreux bugs sont une véritable source d'agacement. Le pire, c'est que Back in Action aurait pu être une grosse claque, il aurait même dû l'être vu qu'il se base sur l'excellent Jagged Alliance 2. Au final, nous n'avons devant nous qu'un jeu juste correct, mais ne valant vraiment pas les quarante euros demandés. Et si vous tenez absolument à jouer à un bon jeu tactique, Jagged Alliance 2 coûte quatre fois moins cher sur certains sites spécialisés, et même s'il commence à accuser son âge, il reste toujours une référence du jeu PC.
Points forts
- Un contenu riche et de qualité
- Update graphique par rapport à l'épisode de base
- Une grande zone de jeu
- Le gameplay un peu remanié
- Une grosse quarantaine de personnages
- Drôle et cohérent
Points faibles
- Aucune nouveauté sur le scénario et le contenu
- Un prix complètement prohibitif
- Finitions à revoir (bugs...)
- Daté graphiquement
- Interface peu ergonomique
- Certains mouvements essentiels absents
Back in Action n'est décidément pas le signe du renouveau de la série, mais plutôt le signe de sa décadence. Avec un tel matériau de base, les développeurs ne pouvaient pas se planter et pourtant ils l'ont fait. Si on ne peut décemment pas dire que le jeu est mauvais, la sensation est quand même amère : dix ans d'attente pour une malheureux update graphique et quelques changements au niveau du gameplay... à 10 euros ça passe, à 40 c'est déjà plus problématique.